Les chiffres du mécénat d’entreprise en France ont été publiés par Admical, association qui agit pour le développement de cette pratique, le 11 octobre 2018. Ils montrent une forte évolution du mécénat, les montants déclarés par les sociétés étant passés de 945 millions d’euros en 2010 à 1,7 milliard en 2017. Sylviane Parriaux, déléguée générale de l’association a répondu à nos questions sur le mécénat en France.
Quelle est la définition du mécénat d’entreprise ?
Nous avons défini le mécénat dans une charte construite collectivement en 2011. Avant ce document, il n’y avait qu’une définition fiscale dans le Code Général des Impôts (CGI). Nous avons défini le mécénat comme un engagement libre – cela reste discrétionnaire – où l’entreprise se met au service d’une cause d’intérêt général. Le mécénat prend différentes formes. Le grand public connaît bien le mécénat en nature – le don alimentaire ou non alimentaire, le mécénat financier – ce qui est le plus pratiqué par les entreprises, puis le mécénat de compétences : la société va détacher ses collaborateurs sur leur temps de travail. Ils vont mettre leurs compétences professionnelles ou personnelles à disposition d’associations qui relèvent de l’intérêt général. On précise aussi dans cette définition que le mécénat a pour objectif premier de répondre à un besoin de société sans répondre à une recherche d’impact direct sur son activité, contrairement au sponsoring ou à d’autres formes d’engagement. Ce qui est au cœur du mécénat, c’est ce souci de répondre à une cause d’intérêt général.
Quels sont les avantages pour l’entreprise ?
Les entreprises font principalement du mécénat afin d'avoir un véritable impact. C’est aujourd’hui quelque chose de majeur. Il s'agit de la motivation principale des entreprises selon notre baromètre annuel. Il y a aussi la question de l’ancrage territorial, surtout pour les PME (petites et moyennes entreprises) qui créent ainsi avec leur écosystème géographique des liens qui n’auraient jamais été créés dans le cadre de leur activité classique. Cela est aussi une source d’innovation ou d’inspiration pour l’entreprise et ses collaborateurs. Et cela permet de travailler sur le savoir être des salariés, leur adaptabilité et créativité. Il y aussi une question d’incarnation des valeurs et d’image de l’entreprise. C’est un élément qui n’est pas négligeable.
Il y a aussi des avantages fiscaux pour les mécènes ?
Il existe aussi un levier fiscal. En France, le cadre réglementaire est assez favorable au mécénat. Quand une entreprise fait un don, elle peut déduire 60 % du montant du don de son impôt sur les sociétés, dans la limite de 0,5 % du chiffre d’affaires. Ce plafond n’est jamais ou rarement atteint par les grandes entreprises. Mais c’est souvent le cas pour les plus petites. C’est pourquoi nous proposons de mettre en place une franchise à hauteur de 10 000 euros de dons. Donner est finalement très facile ! Faire don de son matériel informatique, ou de 1000 euros sont des gestes simples et qui font la différence pour une petite association.
Avez-vous des exemples de mécénats de compétences ?
Des journées de mobilisation de collaborateurs ont pu être organisées notamment par l'association Surfrider foundation, pour des opérations de nettoyage de plages et de cours d’eau. Parmi les bénévoles qui viennent aider, il peut y avoir des collaborateurs d’entreprises. Plusieurs associations comme Le Rire médecin font aussi appel au mécénat. Des salariés vont aller passer du temps avec des enfants hospitalisés pour rendre leur quotidien plus joyeux. Dans ce cas, ce sont les compétences personnelles des gens qui sont mises à contribution, et c’est très riche pour tout le monde.
Quels sont les secteurs concernés ?
Nous avons fait une enquête il y a un an sur les Français et le mécénat, et nous venons de publier notre baromètre annuel. Lorsque l’on interroge les Français, les trois domaines prioritaires à soutenir sont la santé, la solidarité et l’environnement. S’agissant du budget alloué par les entreprises aux différents domaines d’intervention, il y a toujours eu un trio de tête : social, culture et patrimoine, puis santé. Cette année, on constate une progression significative du secteur de l’éducation (lutte contre le décrochage scolaire, accompagnement des jeunes), qui représente 23 % du budget.
Selon ces derniers chiffres, le nombre d’entreprises mécènes (9 % en 2017) est en forte évolution. Quelles en sont les raisons ?
La réponse est globale, c’est la prise de conscience par les entreprises qu’elles doivent avoir un rôle sociétal. Ce sujet-là est au cœur des discussions, notamment dans le cadre de la loi PACTE. C’est une prise de conscience assez forte. Même quand elles ont un modèle capitalistique, les sociétés ont bien conscience qu’avoir des actions pour incarner la responsabilité sociétale est indispensable.