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En été, les "intérimaires" du bénévolat à la rescousse des associations

Pendant l'été, les bénévoles aussi partent en vacances, contraignant les associations caritatives à s'adapter : certaines réduisent leurs activités mais d'autres recrutent de nouveaux volontaires pour la période estivale.

"L'été est une période difficile pour les personnes en grande exclusion car les aides se raréfient, et effectivement les bénévoles - ça peut se comprendre - prennent des congés", résume Philippe Gardent, directeur du secourisme et de la solidarité à l'Ordre de Malte. "Ce dont les exclus souffrent le plus, c'est de la solitude, et ils le vivent encore plus douloureusement en juillet-août car ils ont l'impression que tout le monde les oublie", ajoute-t-il.

Pendant les deux mois d'été, les sans-abris "n'ont vraiment rien: ils mangent ce qu'ils trouvent en fonction des associations qui tournent mais il y en a beaucoup moins", confirme Gaëlle, 32 ans, responsable adjointe des maraudes des Restos du coeur à Strasbourg.

Les associations essayent pourtant de s'adapter, et de maintenir au moins une aide minimale. Chaque année, à la belle saison, l'Armée du Salut lance ainsi un appel pour recruter de nouveaux volontaires. Norma, 38 ans, fait partie de ces "intérimaires" du bénévolat estival. Cette réfugiée congolaise, qui a elle-même bénéficié de colis alimentaires à son arrivée en France et qui souhaitait à son tour apporter son aide, avait proposé ses services à l'Armée du Salut dès le mois de mars. "Mais c'est seulement en juillet que j'ai été relancée par mail. On m'a demandé de venir donner un coup de main", explique la jeune femme, affairée pour la première fois, lors d'une chaude soirée de juillet, à servir les repas dans un centre de distribution alimentaire, près de la place de la République à Paris.

Chaque soir de l'année, en toutes saisons, les bénévoles de l'organisation caritative y servent plus de 400 repas aux plus démunis.

Effectifs dégarnis

Parmi les bénévoles "cet été, on a dû gérer pas mal d'absences, c'était un peu problématique", relève de son côté Françoise Cury, une volontaire expérimentée, habituée de cette "soupe du soir" caritative. "Il y a des gens qui s'inscrivent mais qui ne viennent pas, sans prévenir. C'était peut-être dû à la Coupe du monde de foot", suppose-t-elle en remplissant à la chaîne des assiettes de pâtes et de poisson pané.

Pour pallier les départs en vacances, les associations peuvent puiser dans un vivier ponctuel, grâce à des plateformes de mise en relation de l'offre et de la demande de bénévoles, comme le site benenova.fr.

Jusqu'en 2016, "nous aussi on fermait au mois d'août car on se disait qu'on n'allait pas trouver de bénévoles", explique Stéphanie Andrieux, la présidente-fondatrice du site. Mais "depuis l'an dernier, nous maintenons nos activités l'été, et on trouve des gens qu'on ne voyait pas le reste de l'année". Parmi eux, des étudiants, ou des personnes qui déclarent être davantage disponibles l'été. "C'est une porte d'entrée ponctuelle vers le bénévolat, mais dans plus de la moitié des cas, les gens continuent ensuite à s'investir, pendant le reste de l'année", détaille Mme Andrieux.

C'est le cas de Claudine Sanceau, 51 ans, "recrutée" l'été dernier par l'Ordre de Malte pour servir des repas aux sans-abri sur une péniche à Paris. Un an après, elle est toujours là. "Et j'ai bien l'intention de continuer, si c'est compatible avec mon nouveau travail". Au Secours catholique, les bénévoles de l'été sont "souvent des étudiants, qui s'investissent fortement, en nous aidant au moins deux soirs par semaine", précise Solène Mahé, la coordinatrice des actions de rue.

Pour pallier aux effectifs dégarnis, reste une solution étonnante: recourir aux bénéficiaires eux-mêmes, lorsqu'ils le souhaitent. "A deux ou trois reprises, lorsque nous manquions de bénévoles et à titre exceptionnel, nous avons demandé à des personnes sans-abris de nous aider pour animer des lieux d'accueil", raconte Mme Mahé. "Ca permet de casser les barrières, et puis beaucoup de migrants, notamment, nous le demandent: ils veulent se sentir utiles".

Avec AFP