Il y a 2 semaines, L214 appelait à réduire de moitié le nombre d’animaux tués dans l’élevage d’ici 2030. L’association, qui lutte contre la maltraitance animale et milite pour l’abandon de la viande dans les régimes alimentaires, avançait comme argument la diminution des émissions de CO2, de la souffrance animale et des risques sanitaires pour les consommateurs.
Une large enquête produite par un consortium de journalistes originaires de six pays européens avec le soutien The Guardian, El Confidencial ou encore Euractiv dévoile aujourd’hui l’expansion de l’agriculture intensive en Europe.
La France, n°1 de la volaille en batterie en Europe
Les auteurs de l’enquête se sont attelés à identifier le nombre de mégafermes présentes en Europe. Au total, 24 087 fermes européennes dépassaient la limite des 2 000 porcs à l’engraissement et 750 truies pour les élevages porcins et 40 000 volailles pour les poulaillers en 2023, qui définit ces exploitations comme intensives. Parmi elles, l’enquête décompte 11 672 porcheries et 12 415 poulaillers.
La France se classe 2e parmi les plus grands producteurs de viande issue de ce type d’exploitations, avec 3 075 mégafermes. Elle se situe derrière l’Espagne (3 963) mais devant l’Allemagne (2 930), les Pays-Bas (2 667) et l’Italie (2 146).
Elle est toutefois le premier pays producteur de volailles en batterie, avec 2 342 mégafermes, suivie du Royaume-Uni (1 553), de l’Allemagne (1 521), de l’Italie (1 242) et de la Pologne (1 207). Pour l’élevage porcin, le classement est dominé par l’Espagne, avec 3 401 mégafermes. Viennent ensuite le Danemark (1 532), les Pays-Bas (1 486), l’Allemagne (1 409) et l’Italie (904).
"Le nombre réel d'exploitations détenant un permis est probablement encore plus élevé, en raison de la sous-déclaration de certains États membres, pour des raisons commerciales ou de confidentialité, et des lacunes dans certains registres officiels de l'UE", souligne l’article.
Un impact environnemental, économique et social
L’expansion de ce type d’agriculture entraîne un certain nombre de conséquences, concernant la lutte contre le réchauffement climatique et le bien-être animal, mais aussi des questions économiques et sociales.
"Les inégalités se creusent dans le secteur agricole. Alors que certains agriculteurs très riches augmentent leurs revenus, la majorité des petits et moyens agriculteurs sont confrontés à des situations de plus en plus difficiles liées à l'augmentation des coûts de production, à la faiblesse des prix et à l'inégalité des paiements [de subventions] [qui sont] liés à la taille de l'exploitation, de sorte que les petites exploitations ne reçoivent pas ou peu d'aide publique", déplore Morgan Ody, coordinatrice générale de La Via Campesina, une organisation représentant les petits exploitants agricoles.
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Les exploitations familiales ou de petite taille ont ainsi de plus en plus de mal à survivre face à leurs voisins toujours plus gros, dont les cheptels vont jusqu’à 1,4 million de poulets et plus de 30 000 porcs.
"Nous devons reconnaître les coûts externes cachés, notamment les impacts environnementaux tels que la dégradation des sols, la pénurie d'eau, les émissions de méthane et les impacts sur la santé humaine telle que la résistance aux antimicrobiens", relève Tilly Metz, eurodéputée du Parti vert.
Alors que l’Espagne fait face à une contamination sans précédent de l’eau du robinet au nitrate résultant de l’élevage porcin, la Bretagne subit encore la prolifération des algues vertes sur son littoral, toujours à cause du nitrate.
"Selon le Bureau européen de l'environnement, le secteur de l'élevage de l'UE dans son ensemble – y compris la production intensive et conventionnelle – est une source majeure de pollution de l'air, du sol et de l'eau, responsable de 12 à 17 % des émissions totales de gaz à effet de serre de l'UE, ainsi qu'un facteur clé de la perte de biodiversité", expliquent les auteurs de l’enquête.