"Le changement climatique n’est pas réel”, "le CO2 est bon pour la planète", "il n’y a pas de consensus sur le changement climatique"...les arguments émanant de groupes dénialistes et climato-sceptiques pullulent sur Twitter depuis juillet 2022. Plus de 10 000 comptes actifs relaient aujourd’hui des fausses informations, rapporte une étude publiée le 13 février par l’Institut des systèmes complexes Paris Ile-de-France (CNRS). Un résultat obtenu grâce au concours de quatre scientifiques qui ont passé au peigne fin des millions de tweets et retweets autour du changement climatique entre 2021 et 2022. Que nous apprennent ces échanges ? Qui se cachent derrière ces messages ? Comment est structurée cette nébuleuse ? Voici quelques éléments de réponses.
Tout d’abord, il est important de distinguer deux communautés. D'une part, les pro-climat – les personnes acceptant les résultats des scientifiques et les synthèses faites par le Giec. Ce sont essentiellement des activistes climatiques (associations, ONG...). D'autre part, les climato-sceptiques ou dénialistes - ceux qui rejettent les principales conclusions du Giec et de la science du climat. Selon les chercheurs, il y a environ 30 % de "climatodénialistes" parmi les comptes Twitter qui abordent les questions climatiques.
Contrairement aux pro-climat, qui "concentrent leurs prises de parole sur leur domaine d’expertise", les dénialistes ont tendance à s’exprimer sur plusieurs thématiques."
"La communauté dénialiste présente des formes inauthentiques d’expertises, avec un noyau dur de comptes qui s’expriment sur une multitude de sujets, concentrent une présumée expertise et fabriquent la majorité des narratifs en circulation", rapportent les auteurs de l’étude.
Un regain de faux comptes
Il est par ailleurs intéressant de noter qu’au niveau mondial, la communauté dénialiste comporte une surreprésentation de comptes aux comportements inauthentiques, autrement dit de "faux comptes", de + 71 % par rapport aux communauté pro-climat, avec 6 % de comptes probablement bots”. En France, la proportion de comptes inauthentiques au sein de la communauté dénialiste est “2,8 fois supérieure” à celle de la communauté française du Giec, relaie le rapport qui pointe de possibles opérations d’astrosurfing - “une stratégie consistant à faire croire en l’adhésion d’une foule à une cause par la création d’une foule factice”. La proportion de comptes suspendus par Twitter est quant à elle dix fois supérieure.
Autre enseignement, la communauté dénialiste "produit ou relaie 3,5 fois plus de messages toxiques que la communauté Giec”. Ces contenus englobent des insultes, menaces, attaques sur le genre ou la religion.
Antivax et pro-Kremlin
Toujours selon l’étude, une proportion non négligeable de comptes relève de la sphère informationnelle de Reconquête!, le parti du candidat à la présidentielle 2022 Eric Zemmour. Plusieurs comptes ont également relayé des campagnes numériques de contestation antisystème. Celle autour de la crise sociale en Guadeloupe de l’été 2021 ou encore la polémique complotiste autour du variant Omicron (nov 2021 – janvier 2022).
Beaucoup s'opposent aussi aux mesures gouvernementales mises en place pour lutter contre la pandémie de Covid-19 ou relaient la propagande du Kremlin depuis le début de la guerre en Ukraine (près de 6 000 comptes)."
Sur la toile, les débats sont également influencés par des événements saisonniers (feux de brousse australiens, vagues de chaleur extrêmes ou sécheresses) ainsi que des événements internationaux tels que les COP. En France, une importante communauté s’est structurée depuis l’été 2022 suite à une triple actualité climatique : la multiplication d’événements extrêmes (canicules, incendies...), la convergence des enjeux du réchauffement climatique avec ceux de la sécurité d’approvisionnement en pétrole et en gaz du fait de la guerre en Ukraine, et la COP27 qui s’est tenue en Egypte.
A l'heure de la lutte contre le dérèglement climatique, cette montée du dénialisme ne laisse présager rien de bon pour la communauté scientifique. "Les discours sur Twitter des communautés dénialistes et technosolutionnistes freinent probablement la dissémination des connaissances scientifiques et des conclusions du GIEC en agissant de manière négative sur l’activité en ligne des scientifiques des sciences du climat et du changement climatique", conclut l’étude.
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