Aux États-Unis, une autre étude montre une baisse de 22 % de la population de papillons entre 2000 et 2020.
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Biodiversité

Pourquoi le déclin des insectes touche même les zones sans activité humaine

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"Dans la région isolée de Molas Pass, au Colorado, une étude de l’Université de Caroline du Nord à Chapel Hill révèle une chute de 72 % de la population d’insectes en seulement quelques années. Fait surprenant : cette zone, éloignée des cultures intensives et de l’urbanisation, est pourtant touchée. Un signal inquiétant que le dérèglement climatique n’épargne aucun territoire, pas même les plus préservés."

Souvent invisibles et négligés, les insectes sont pourtant au cœur de la santé de nos écosystèmes, et donc de notre survie. De la pollinisation à la régénération des sols, leurs fonctions sont irremplaçables. Face à ce rôle crucial, il devient urgent de mesurer l’impact de nos actions sur l’environnement.

Des effets visibles même en l’absence d’activités humaines

La particularité de l’étude publiée dans la revue Ecology de la Ecological Society of Americarepose sur le fait qu’elle a été menée dans une région montagneuse isolée, à plus de 3 200 mètres d’altitude, loin de toute agriculture intensive ou urbanisation massive. En théorie, ces zones préservées devraient offrir un refuge aux insectes. Pourtant, les résultats sont sans appel : en seulement huit ans, les chercheurs ont observé une baisse de 72 % du nombre d’insectes capturés.

Ce constat vient remettre en question l'idée que seule l'activité humaine directe, comme les pesticides ou la destruction des habitats, serait responsable du déclin des populations d’insectes. Ici, le principal facteur identifié est le changement climatique : les variations de température, les sécheresses plus fréquentes, et les perturbations du cycle saisonnier bouleversent profondément l’écosystème local.

Un phénomène mondial

D’autres études récentes, menées en Europe, en Amérique du Sud ou encore en Asie, confirment la tendance : les insectes déclinent partout, et parfois à une vitesse alarmante. Le changement climatique, en agissant de manière globale, accentue les pressions déjà exercées par la pollution, la déforestation ou l’agriculture intensive.

Face à l’ampleur du phénomène, les scientifiques appellent à une approche systémique pour enrayer le déclin des insectes : réduction des émissions de gaz à effet de serre, préservation des habitats naturels, création de corridors écologiques et transformation des pratiques agricoles figurent parmi les priorités. Et les chiffres le confirment. En Allemagne, une étude relayée par PubMed révèle une chute de 76 % des insectes volants en 27 ans, même dans des zones protégées. Aux États-Unis, une autre étude montre une baisse de 22 % de la population de papillons entre 2000 et 2020.

Une alerte qui concerne aussi les humains

Ainsi, la disparition des insectes n’est pas seulement une question écologique : elle touche aussi directement notre alimentation et notre économie. Moins de pollinisateurs, ce sont des récoltes qui diminuent. Moins d’insectes dans les sols, c’est une fertilité qui s’appauvrit. À long terme, c’est la sécurité alimentaire de millions de personnes qui est en jeu.

En somme, les insectes sont des indicateurs de la santé de notre planète. Leur déclin silencieux nous alerte : le dérèglement climatique n’épargne aucun recoin du globe, et ses conséquences sont déjà bien visibles.