La pollution plastique des plages ne reste pas qu'à la surface, elle s'enfonce aussi dans les sols
©Lucien Wanda/Pexels
Biodiversité

Pollution : nos plages regorgent de plastiques

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Mégots de cigarettes, bouteilles de crème solaire, sacs… les déchets plastiques abondent sur les plages. Très résistants, ils peuvent avoir des conséquences sur l’environnement et la biodiversité pendant des millénaires. À l'occasion de la journée mondiale sans sac plastique, ID fait le point sur ce phénomène planétaire. 

Quand on pense aux vacances, c’est souvent l’image d’une mer azur et de plages de sable fin qui nous vient à l’esprit. Pourtant, une étude récente de l’Institut français de recherche pour l'exploitation de la mer (Ifremer) montre que les littoraux du monde entier regorgent de déchets plastiques, parfois enfouis profondément dans le sol.

Les scientifiques ont concentré leurs recherches sur l’archipel d’Hawaï, dans l’océan Pacifique, en raison de sa proximité avec le "vortex de déchets du Pacifique Nord", aussi appelé le "septième continent". À cause des courants marins, cette masse d’ordures située entre Hawaï et la Californie libère régulièrement des morceaux de plastique qui s’échouent sur les côtes alentours. 

Cependant, la majorité des plastiques analysés n’a pas été trouvée en surface, puisque 91 % étaient enfouis dans le sol, sous le sable. "On a trouvé des plastiques jusqu'à un mètre de profondeur", explique Astrid Delorme, post-doctorante à l’Ifremer et co-autrice de l’étude. "On a trouvé, par exemple, 2 000 à 3 000 particules de plastique à 60 à 90 cm de profondeur […] d’une taille comprise entre 5 et 6 cm".

En effet, les déchets plastiques peuvent mettre jusqu’à 1 000 ans pour se décomposer dans la nature. Pendant ce temps, ils se fragmentent et se transforment en microplastiques. "On a vu que 92 % des plastiques qu'on a échantillonnés sont fragiles dans des environnements où il y a des vagues, des mouvements de sable, etc. Cette fragilité rend la formation de microplastiques hautement probable", confirme Astrid Delorme. Ils sont en moyenne 70 fois plus petits que l’épaisseur d’un cheveu, selon l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES).

Des conséquences sur les écosystèmes

En tout, on estime que l’océan contient 150 millions de tonnes de plastiques. 80 % de ces déchets retrouvés sur les littoraux européens proviennent des activités humaines à terre, selon le ministère de la Transition écologique. 

 

Face à cette recrue d’essence, l’Union européenne a décidé de fixer un seuil de 20 déchets tous les 100 mètres pour limiter la pollution plastique. Ce seuil est pour l’instant largement dépassé, car une étude de 2021 du Service des données et études statistiques (SDES) comptabilisait 350 déchets par tranche de 100 mètres sur les plages françaises.

"Les impacts du plastique ne s’arrêtent pas à la pollution 'visible'", rappelle quant à elle l’ONG Surfrider Foundation. Même microscopiques, ces plastiques ont des conséquences sur la faune et la flore des milieux marins. 

Ils sont, par exemple, connus pour être des éléments perturbateurs dans la reproduction des tortues. "On remarque sur des sites comme Aldabra [aux Seychelles] que les tortues ne peuvent plus creuser leur nid à cause de l'accumulation de plastique", explique Simon Bernard, président de Plastic Odyssey. "La quantité de microplastiques dans le sable influe sur la température des nids et donc a une influence sur le sexe des tortues. Il y a moins de femelles qui naissent", ajoute ce dernier. Ce déséquilibre, à terme, peut mener à la disparition de certaines espèces de tortues. 

Une situation difficilement réversible

À l’échelle internationale, la situation semble difficile à réparer. Il est possible de draguer le sable en surface pour éviter que ces plastiques s’enfoncent dans le sol et s’ajoute à la masse de microplastiques déjà présente. Il n’existe toutefois pas encore de solutions pour aller nettoyer les plages en profondeur. De plus, cela pourrait endommager les écosystèmes côtiers.

En France, les études abordant cette problématique à l’échelle nationale se font rares. Cependant, les pouvoirs publics s’investissent pour lutter contre ce phénomène. 

En 2020, le ministère de la Transition écologique a établi la charte des "plages sans déchet plastique pour des communes littorales éco-exemplaires". L’objectif est de nettoyer les plages françaises d’ici la fin de l’année 2025.