Allain Bougrain-Dubourg, grand défenseur de la cause animale, président de la Ligue pour la protection des oiseaux.
©XAVIER LEOTY / AFP
Biodiversité

Allain Bougrain-Dubourg : "14 Juillet : les oiseaux ne sont pas à la fête"

Si la révolution française avait eu lieu un 14 avril, cela aurait eu un effet catastrophique pour les oiseaux français. 

En pleine période de reproduction, les feux d'artifice auraient anéanti les couvées. Le 14 juillet est-il moins meurtrier ? Sans aucun doute dans la mesure où la période de reproduction engage son épilogue mais il reste beaucoup d'oiseaux élevant encore leurs poussins, tandis que d'autres sont tout simplement dérangés par les pétarades.

Depuis quelques années, la cohabitation entre le peuple du ciel et les festivités se fait plus tendue. En Italie, des centaines d'étourneaux n'ont pas survécu à un feu d’artifice romain. Affolés, ils ont percuté des arbres et des immeubles sans retrouver le calme. Outre-Atlantique, dans l'Arkansas, ce sont des milliers de carouges à épaulette, sorte de merles, qui ont succombé lors d'une nuit de la Saint Sylvestre victimes des détonations. Même situation de panique aux Pays-Bas où des oiseaux aquatiques se sont envolés par milliers, complètement déstabilisés durant près de 45 minutes.

Des conséquences directes sur les populations

En 2019, la LPO qui suit attentivement le destin de plusieurs colonies de sternes nicheuses sur la Loire a réalisé une étude sur les conséquences des festivités du 14 juillet. Résultat catastrophique. Les feux tirés à une distance de 300 à 600 mètres des oiseaux ont provoqué une panique générale. Vincent Licheron, directeur de la LPO Centre Val-de-Loire, résume la situation. "Les sternes ont quitté le site de reproduction durant toute la durée des tirs laissant les œufs et les poussins sans surveillance. De nombreux couples ont abandonné leur nid durant les jours suivants". Résultat, des poussins morts ont été retrouvés ici et là, tandis que de nombreuses couvaisons étaient suspendues. En négociant avec la mairie de Tours, la LPO a obtenu l’interdiction des tirs. Désormais, c'est au cœur de la ville que des festivités de déroulent sans plus importuner les oiseaux qui ont fait 500 kms pour donner la vie.

Une situation comparable se joue actuellement à Nevers. Un tir doit être réalisé depuis un pont, à quelques mètres d'une colonie de sternes. Le maire, Denis Thuriot, alerté des conséquences désastreuses durant les années précédentes, s'est engagé à réduire l'impact cette année et à déplacer le feu d’artifice en 2024. Cette démarche est jugée inacceptable. La LPO ne peut admettre, qu'une année encore, des espèces protégées soient détruitres pour le plaisir d'une fête. Elle n'a pas l'intention de laisser faire. Eric Piolle, maire de Grenoble, envisage de déplacer ou de suspendre les tirs en 2024 pour garantir la tranquillité des oiseaux.

Une étude conduite en Allemagne et aux Etats-Unis lors de 133 tirs, recommande une distance minimum de 1 000 à 2 000 mètres. La tranquillité élémentaire que l'on doit aux oiseaux suffira t-elle à en faire prendre conscience aux élus ? Pas évident. Le réchauffement climatique pourrait contribuer à les convaincre : les enjeux sècheresse et risques d'incendies ont conduit à supprimer de nombreux feux d'artifice. Place désormais aux drones lumineux qui prétendent compenser la magie des scintillements fugitifs.

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