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Au Pays-Basque, des éleveurs ignorent la crise du lait

Grâce au modèle coopératif et au financement participatif des éleveurs ont décidé de reprendre leur destin en mains.

A Larceveau, dans le Pays Basque, c'est l'heure de la traite. Xabi Lopepe est à la manoeuvre avec ses 300 brebis et ses 30 vaches blondes d'Aquitaine qui paissent dans une vaste plaine aux pieds des Pyrénées.

Cet éleveur de 37 ans n'a pas à s'inquiéter de la crise du lait ou de l'écoulement de sa production: elle est destiné à la Coopérative laitière du Pays Basque (CLPB), qui lui permet de maîtriser tous les maillons de la chaîne jusqu'à la vente des fromages.

Xabi Lopepe est fier d'être un des quelque 100 membres fondateurs de la CLPB qui obéit au principe de gestion : un membre, une voix. "Nous avons pris notre destin en main, sourit-il. La CLPB a été créée en 2011 pour anticiper les crises du lait, pas à cause des crises, mais pour les anticiper".

Nous maîtrisons l'intégralité de la chaîne, de la ferme au consommateur. Nous ne dépendons de personne", souligne celui qui, à ses heures de loisirs, est guitariste de metal hard rock.

"Le modèle des fruitières du Comté nous a inspiré; Elles ont opté pour un système coopératif de leur production laitière valorisés en fromages d'appellation d'origine protégée (AOP). Nous avons fait de même", résume-t-il.

La coopérative est implantée à une quarantaine de km, aux Aldudes, un village niché dans la vallée du même nom, sertie par un écrin de montagnes, où sont aussi produits de célèbres produits basques de qualité comme la charcuterie de Pierre Oteiza ou la truite de Banka.

L'argent du beurre

Pensée en 2011, la coopérative ouvre ses portes en 2014, un investissement de 6 millions d'euros, rassemblés à 70 % grâce à des emprunts bancaires et deux financements participatifs et à 30% par les producteurs. Elle commercialise du fromage et, en moindre partie, du beurre, des produits élaborés dans le cadre de l'AOP Ossau-Iraty pour le lait de brebis et la mention Bleu-Blanc-Coeur pour le lait de vache.

Les difficultés ont surgi dès 2015, se souvient Jean Mollon, éleveur et président de la coopérative. Nos produits étaient innovants, mais nous n'avions pas de force commerciale. Il fallait trouver l'argent du beurre".

"Les éleveurs ont fait office de banque. Cinquante d'entre nous sont partis faute de pouvoir tenir financièrement", regrette-t-il.

"Nous avons redoublé d'efforts et nous avons signé de nouveaux partenariats commerciaux. Notamment avec Biocoop, premier réseau de magasins bio en France".

Aujourd'hui, la coopérative traite 3,5 millions de litres de lait de vache et 1 à 1,5 million de litres de lait de brebis, affine 200 tonnes de fromage par an et affiche un chiffre d'affaires de 3 millions en 2017. Elle emploie 25 salariés. Mais encaisse toujours des pertes.

"On pense arriver à l'équilibre en 2019 et faire revenir des producteurs. Notre outil est dimensionné pour accueillir 10 millions de litres de lait, estime M. Mollon.

Le circuit de distribution est classique, la grande distribution à 60 % sous la marque Miguel Gorry et les circuits courts, crémiers ou autres à 40 %.

La grande distribution est à l'écoute de nos projets. Nous sommes dans l'air du temps, de la fourche à la fourchette", s'amuse M. Mollon.

L'une des marques de fabrique de la maison est la bûchette affinée pur brebis, à la croûte fine et naturelle sous un packaging original, la bûche épouse la forme de la croix basque. Toute une gamme se décline.

"Les projets sont développés avec les producteurs, explique Paul Rayon, chef fromager de la CLPB, Ce contact permanent avec l'amont de la filière change tout dans la qualité du produit", estime-t-il.

"Ce processus bouleverse notre savoir-faire, croit aussi Xabi Lopepe. Nous sommes directement impliqués dans la transformation, ça change la donne".