Après avoir été rejeté par le Sénat puis par l'Assemblée l'an dernier, l'écocide est de retour sur le devant de la scène. Les conclusions rendues dimanche 21 juin par la Convention citoyenne pour le climat le remettent en lumière, espérant faire légiférer sur ce concept. Mais concrètement, qu'est-ce qu'il signifie ?
L'écocide, quézako ?
Là où le terme d'"homicide" désigne le crime commis contre un être humain, "féminicide" celui commis contre une femme, ou "génocide", contre un groupe de personnes, "écocide", quant à lui relève du crime contre l'environnement. Dans les colonnes du Larousse, il est défini comme une "grave atteinte portée à l’environnement, entraînant des dommages majeurs à un ou plusieurs écosystèmes, et pouvant aboutir à leur destruction". Pour les socialistes ayant porté la proposition de loi finalement rejetée dans l'Hémicycle en 2019, l'écocide désigne là aussi, "le fait de porter atteinte de façon grave et durable à l'environnement et aux conditions d'existence d'une population, en exécution d'une action concertée tendant à la destruction ou à la dégradation totale ou partielle d'un écosystème".
La loi française n'en veut pas
"Observant que la criminalité environnementale s’accroît à l'échelle internationale tout en restant impunie, les sénateurs souhaitent poser les jalons d'un droit pénal de l'environnement qui permette de lutter contre les crimes qui menacent la planète", lisait-on dans la proposition de loi présentée en première lecture aux sénateurs l'an passé. Les socialistes entendaient imposer une peine de réclusion criminelle de vingt ans et 7 500 000 euros d'amende. Le texte a finalement été rejeté une première fois dans la nuit du 2 au 3 mai. À droite, l'opposition avait jugé que celui-ci présentait "trop d'imprécisions", tandis que la secrétaire d'Etat Brune Poirson l'avait estimé "relativement flou sur certains points" et "source d'insécurité juridique", soulignant "l'arsenal robuste" de la France déjà en place en la matière.
Le 5 décembre devant l'Assemblée nationale cette fois, la proposition a à nouveau été avortée.
Quelle place pour l'environnement dans le droit français ?
Conséquence de ces deux rejets consécutifs, l'écocide n'a donc pas été intégré au Code pénal. Mais alors, à quel "arsenal robuste" la secrétaire d'Etat faisait-elle référence ? En France, certains textes assez récents visent toutefois des portées similaires, comme par exemple celui de "préjudice écologique pur", reconnu par la Cour de cassation en 2012. Cette année là, Total a été condamné pour le naufrage de l'Erika en 1999, un pétrolier transportant plus de 30 000 tonnes de fioul qui s'est échoué au large des côtes bretonnes.
Le "préjudice écologique pur", qui figure aujourd'hui dans les lignes du Code civil, est défini comme une atteinte directe ou indirecte portée à l’environnement. Du côté du Code pénal, figure le "crime de terrorisme écologique" : celui-ci consiste à "introduire dans l’atmosphère, sur le sol, dans le sous-sol, dans les aliments ou les composants alimentaires ou dans les eaux, y compris celles de la mer territoriale, une substance de nature à mettre en péril la santé de l’homme ou des animaux ou le milieu naturel".
Ce que veut la Convention citoyenne
Ce dimanche, la Convention citoyenne pour le climat a donc voté en faveur d'un référendum visant entre autres à faire reconnaître le crime d'écocide dans les textes de loi. Mais de ce terme, elle propose une autre définition : "Constitue un crime d'écocide, toute action ayant causé un dommage écologique grave en participant au dépassement manifeste et non négligeable des limites planétaires, commise en connaissance des conséquences qui allaient en résulter et qui ne pouvaient être ignorées", écrivent les 150 membres. Afin de définir ces "limites planétaires" et faire appliquer la loi, ils suggèrent la création d'une Haute Autorité des limites planétaires, déclinée en régions. Pour eux, ce crime pourrait être puni de "vingt ans de réclusion criminelle et d'une amende de 10 millions d'euros".
Ces limites planétaires évoquées par la proposition sont au nombre de neuf et font référence à celles reprises par le ministère de la Transition écologique et solidaire en 2019 : elles concernent le changement climatique, la gestion mondiale des ressources en eau, l'érosion de la biodiversité, l'appauvrissement de l'ozone... En décembre dernier, un rapport gouvernemental constatait que la France dépassait six de ces neufs limites.
Dans les couloirs de l'Elysée, la rumeur d'un possible référendum se chuchote. Alors que la Convention a déposé sa copie sur le bureau présidentiel, le chef de l'Etat devra y trouver des débouchés politiques dans la dernière ligne droite de son mandat. Dès le mois de janvier dernier, Emmanuel Macron avait promis "des décisions fortes" et évoqué les éventuelles solutions pour traiter les propositions des 150 citoyens. Parmi elles, la possibilité d'un référendum. Après neuf mois de travaux et six sessions plénières entre les murs du Conseil économique, social et environnemental (CESE), le président a fait savoir qu'il recevrait les auteurs du rapport le 29 juin prochain, "afin d'apporter une première réponse à leurs propositions".
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