Salon de l'Agriculture, 2023.
©LUDOVIC MARIN/POOL/AFP
Politique

Boudé dans les rayons, le bio appelle à l'aide

Confrontés à une désaffection sans précédent des consommateurs en pleine crise inflationniste, les agriculteurs et industriels du bio s'agacent de voir le gouvernement rester insensible à leurs appels au secours.

Du syndicat majoritaire FNSEA à la Confédération paysanne, de l'union des coopératives agricoles à la fédération des industriels spécialisés, les messages d'alerte s'empilent à la veille de l'ouverture samedi du Salon de l'agriculture.

La France laisse les filières bio s'enfoncer dans la crise sans réagir."

Après dix ans d'une croissance à deux chiffres, le marché du bio est percuté par l'inflation : les consommateurs se rabattant sur des produits moins chers. L'an dernier, les ventes de bio ont reculé de 7,4 % en grandes surfaces sur un an, selon le panéliste NielsenIQ. Une baisse qui est encore plus marquée dans le réseau spécialisé (Biocoop, Naturalia, Comptoirs de la bio), à -12 %, selon deux enseignes. "La France laisse les filières bio s'enfoncer dans la crise sans réagir", déplorent dans un communiqué commun des organisations de producteurs et industriels bio.

Dans un rare mouvement d'humeur sur ce sujet, les syndicats FNSEA et Jeunes agriculteurs, les Chambres d'agriculture et la Coopération agricole jugent que la réponse du ministère de l'Agriculture "à ce stade des discussions n'est pas satisfaisante". "Les 60 000 fermes [sur environ 390 000] engagées en bio méritent aujourd'hui un accompagnement à la hauteur au regard de la crise traversée", défendent ces quatre organisations. Elles jugent aussi irréaliste l'objectif officiel d'atteindre 18 % de la surface agricole utile française en bio d'ici à 2027, contre 10,3 % en 2021. Et ce, alors que les conversions sont stoppées faute de débouchés et que des agriculteurs doivent repasser à une production conventionnelle.

"La déconversion [du bio vers le conventionnel], c'est la pire des choses qui puisse nous arriver", a déclaré mercredi le ministre de l'Agriculture Marc Fesneau à des journalistes. "On est en train d'essayer de regarder comment on peut accompagner ce moment", a-t-il esquissé, rappelant que les commandes des cantines devraient nourrir la demande. Des objectifs avaient été fixés à la restauration collective, censée introduire au 1er janvier 2022 au minimum 20 % de produits biologiques dans ses achats. "On est à 6 %" aujourd'hui, a dit le ministre.

"Point de rupture ?"

Lors du précédent Salon de l'agriculture, de même qu'en décembre dernier, le ministère avait annoncé des aides pour financer des campagnes de communication en faveur du bio. Mais ce sont des soutiens directs aux producteurs qui sont réclamés.

Dans les poulaillers français, il y avait un quart de poulets bio en moins en 2022 par rapport à 2021. Alors que le recul est bien plus modeste tous modes de production confondus (-4,2 % sur un an) dans un contexte plombé par la grippe aviaire, selon l'interprofession de la volaille Anvol. "Depuis quatre, cinq ans toute la filière était montée en gamme. (...) Est-ce qu'on a atteint un point de rupture ?" s'est interrogé cette semaine en conférence de presse le président de l'Anvol, Jean-Michel Schaeffer. Un poulet bio est vendu environ trois fois plus cher qu'un poulet standard, du fait du recours à des races qui grossissent plus lentement, peuvent évoluer à l'air libre (sauf lorsque la grippe aviaire frappe), sont moins serrées dans les poulaillers et nourries exclusivement avec des aliments bio.

Dans un courrier au ministre, l'interprofession laitière Cniel a demandé 71 millions d'euros d'aide pour les producteurs de lait bio. "La consommation de produits laitiers bio est revenue à son niveau de fin 2018, alors que la collecte a progressé de +40 %", affirme-t-elle. La production excédant la demande, les industriels écoulent au prix du conventionnel du lait payé aux agriculteurs au prix du bio. Le leader du lait Lactalis a indiqué avoir ainsi dû "déclasser" plus de 40 % du lait collecté auprès des éleveurs bio sous contrat avec lui, un niveau "jamais connu jusqu'alors". Le Cniel constate que les cessations d'activité, "auparavant marginales en bio", augmentent "et devraient encore s'accélérer en 2023" : elles ont concerné 3 % des producteurs en 2022 contre moins de 1 % les années d'avant.

Avec AFP. 

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