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© Yaroslav Danyl Chenko
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Une colombe ne fait (peut-être) pas le printemps

Cette semaine, l’actualité était centrée autour des communications des principales banques centrales, avec notamment la Banque centrale européenne qui a ouvert le ban, mars étant un mois chargé avec également à l’agenda la Banque du Japon le 19 mars, la Réserve fédérale américaine (Fed) le 20 mars et la Banque d'Angleterre le 21 mars.

La Banque centrale européenne (BCE) a annoncé, jeudi 7 mars, qu’elle laissait ses taux inchangés pour la quatrième fois d’affilée (depuis le 14/09/23), optant pour la prudence face au recul de l’inflation dans la zone Euro pourtant bien engagé (le taux de dépôt reste à 4 %, le taux de refinancement à 4,50 %, le taux de facilité de prêt marginal à 4,75 %).

La BCE, comme chaque trimestre, a dévoilé ses nouvelles prévisions de croissance/inflation pour les années n/ n+1/n+2. Comme largement attendu, et là encore sans surprise, elle a revu à la baisse sa prévision annuelle d’inflation dans la zone, passant de 2,7 % à 2,3 % pour 2024 (l’objectif d’une inflation à 2 % est désormais visé en 2025). Sans surprise également, la BCE a abaissé à 0,6 % sa prévision de croissance pour 2024 (soit une révision de -0,2 points de pourcentage - pp). La BCE a toutefois maintenu sa prévision de croissance pour l’an prochain à 1,5 % et l’a légèrement relevée pour 2026 à 1,6 % (+0,1 pp).

Pour enclencher la première baisse de taux, la BCE souhaite prendre son temps, rendez-vous en juin donc !

A noter, qu’en dépit d’une grande divergence transatlantique sur la dynamique de croissance, la convergence s’opère sur le calendrier de première baisse des taux de la part de la BCE et de la Fed (juin tient la corde, après l’audition du président de la Fed devant le Sénat américian). A cette date, la BCE aura une meilleure appréciation des statistiques les plus suivies, notamment des chiffres de l’emploi mais surtout des résultats des négociations salariales, la fameuse crainte des effets de second tour !

Une fois le pas franchi, la question du tempo de baisse des taux demeure. Les marchés anticipent désormais 4 baisses probables sur l’année 2024 (pour 6 réunions programmées : 11/04, 06/06, 18/07, 12/09, 17/10, 12/12). Même si l’Europe du Sud aurait probablement préféré une action dès avril, une majorité semblerait fixée sur juin avec l’idée de deux baisses à la suite (juin et juillet) pour réconcilier les positions.

La fonction de réaction de la BCE semble une nouvelle fois privilégier l’inflation salariale et l’emploi au détriment de la croissance, avec un risque de poursuivre trop longtemps des politiques restrictives, alors même que le caractère exogène de l’inflation a été souligné. Un rebond du prix des matières premières mettrait en danger le scénario de baisse rapide de l’inflation mais ce n’est pas ce qui est constaté actuellement ni attendu dans les prochains mois (sauf événement géopolitique naturellement).

L’arbitrage entre croissance et inflation rend l’équation budgétaire particulièrement difficile pour les Etats de la zone, à l’instar de la France qui se voit contrainte d’introduire des mesures contracycliques de réduction budgétaire pour donner le change par crainte de voir sa note de solvabilité dégradée.

Du coup, doit-on donner de la valeur aux prévisions marquant un rebond pour 2025 et 2026 de la croissance européenne ou faut-il s’inquiéter d’un risque de stagflation ?

Dans ce contexte, avec un « put » des banques centrales, en dépit d’une conjoncture incertaine (rapport de l’emploi toujours solide mais plus mitigé en février par rapport à janvier), les actions continuent de caracoler, le CAC franchissant même la barre symbolique des 8000 points.

Cet environnement « risk-on » pèse sur le billet vert qui recule contre les principales devises.

Contenu rédigé par Olivier GUILLOU, Directeur de la gestion.