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Inflation américaine : surprise surprise !

Après l’emploi américain en début de mois, la surprise est venue, la semaine dernière, des chiffres de l’inflation. En janvier, l’évolution des prix mesurée par l’indice des prix à la consommation CPI n’a montré que peu de signes d’amélioration. Quel regard porter sur cette parution ? Est-elle susceptible d’avoir une incidence sur la position de la Banque centrale américaine ?

L’inflation totale mesurée par le CPI (Consumer Price Index) est passée de 3,4 % sur un an en décembre à 3,1 % en janvier, alors que le consensus tablait sur un chiffre de 2,9 %. Sa version cœur (hors énergie et alimentation) était elle aussi attendue en baisse, mais elle est restée inchangée à 3,9 %. Pour expliquer ce « loupé », il faut regarder dans le détail des différentes catégories. Ainsi, si l’on se concentre sur l’indice cœur, la catégorie des biens (appareils électroniques, vêtements…) contribue désormais négativement à l’inflation sur un an glissant, grâce à la normalisation des chaînes logistiques et à la fin progressive des distorsions liées à la pandémie. De ce côté-ci, pas de surprise. L’analyse de la catégorie des services est en revanche plus intéressante. Au sein de celle-ci, il convient notamment de noter que la composante immobilière, tout particulièrement les loyers, contribue à expliquer les deux tiers de l’inflation. Notons également que la progression mensuelle de ces items a été plus forte en janvier qu’en décembre, ce qui n’était pas le scénario attendu. Si l’on extrait la partie immobilière de l’équation, en se focalisant sur les autres services, on constate malgré tout une réaccélération, notamment via les frais de santé et d’autres sous-catégories sensibles à la tenue du marché de l’emploi. Plus précisément encore, l’inflation des services cœurs hors immobilier est passée de 3,9 % sur un an en décembre à 4,3 % en janvier.

S’il est vrai que ce rapport n’est pas très encourageant, le CPI n’est toutefois pas l’indice de prix utilisé par la Fed pour atteindre son objectif de 2 % d’inflation, contrairement à l’indice PCE (Personal Consumption Expenditures).

Ces deux mesures se différencient par les poids accordés à chacune des catégories, notamment à l’immobilier, moins prégnante au sein du PCE, mais aussi par le biais des méthodologies de calculs retenues. Comme nous l’écrivions il y a plusieurs semaines, la différence entre ces deux indicateurs s’est accentuée, le PCE affichant toujours un profil de désinflation plus favorable. La semaine dernière coïncidait aussi avec la parution de l’indice PPI des prix à la production pour le mois de janvier. Les catégories des frais financiers et médicaux, sont notamment ressorties au-delà des attentes. Comme le PPI est utile pour prévoir les variations du PCE (qui sera publié en fin de mois), il se pourrait que lui aussi puisse montrer des signes de réaccélération, mais pas pour les mêmes raisons que le CPI. Reste maintenant à savoir s’il s’agit d’un mois exceptionnel ou de l’enclenchement d’une nouvelle tendance.

Les réactions à ces statistiques ont été immédiates. Certains membres de la Fed ont tenu à souligner la difficulté de s’assurer d’être en mesure de pouvoir baisser les taux avant l’été, tandis que les marchés ont immédiatement abaissé les probabilités associées à des baisses en mai ou en juin. Elles sont ainsi respectivement passées avant et après publication de ~50 % et 80 % à ~27 % et ~60 %. Elles ont encore un peu plus fluctué à la baisse après les chiffres du PPI. Les rendements souverains américains se sont par ailleurs tendus, en atteignant pour le taux à 10 ans 4,28 % le 16/02 contre 4,18 % le 12/02.

À ce stade, il est encore trop tôt pour affirmer si ces chiffres sont susceptibles de modifier les plans de la Fed, qui a semblé ces derniers temps vouloir accompagner la baisse de l’inflation par la baisse des taux directeurs, dans l’optique de réduire le degré de restriction de la politique monétaire ajustée de l’inflation.

Une baisse des taux directeurs en mars paraît être une idée à oublier définitivement, tandis que notre scénario central tablant sur un desserrement monétaire dès le mois de mai est chahuté, mais pas totalement mis de côté…

Contenu rédigé par Florent Wabont, économiste chez Ecofi.