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Entreprise à mission : l’arme absolue ?

Un peu plus d’un an après la mise en œuvre de l’ensemble des mesures de la loi Pacte votée en mai 2019, un premier rapport d’évaluation a été effectué en septembre 2020 par France Stratégie.

La loi Pacte a permis, d’une part, de consacrer dans le code civil la notion jurisprudentielle d’intérêt social et la prise en considération par les sociétés des enjeux sociaux et environnementaux inhérents à leur activité. D’autre part, elle donne la possibilité aux sociétés d’inscrire une raison d’être dans leurs statuts ; cette raison d’être est constituée des principes dont la société se dote et pour le respect desquels elle entend affecter des moyens dans la réalisation de son activité. Enfin, elle crée la qualité de société à mission : sur la base d’un engagement volontaire, toute société constituée en société à mission inscrit une raison d’être dans ses statuts, et charge un organe de suivi de vérifier l’atteinte de ses objectifs et l’adéquation des moyens engagés.

Le rapport dénombre une soixantaine d’entreprises avec une raison d’être inscrite dans les statuts et une vingtaine de sociétés à mission ont été identifiées, dans des secteurs très variés : agro-alimentaire (Danone), assurance (MAIF), cosmétiques (Groupe Rocher), gestionnaire d’actifs (Ecofi), e-commerce (la Camif), textile (Faguo), etc.

S’il est encore trop tôt pour apprécier l’effet du statut de société à mission sur les performances financières et extra-financières, et sur l’évolution de leurs indicateurs, une revue de littérature permet de se forger une première impression. Des études sur la responsabilité sociétale des entreprises (RSE) et des dis- positifs étrangers proches des sociétés à mission, comme les Benefit Corpora- tions aux États-Unis (« B Corp »), montrent un meilleur accès au capital, grâce à une différenciation plus forte et une image de marque améliorée auprès des investisseurs. De tels dispositifs tendent aussi à augmenter la performance des entreprises en permettant un meilleur recrutement et une main-d’œuvre plus qualifiée. De plus, l’engagement RSE des entreprises est le deuxième critère pris en compte dans les choix de carrière des jeunes candidats au niveau international. Enfin, ces dispositifs sont de nature à stimuler l’innovation, autour d’objectifs et de modalités de gouvernance renouvelés, le seul petit bémol consistant en un facteur de complexification à la fois organisationnelle, stratégique et juridique.

Dernier avantage souligné par Errol Cohen, avocat au cabinet Le Play dans une récente tribune : la constitution d’une arme anti-OPA. Dans la récente bataille Veolia / Suez, cette dernière a choisi de transférer sa filiale Suez Eau France dans une fondation néerlandaise qui la rend inaliénable pendant quatre ans. Selon l’avocat « Suez aurait pu adopter, pour elle-même ou pour sa filiale, la qualité de société à mission car, avec ce statut, la raison d’être de sa filiale ainsi que les intérêts de ses salariés auraient été protégés de façon pérenne quelle que soit l’issue de la bataille. Le choix de cette qualité aurait garanti la permanence de l’attachement de Suez à ses salariés bien mieux qu’un mon- tage contraire aux bonnes règles de la gouvernance, décidé en pleine OPA. Le statut de société à mission aurait imposé à tout acquéreur, et donc à Veolia, le respect de la mission. »

La société à mission offre donc également une solution alternative simple et efficace à tous ceux qui pensent que le capital peut aussi s’engager dans la défense d’une entreprise et de ses valeurs fondamentales. Elle permet, certes, de se protéger d’une OPA hostile, mais pour des engagements déjà solide- ment inscrits vis-à-vis de toutes les parties prenantes de l’entreprise.

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François LETT, Directeur du département éthique et solidaire