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Chine : une reprise ambivalente…

Il y a encore quelques mois, l’annonce du déconfinement en Chine concentrait espoirs et craintes. La résistance de l’économie européenne grâce aux exportations et au tourisme, mais aussi l’inquiétude d’un regain d’inflation non désiré.

Depuis, le vent a quelque peu tourné, les données d’activité ont déçu et le consensus est désormais moins optimiste.

Que peut-on anticiper pour cette seconde partie d’année ?

Au 1er trimestre 2023, le PIB réel de la Chine a crû de 2,2 %, soit une progression en glissement annuel (du T1 2022 au T1 2023) de 4,5 %. Si le consensus avait bien prévu un rebond de l’économie chinoise, il en a en revanche sous-estimé l’ampleur. La consommation des ménages a en effet surpris par sa vigueur, tandis que la production industrielle, l’activité manufacturière... n’ont pas été aussi fortes. Pour un pays résolument tourné vers l’extérieur, une telle contribution des facteurs domestiques interpelle, et illustre toute l’ambivalence de cette reprise.

En outre, l’activité immobilière – moteur de la croissance lors de la décennie passée – continue de souffrir des déconvenues subies ces trois dernières années. Le chômage des 16-24 ans a quant à lui fortement augmenté – pour atteindre 20,4 % en avril – soit le plus haut niveau jamais constaté, signe que la reprise n’est pas tout à fait homogène. Les jeunes diplômés éprouvent de plus en plus de difficultés à s’insérer dans la vie active alors que, paradoxalement, le vieillissement de la population devient un sujet d’inquiétude. D’autre part, les « surprises économiques » – qui confrontent la publication des statistiques aux attentes du consensus – sont orientées à la baisse depuis mi-avril, soulignant la déception grandissante des économistes et des investisseurs.

Tout n’est pas si sombre pour autant. Les enquêtes de conjoncture envoient des signaux contrastés s’agissant du secteur manufacturier, mais ce n’est pas le cas des services, qui se situent toujours largement en territoire d’expansion de l’activité. Contrairement aux grands pays développés, l’inflation en Chine est faible, puisqu’elle s’établit à 0,2 % sur un an en mai pour la « totale », et à 0,6 % pour celle dite « cœur » (hors énergie et alimentation). Des marges de manœuvre en termes d’accommodation monétaire et budgétaire sont donc disponibles.

C’est d’ailleurs ce sur quoi les autorités s’attellent depuis quelques semaines. Dans les faits, l’impulsion fiscale et monétaire demeure encore timide, mais de récentes mesures plaident pour un relâchement des vannes sur le secteur immobilier, automobile ainsi que pour des incitations afin que les banques prêtent ou investissent davantage.

S’il est probable que le 2nd trimestre profite encore des vents porteurs des trois premiers mois de l’année, le ralentissement mondial à l’œuvre, l’évanescence du choc de demande post-déconfinement, les problèmes structurels et la relative lenteur des autorités à réagir pourraient aboutir à un tassement lors du 2nd semestre. Au total, le gouvernement chinois atteindrait sa cible des 5 % de croissance, mais plus que le niveau absolu, c’est la composition de cette croissance qui importera.

Du côté des marchés financiers, les actions chinoises pâtissent de la situation en affichant des performances négatives en 2023, tant en monnaie locale, qu’en euro ou en dollar. Les niveaux de valorisation (ratio cours/ bénéfices…) suggèrent que la zone géographique est « attractive » aussi bien en absolu d’un point de vue historique qu’en relatif par rapport aux autres pays. En dépit de ces éléments, les investisseurs questionnent toujours le caractère « investissable » de cette partie du monde, d’autant que les tensions géopolitiques et même commerciales avec les États-Unis sont encore prégnantes.

Les actions européennes sont désormais beaucoup plus réactives et vulnérables aux chiffres en provenance de Chine. La vision consensuelle d’une reprise chinoise venant au secours du vieux continent s’étiole, d’autant que la situation domestique s’est détériorée, la zone Euro étant officiellement entrée en récession la semaine passée. La crainte d’une inflation importée a quant à elle reflué.

La dynamique de la croissance en Chine fait débat, et le consensus est dorénavant plus partagé sur la question. Les implications ne sont pas neutres, aussi bien en matière d’hypothèses sur le couple croissance/inflation mondial que sur le comportement des marchés…

Contenu rédigé par Florent Wabon, économiste chez Ecofi