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Le glyphosate, doublement destructeur !

La question des impacts du glyphosate sur la santé est au cœur de nombreux débats et d’études contradictoires.

Force est de constater que le glyphosate est diaboliquement efficace : cette molécule est utilisée dans des herbicides dont notamment le célèbre Roundup de Monsanto, entreprise absorbée l’an dernier par Bayer. Fonctionnant par pulvérisation, le glyphosate tue l’ensemble des plantes, qui l’absorbent jusqu’aux racines. Devenue inactive une fois au sol, la molécule permet de semer ou de replanter rapidement. Son utilisation, très répandue, est due à deux raisons principales : son prix peu élevé et son utilisation facile une seule fois par an. Obtenir des résultats comparables nécessiterait pour l’essentiel d’utiliser davantage de produits, de temps et de main d’œuvre. La SNCF, par exemple, premier consommateur de Roundup en France, en asperge ses voies et leurs abords non pour des objectifs esthétiques mais pour assurer la sécurité des voyageurs. La SNCF estime que l’interdiction du glyphosate ferait passer son budget désherbage de 30 à 500 millions d’euros…

Cependant, la question des impacts du glyphosate sur la santé est au cœur de nombreux débats et d’études contradictoires. Des études scientifiques récentes concluent à l’existence d’un lien entre glyphosate et lymphome (forme rare du cancer du sang). Par exemple, en mars dernier, la revue « International Journal of Epidemiology » a publié une étude rassemblant les données sur plus de 315 000 agriculteurs suivis en moyenne pendant plus de dix ans. Cette étude attribue un sur-risque de 36% d’être atteint de lymphome avec l’utilisation du glyphosate. La force de cette étude est son caractère prospectif. En effet, la faiblesse majeure des études rétrospectives est que c’est une fois le diagnostic de la maladie posé que les patients doivent se remémorer leur utilisation passée de telle ou telle substance.

Quatre ans auparavant, en 2015, le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC), agence des Nations-Unies, avait créé un premier choc en classifiant le glyphosate comme « cancérogène probable ». Une décision qui avait initié une controverse internationale sur la dangerosité de l’herbicide. Elle s’opposait en effet aux conclusions de la plupart des agences réglementaires à travers le monde, dont l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) et l’Agence américaine de protection de l’environnement (EPA). Le 10 août 2018, un premier procès devant une juridiction de l’Etat de Californie avait vu la firme américaine condamnée à verser près de 289 millions de dollars à un jardinier de 46 ans, amende réduite à 79 millions de dollars dans un second jugement, rejeté en appel par Bayer. Par ailleurs, un jury fédéral américain a estimé le 19 mars dernier que l’herbicide Roundup avait été un « facteur substantiel » dans le déclenchement du cancer d’Edwin Hardeman. Ce septuagénaire attribue son lymphome à l’utilisation régulière pendant près de trente ans du Roundup. C’est le premier procès du genre devant la justice fédérale américaine.

Le travail des avocates de M. Hardeman a été compliqué par la décision du juge fédéral de scinder en deux phases le procès : au cours de la première phase, les avocats devaient s’en tenir à la science et avaient interdiction de citer dans leurs plaidoiries les éléments – comme les « Monsanto Papers », ces documents internes de la firme désormais dans le domaine public – suggérant selon eux une volonté de Monsanto de dissimuler la dangerosité de son produit phare. Selon les chiffres transmis par Bayer aux investisseurs, plus de 11 000 actions en justice sont en cours aux Etats-Unis, devant des juridictions d’Etat ou des tribunaux fédéraux. Bayer juge que ces publications récentes « ne fournissent pas de nouvelles données épidémiologiques » et « mélangent des données incompatibles » en comparant non pas « des pommes avec des pommes, mais des pommes avec des oranges ». L’étude, poursuit le groupe allemand, est « en porte-à-faux avec un vaste corpus scientifique, quarante ans d’expérience dans le monde réel et les conclusions des autorités réglementaires », lesquelles ont conclu que « les produits à base de glyphosate étaient sûrs lorsque utilisés selon les instructions, et que le glyphosate n’était pas cancérogène ». Le marché, semble être sur une autre longueur d’onde : le cours de l’action Bayer est passé en neuf mois de 100 € à 60 €, soit un coût global astronomique pour les actionnaires de 40 milliards d’euros à ce jour !

Parallèlement, Emmanuel Macron a déclaré lors d’un récent débat citoyen dans la Drôme à propos du glyphosate : « Je sais que certains voudraient qu'on interdise tout du jour au lendemain. Je vous dis : pas faisable et ça tuerait notre agriculture ».  Le produit « Roundup 360 » a quand même été retiré en France de la vente aux particuliers.

Chez Ecofi Investissements, Bayer en raison de ces controverses très graves, est exclu des portefeuilles ISR.