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Le coronavirus enrhume les marchés

Si tout le monde se demandait à quel moment les effets de la crise sanitaire née en Chine allaient se matérialiser dans les enquêtes, personne n’est allé jusqu’à imaginer un plongeon de l’indicateur avancé dans les services aux Etats-Unis

En effet, la chute de l’indice PMI du secteur des services a surpris par son ampleur (de 53,4 à 49,4 points en février) et par le message envoyé. Ainsi, en enregistrant sa première baisse en quatre ans, l’indice IHS Markit envoie une photographie instantanée de l’économie américaine qui détone avec le rebond des enquêtes des Fed régionales sur le secteur manufacturier.

Or, dans la mesure où les services représentent environ 85% du PIB aux Etats-Unis, la mauvaise orientation de cet indicateur capital est tout sauf une bonne nouvelle. On a même vu que les entreprises faisaient état d’un effondrement des nouvelles commandes (de 52,5 à 49,7 points), ressorties au plus bas depuis 2009. Si on ajoute à cela les avertissements sur les résultats émis par de nombreuses entreprises pour cause de coronavirus, on comprend le recul observé sur les places financières sur la semaine. Le Nasdaq (-1,8% à 9 448 points), le S&P 500 (-1,3% à 3 338 points) ou le Dow Jones (-1,4% à 28 992 points) ont ainsi été plombés par le profit warning d’Apple.

Cependant, compte tenu des niveaux de valorisation, les investisseurs semblent encore privilégier le scénario temporaire de l’impact de la crise sanitaire. Il faut espérer que cette anticipation soit juste car elle permettrait à plusieurs pays d’éviter une récession, à l’image du Japon qui a déjà un pied dedans. En effet, la publication des comptes nationaux au quatrième trimestre a montré, avant l’irruption du coronavirus, une fin d’année difficile. Le plongeon de l’activité japonaise (-6,3% en rythme annualisé) s’explique avant tout par une forte baisse de la consommation des ménages (-11,5% en chiffre annualisé sur le trimestre), plombée principalement par la hausse de la TVA (de 8% à 10% décidée en octobre) et par des typhons plus dévastateurs qu’à la normale.

La contraction aurait pu être encore plus lourde, n’eut été celle des importations (-10,1% en rythme annualisé), un point commun avec les Etats-Unis. Dans ce contexte de hausse de l’aversion pour le risque (3,40% sur la semaine pour le S&P VIX, à 17,1 points) et de craintes sur l’activité, les investisseurs ont préféré se repositionner sur les emprunts souverains. Les obligations américaines ont été recherchées en priorité (-12 points de base sur la semaine, à 1,47% pour le taux à 10 ans), ce qui explique une nette surperformance sur les taux allemands : -3 points de base, à -0,43% pour le taux à 10 ans.

Il faut dire qu’en dépit des déclarations des membres du directoire de la Fed qui jugent la politique monétaire actuelle appropriée pour un certain temps, nombreux sont les investisseurs qui voient l’institution monétaire abaisser ses benchmarks d’ici la fin de l’année. Sur la scène des changes, le dollar a poursuivi sur sa tendance haussière, notamment contre le yuan après les annonces de la Banque de Chine. L’euro a mis fin à sa dépréciation contre le billet vert, sans doute soutenu par les bonnes enquêtes des directeurs d’achat dans la zone Euro. Mais cette hausse des indicateurs sera difficilement reproductible dans les mois à venir après la prise en compte des effets du coronavirus. Cela pourrait peser sur la monnaie unique, d’autant qu’après le mauvais PIB de fin 2019, la Banque du Japon se montre disposée à prendre d’autres mesures accommodantes. Cela va mettre la pression sur la Banque centrale européenne.

Karamo KABA, Directeur des études économiques