Dans cet espace, la rédaction d’ID n’exerce pas de droit de regard sur les informations disponibles et ne saurait voir sa responsabilité engagée.
©Shutterstock/sdengroup
info partenaire

Divergence de perception entre le FMI et la BCE

Le Fonds monétaire international (FMI) a dressé un portrait très sombre de l’activité mondiale. Selon l’Institution, le rythme de progression du PIB mondial devrait s’écrouler de -5,9% cette année suivi d’une reprise de 5,4% en 2021. Parmi les régions qui vont subir de plein fouet les effets de la pandémie de Covid-19, on retrouve la zone Euro qui est en passe de vivre une sévère récession (-10,2% en 2020).

Cette vision apocalyptique du FMI sur la zone Euro tranche avec le ton plutôt rassurant de la Banque centrale européenne (BCE) pour qui le « pire est probablement passé. » Cela n’a toutefois pas suffi à contrebalancer la hausse grandissante de plusieurs facteurs de risque, à commencer par la multiplication des cas de Coronavirus aux Etats-Unis, en Amérique latine et en Europe. Dans la mesure où la propagation de la pandémie s’accélère dans un nombre croissant d’Etats américains, les investisseurs ont commencé à craindre un retour des mesures de confinement, à l’image de ce qui s’est passé en Floride et au Texas. Ce qui explique le changement d’humeur sur les places financières après un bon début de semaine.

Une fois n’est pas coutume, les indices américains ont sous-performé sur la semaine : -2,42% pour le S&P 500, à 3 009 points, contre -1,81% pour l’EuroStoxx 50, à 3 210 points. Cela peut s’expliquer par la décision de la Réserve fédérale (Fed) de limiter le montant des dividendes versés par les banques à leurs actionnaires afin de réussir les « stress tests », ce qui a plombé des poids lourds comme Goldman Sachs, JPMorgan Chase ou Morgan Stanley. Cela peut également s’expliquer par l’optimisme croissant quant à une issue positive sur les négociations concernant le plan de relance européen de 750 milliards d’euros avec l’approche de la réunion des dirigeants des 27 pays de l’UE les 17 et 18 juillet prochains à Bruxelles. Cependant, la BCE ne s’attend pas à un accord dès la mi-juillet mais plutôt à d’âpres négociations avec les pays « frugaux » (Pays-Bas, Autriche, Suède, Danemark), toujours opposés à la mise en place d’un plan qui donnera le primat aux pays du sud.

Ce constat n’a pas empêché la BCE d’être optimiste, sans doute rassurée après les bons chiffres des crédits bancaires au secteur privé (+5,3% en mai, après +4,9% en avril), dopés par les demandes de liquidités des entreprises (+7,3%) pour faire face à la crise économique. En dépit de cette dynamique des crédits, la situation devrait rester difficile pour l’emploi, surtout que des mesures de reconfinement, partiel pour le moment, font leur retour comme on l’a vu en Allemagne (Gütersloh et Warendorf), au Portugal dans la région de Lisbonne et à Leicester au Royaume-Uni. Au fur et à mesure que les craintes sur une résurgence de la maladie reviennent au premier plan, les investisseurs sont revenus sur les titres les plus sûrs. Les emprunts d’Etat, en particulier celui des Etats-Unis, ont été particulièrement recherchés. A 0,64%, le rendement du taux à 10 ans américain s’est déprécié de 6 points de base. La même tendance a été observée en Europe où les pays du sud ont mieux performé, aidés par l’espoir d’un plan de relance européen.

L’euro, en hausse de 0,37% contre le dollar, a profité des propos optimistes de la BCE mais aussi de la publication d’indicateurs décevants aux Etats-Unis. On a ainsi vu que le revenu personnel s’était contracté (-4,2% en mai) et que les entreprises continuaient de licencier pour la treizième semaine consécutive (+1,4 million de nouveaux inscrits au chômage). D’ailleurs, les investisseurs auront un œil particulièrement attentif sur le rapport d’emploi qui sera publié ce jeudi 3 juillet. Une nouvelle hausse de l’emploi est attendue par le consensus.

Karamo Kaba, Directeur des études économiques