A force de se focaliser sur le Brexit, nous en venons presque à oublier le ralentissement de l’activité économique en cours. La publication des indicateurs des directeurs d’achats PMI dans l’industrie, très en deçà des attentes, a donc sonné comme une piqure de rappel sur les marchés financiers. Ainsi, après les avoir longtemps relégués au second plan avec le ton ultra-accommodant des banquiers centraux et l’espoir d’un accord commercial sino-américain, l’inquiétude des investisseurs s’est à nouveau ravivée. D’où de forts dégagements sur les indices boursiers (-1,3% pour l’indice Dow Jones à 25 502 points ; -2,4% pour l’EuroStoxx 50, à 3 306 points). Si le cas de plusieurs pays comme l’Allemagne suscite de l’inquiétude, celui de l’Italie peut à nouveau donner des sueurs froides aux investisseurs. En effet, avec une économie en récession, l’évolution récente des indicateurs avancés ne laisse que peu de chances à un rebond de l’activité. Or, Rome table sur une croissance de 1% en 2019, très loin des attentes de la Commission européenne et du consensus qui n’en attendent respectivement que 0,2% et 0,1%.
La perspective d’un nouveau bras de fer entre la Commission et l’Italie sur son déficit budgétaire n’a pas eu une grande incidence sur les taux italiens (-5 points de base, à 2,446% pour le 10 ans), entraînés à la baisse par le bond de l’aversion pour le risque (+3,60 points de pourcentage, à 16,48% pour l’indice VIX) mais aussi par le ton très prudent adopté par la Réserve fédérale (Fed). Celle-ci, outre le fait d’avoir abaissé sa prévision de croissance pour 2019 (de 2,3% à 2,1%), a affirmé qu’elle mettra fin à la baisse de son bilan en septembre 2019. En attendant cette date, dès le mois de mai, le seuil de réinvestissement des Treasuries arrivant à échéance sera abaissé à 15 milliards par mois, contre 30 milliards de dollars actuellement. Quant aux titres hypothécaires (MBS) venant à échéance à partir d’octobre, les remboursements de capital seront réinvestis en bons du Trésor jusqu’à 20 milliards de dollars par mois. Au-delà, l’excédent sera réinvesti en MBS.
Le ton dovish* de la Fed a surpris les investisseurs à tel point qu’un nombre croissant d’entre eux commence à croire à l’hypothèse d’une baisse des taux d’intérêt, surtout après que l’écart de rendement entre les taux à 10 ans et à 3 mois soit devenu négatif, une première depuis 2007. Dans ces conditions, la multiplication des signaux de récession pourrait conduire la Banque centrale européenne à adopter elle aussi des mesures de stimulations supplémentaires.
L’euro a été délaissé dans ces conditions (-0,21% sur la semaine, à 1,1302 dollar), pénalisé par le regain de volatilité et la publication d’indicateurs avancés peu engageants. La livre sterling, quant à elle, a connu une nouvelle semaine de faiblesse (-0,61%, à 1,3209 dollar). Il faut dire que le brouillard entourant le Brexit ne s’est pas dissipé même si l’Union européenne a semblé vouloir sortir de cette tragédie sans fin en proposant deux options aux Britanniques. La première doit voir les Députés britanniques approuver l’accord négocié par Theresa May, déjà rejeté massivement à deux reprises. En cas d’approbation, le Royaume-Uni sortirait de l’UE le 22 mai. Dans le cas contraire, les Députés anglais auront jusqu’au 12 avril pour se décider sur une participation aux élections européennes, condition nécessaire pour un nouveau report dont la durée n’a pas été fixée.
*Dovish : prudent