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En bref

"Industrie verte": le chimiste américain Chemours investit dans l'hydrogène en France

Le chimiste américain Chemours, issu d'une scission du groupe DuPont en 2015, a choisi la France pour investir 200 millions de dollars dans une usine fabriquant des éléments indispensables à la production d'hydrogène décarboné, un pas vers "l'industrie verte" que le gouvernement appelle de ses vœux.

La nouvelle usine, extension du site que le groupe exploite sur la plate-forme chimique de Villers-Saint-Paul près de Creil (Oise), permettra de produire d'ici 2025 les membranes très fines servant à séparer les molécules d'hydrogène et d'oxygène lors de l'électrolyse de l'eau — qui permet la production d'hydrogène —, ainsi que la matière qui sert à les fabriquer.

Pour cela, Chemours va construire deux bâtiments sur le site de 40 hectares qui existe depuis 1917, repris au début des années 2000 par DuPont. Actuellement, avec 60 salariés, Chemours, l'inventeur du teflon, produit sur ce site des molécules hydrofuges pour le textile, les casseroles ou les mousses anti-incendie des pompiers.

Pour encourager les implantations industrielles, dans les Hauts de France, nous savons faire rapidement (...) L'hydrogène est un atout pour le développement de la région.

Le groupe table sur l'emploi de 80 salariés dans cette nouvelle usine qui sera capable d'éliminer "en boucle fermée" l'ensemble de ses émissions chimiques toxiques dans l'eau ou l'air, assure-t-il. Également implanté aux Pays-Bas et en Belgique, l'Américain "a choisi d'investir" en France après les rencontres "Choose France" organisées par l’Élysée en juillet et destinées à attirer des investissements étrangers. "Nous avons senti un véritable alignement entre ce que nous voulons faire et ce que le gouvernement français veut faire" pour développer l'économie de l'hydrogène, remarque Denise Dignam, présidente de la division matériaux haute performance du chimiste.

"C'est l'un des investissements les plus importants de Chemours depuis sa création", ajoute son PDG Mark Newman. L'investissement comprendra une aide d’État, issue du plan France 2030 et de l'Ademe. Son montant, dont une partie vient de la région, est encore en discussion. "Il s'agira de millions d'euros sur un investissement global qui se compte en centaines de millions", a indiqué jeudi le ministre de l'Industrie Roland Lescure à l'AFP.

La décision d'implantation a été prise "en six mois": "Pour encourager les implantations industrielles, dans les Hauts de France, nous savons faire rapidement (...) L'hydrogène est un atout pour le développement de la région", ajoute son président Xavier Bertrand.

Compétition accrue

"Chaque fois qu'une usine se construit en France, la colère recule", a déclaré M. Lescure. Côté salariés, Rudy Corroyr, 32 ans, pupitreur du poste de contrôle de l'usine, rencontré lors de la visite des dirigeants du groupe jeudi, se félicite aussi: "L'investissement annoncé est une garantie de pérennité du site, on peut mieux se projeter sur l'avenir, car la plate-forme actuelle est un peu désolée", dit-il.

De fait, la désindustrialisation a fait son œuvre sur ce site qui emploie moins de 500 salariés aujourd'hui dans trois entreprises, contre 2.700 dans les années 70. Pour le ministre, cet investissement est un signal pour la politique industrielle de la France, dans une période de flambée des prix de l'énergie et de compétition accrue, notamment avec l'Inflation Réduction Act (IRA) américain, loi qui favorise fiscalement l'implantation sur le sol américain d'industries vertes.

"C'est un moment de fierté pour la France, l'IRA a été un signal d'alarme", souligne Jorgo Chatzimarkakis, PDG de Hydrogen Europe, l'association regroupant les entreprises européennes liées à l'hydrogène."Nous avons ouvert la filière des régions il y a un an et 80% de toutes nos régions adhérentes sont françaises! C'est le seul pays comme cela en Europe", souligne-t-il.

Bercy travaille sur un projet de loi "industrie verte" pour faciliter et accompagner les installations d'usines liées à la transition énergétique, qui devrait être examiné cet été au Parlement, a rappelé M. Lescure. L'hydrogène est crucial pour décarboner les transports et l'industrie lourde comme la chimie ou la sidérurgie et ainsi continuer à produire de l'acier sans charbon pour éliminer les émissions de CO2.

Actuellement, plus de 98% de l'hydrogène produit dans le monde provient du reformage de méthane, une technologie fortement émettrice de CO2. L'Europe et particulièrement la France sont en pointe dans le secteur de l'hydrogène vert produit par électrolyse de l'eau à partir d'électricité renouvelable ou nucléaire, selon une étude de l'Office européen des brevets et de l'Agence internationale de l’Énergie publiée mardi.

Avec AFP.

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