©timages/Shutterstock
Epargnants

Idée reçue : les investissements responsables sont-ils moins performants ?

Aujourd'hui, une majorité d'épargnants français souhaite donner du sens à leur argent en investissant de manière plus responsable. Pourtant, une idée persistante freine encore bon nombre d'entre eux : les placements durables seraient moins performants que les placements traditionnels. Mais cette crainte est-elle justifiée ?

Les années passent, mais certaines croyances restent bien ancrées. Malgré l'intégration croissante des critères extra-financiers dits "ESG" (environnementaux, sociaux et de gouvernance) dans les décisions d'investissement, l'idée que les fonds "durables" ou "responsables" performent moins bien que leurs équivalents classiques reste encore relativement répandue.

Cette perception négative peut être alimentée par plusieurs facteurs. Certains investisseurs craignent par exemple que la réduction de l'univers d'investissement, en excluant certains secteurs comme celui des énergies fossiles par exemple, puisse limiter les opportunités de rendement, notamment dans des secteurs encore essentiels à l'économie mondiale.

D'autres estiment que la recherche d'un impact extra-financier, comme un meilleur bilan social ou environnemental, se ferait nécessairement au détriment de la performance financière. Pour certains, cette idée peut aussi découler d'une méconnaissance de l'investissement responsable, parfois assimilé à la finance solidaire ou à l'investissement à impact.

La vue d'ensemble : aucune différence significative

Pourtant, de nombreuses études montrent que l'intégration des critères ESG dans les décisions d'investissement ne pénalise pas systématiquement la rentabilité des fonds, et peut même être une source de surperformance. Par exemple, une méta-analyse de plus de 2 000 études académiques, publiée dans le Journal of Sustainable Finance & Investment en 2015, révélait qu'environ 90 % des études passées en revue ne trouvaient aucun lien négatif entre les critères ESG et la performance financière. Au contraire, la majorité concluaient à des résultats positifs.

En 2021, une autre méta-étude réalisée par la NYU Stern School of Business et ayant passé en revue 1 141 articles scientifiques et 27 méta-analyses parus entre 2015 et 2020, a conclu que la performance financière des investissements ESG était globalement similaire à celle des investissements traditionnels, avec environ un tiers des études du panel indiquant une surperformance.

Les atouts de l'ESG : gestion des risques et opportunités de croissance

L’un des arguments centraux avancés par les promoteurs de l’ESG réside dans leur capacité à offrir une gestion des risques plus fine et une vision enrichie des entreprises et de leur modèle d’affaires. En analysant la gouvernance d'une entreprise, sa politique environnementale ou encore sa gestion des ressources humaines, il serait possible de mieux anticiper des risques liés notamment à l’application de nouvelles régulations ou de controverses juridiques.

Au-delà de la gestion des risques, l'investissement responsable peut aussi permettre d'identifier des opportunités de croissance à long terme. Les entreprises positionnées sur des secteurs d'avenir, comme les énergies renouvelables ou les technologies propres, bénéficient d'une demande croissante, soutenue par la transition énergétique et les nouvelles régulations.

Des stratégies diverses, des performances variables

Il serait toutefois simpliste d'affirmer que tous les fonds "ESG" performent systématiquement mieux que les fonds traditionnels. En réalité, tout comme pour ces derniers, l'investissement responsable recouvre un large éventail d'approches et de stratégies. Certains fonds ESG n'excluent que quelques secteurs spécifiques, tandis que d'autres se concentrent sur des thématiques plus ciblées, telles que l'eau ou la transition énergétique. Cette diversité rend difficile toute conclusion générale sur la performance de ces produits. 

En règle générale, l'une des principales raisons des différences de performance entre les fonds ESG et leurs équivalents traditionnels réside dans des biais sectoriels spécifiques. Par exemple, après le début de la guerre en Ukraine, la sous-exposition de nombreux fonds ESG aux secteurs de l'armement et des énergies fossiles, qui ont fortement profité du contexte, a pu contribuer à leur sous-performance. À l'inverse, durant la crise du Covid, les fonds ESG ont généralement surperformé, en partie grâce à leur exposition aux secteurs technologiques et de la santé, qui ont bénéficié d'une forte demande.

L’importance du gérant

Il est donc tout à fait possible de trouver des fonds ESG affichant des performances comparables, voire supérieures à celles des fonds traditionnels. Cependant, le succès de ces investissements repose sur un ensemble de facteurs, parmi lesquels la qualité de la gestion. La capacité des gérants à identifier les bonnes opportunités et à bien intégrer les critères ESG joue un rôle essentiel. Comme le soulignent certains experts, l'ISR (Investissement Socialement Responsable) est un outil précieux pour évaluer les modèles économiques et anticiper les nouveaux risques, mais il ne garantit pas, à lui seul, une surperformance.

Avant toute décision de placement, il reste donc primordial d'être bien informé et/ou accompagné pour comprendre les caractéristiques des produits proposés (stratégie, historique de performances...) et les risques qui y sont associés.