Planter des arbres en ville : bonne ou mauvaise idée ? C’est du moins ce que prévoit le "Plan nature en ville", qui concrétise l'engagement national de "restaurer et valoriser la nature en ville" - plan adopté en 2010, à l’issue du Grenelle de l'environnement. Mais cette dynamique de végétalisation fait débat. Le fait de planter des arbres a-t-il un véritable effet contre la chaleur dans les zones urbanisées ? Est-ce une solution pour purifier l’air en ville ? Est-ce bénéfique pour les sols et les cours d’eau ?
Végétaliser pour rafraîchir les villes
Dans la capitale, la mairie prévoit la création de 30 hectares d'espaces verts supplémentaires et la plantation de 20 000 nouveaux arbres d'ici 2020. Le projet, défendu par Anne Hidalgo en juillet lors du Conseil de Paris, s’inscrit dans ce qu’elle nomme une "stratégie de rafraîchissement urbain". "Forêts urbaines" et autres "oasis de fraîcheur" sont des projets envisagés par la maire, motivée par "le vert pour créer du froid". Le rapport de l’ADEME concernant la nature en ville ne contredit pas cet aspect : les experts notent que les végétaux permettent, effectivement, de réduire la chaleur en créant de l’ombrage, mais aussi via les phénomènes d’absorption et de réflexion des rayons solaires. Cependant, l'étude stipule que d'autres aménagements sont à prévoir.
Il est aussi nécessaire de prendre en considération, pour avoir des résultats optimaux, que la présence de l’eau joue un rôle primordial. Il faut permettre au sol de la récolter et la stocker, ce qui déclenchera notamment le phénomène d’évapotranspiration du sol et des végétaux, permettant d'humidifier l’air. Planter des arbres, oui, mais en les choisissant correctement.
Un "îlot de chaleur urbain", c’est la différence de température de l’air entre une zone urbaine et les zones rurales voisines. Cette différence de température est causée par :
- l'architecture : dimension, espacement des bâtiments (les rues canyons, étroites et bordées de hauts immeubles, favorisent le piégeage du rayonnement solaire et du rayonnement infrarouge par réflexion entre les immeubles, limitant l’évacuation de la chaleur par les vents),
- l’imperméabilisation des sols (voiries et bâtiments notamment), qui implique des matériaux (goudrons, béton, etc.) reflétant et absorbant les rayons du soleil et stockant la chaleur différemment d’un milieu naturel et qui diminue le stockage d’eau dans les sols et la présence de végétation, limitant donc les possibilités d’évapotranspiration,
- la concentration de l’activité humaine, source d’émission de chaleur.
Plus de végétaux pour une meilleure qualité de l’air
On pense souvent, à juste titre, que les végétaux permettent de purifier l’air : la photosynthèse permet l’absorption du CO2 et la production de dioxygène (O2) que l’on respire. Cependant, il faut prendre en considération que les végétaux peuvent être source d’allergène. En ville particulièrement, ils produisent des pollens qui s’accumulent à cause du manque de circulation du vent. De plus, certains végétaux peuvent produire des polluants comme le monoxyde de carbone (CO), l’oxyde d’azote (NO) ou encore des composés organiques volatiles (COV). Accumulés et combinés avec le rayonnement solaire, la réaction chimique de ces polluants est à l’origine de la production d’ozone (O3), un gaz nocif responsable, entre autres, des pics de pollutions.
Il faut donc, ici aussi, choisir les bonnes essences à planter : un arbre mature peut, par exemple, capturer jusqu’à 20 kg de particules par an.
Il est tout de même nécessaire de souligner que si l’arbre est entouré d’asphalte, le circuit permettant le retour des polluants aux sols ne peut être complètement effectif. Il faut, alors, leur permettre d’absorber les eaux de pluie et de dégrader leurs feuilles pour agir comme un filtre qui piège les particules.
Filtres naturels pour décontaminer les sols et cours d’eau
Les villes concentrent les activités polluantes. Les hydrocarbures, les solvants et autres produits chimiques utilisés quotidiennement finissent par se retrouver dans les sols et cours d’eau qui traversent les villes, tandis que les routes et trottoirs hermétiques ne permettent pas l’absorption des ruissellements. Et si absorption il y a, les précipitations sont à tel point saturées de polluants qu’elles contaminent les sols et l’eau des fleuves ou rivières.
S’il y a conséquence sur l’environnement, il y a conséquence sur l’être humain. La végétalisation est, de ce point de vue, une solution qui peut être envisagée pour permettre un mécanisme filtrant qui capture les polluants, ce qu’on appelle : la bioremédiation.
Dans son rapport "Nature en ville", l'ADEME explique que ce terme désigne l’ensemble des techniques biologiques visant à "immobiliser, extraire ou dégrader les contaminants des sols et mettant en jeu des plantes et/ou des micro-organismes". Planter des arbres en ville permet donc, premièrement la phytoremédiation (phytotechnologie) - qui rend possible l’extraction et le transfert dans les parties récoltables des plantes (fruits) -, l’extraction par transpiration, la contention et la dégradation des polluants. Le second aspect est la biodégradation : des micro-organismes du sol dégradent totalement ou partiellement les polluants organiques qu'il contient. Et enfin, la bioimmobilisation consiste à stimuler l’activité des bactéries naturellement présentes dans le sol.
Certaines de ces techniques nécessitent tout de même de lourdes installations, inenvisageables en milieux urbains, tandis qu'il est indispensable de prendre en compte le choix du végétal. Bien qu'il faille rester vigilant quant à la manière pratiquée, la végétalisation des zones urbaines fait ses preuves, permettant des mécanismes naturels de préservation de l'environnement.
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