L'initiative du député écologiste Nicolas Thierry semble recueillir un accueil consensuel à la chambre haute, où l'alliance majoritaire de droite et du centre a déjà donné son approbation à la quasi-totalité des mesures en commission du développement durable la semaine passée.
Poêles en Téflon, emballages alimentaires, textiles, automobiles... De nombreux objets du quotidien contiennent ces substances per- et polyfluoroalkylés appelées Pfas, qui doivent leur surnom à leur cycle de vie très long et, pour certaines, à leur effet néfaste sur la santé.
"Le Sénat s'inscrit dans une volonté d'avancer de manière transpartisane et cela donne un signal clair à tout le secteur industriel : la sortie des Pfas est lancée", veut croire le sénateur écologiste Jacques Fernique, qui a confiance en la Haute assemblée pour "ne pas dénaturer" le texte voté très largement par les députés au début du mois d'avril.
Ces derniers avaient donné du fil à retordre au gouvernement sur l'article-phare de la proposition de loi, qui prévoit d'interdire à partir du 1er janvier 2026 la fabrication, l'importation et la vente de tout produit cosmétique, produit de fart (pour les skis) ou produit textile d'habillement contenant des Pfas, à l'exception des vêtements de protection pour les professionnels de la sécurité et de la sécurité civile.
Également adoptée contre l'avis du gouvernement, une taxe visant les industriels dont les activités entraînent des rejets de Pfas, sur le principe du "pollueur-payeur".
Poêles étiquetées
Ces deux mesures-clé ont été adoptées par le Sénat en commission, malgré quelques ajustements à la marge, comme l'exclusion du champ d'interdiction des produits contenant des "traces résiduelles" de Pfas, dont le niveau maximal sera défini par décret.
En revanche, l'interdiction des ustensiles de cuisine, retirée du texte par les députés, n'a pas été réintroduite à ce stade, même si plusieurs amendements en ce sens seront défendus dans l'hémicycle, avec peu de chances d'aboutir.
Un compromis semble tout de même se dessiner pour obliger les industriels à mentionner la présence de Pfas sur l'étiquette des ustensiles de cuisine qui en contiennent.
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"Il est impossible, aujourd'hui, de balayer d'un revers de main une loi sur les Pfas", explique à l'AFP le rapporteur centriste de ce texte de loi, Bernard Pillefer. Celui-ci espère avoir "rassuré" les plus hésitants à droite et plaide pour que ce sujet soit prioritairement traité "à l'échelle de l'Europe".
Dans une chambre haute qui penche à droite, quelques doutes persistent néanmoins dans les rangs des Républicains. "On inflige d'un seul coup des normes insoutenables à nos entreprises", s'inquiète le sénateur Rémy Pointereau, qui craint "de nombreuses fermetures d'usines".
Le groupe LR devrait néanmoins soutenir majoritairement cette évolution législative, laissant envisager la possibilité d'une adoption définitive à l'Assemblée nationale en deuxième lecture par la suite.
Contrôles et transparence
Ces dernières semaines, outre la mobilisation parlementaire, plusieurs exemples locaux ont replacé le sujet sur le devant de la scène dans des zones particulièrement touchées, comme à Oullins (Rhône), où 600 personnes ont défilé dimanche pour alerter sur les rejets des industriels de la vallée de la chimie au sud de Lyon.
Le groupe d'électroménager SEB a également dû défendre sa stratégie en la matière, lors d'une assemblée générale très suivie ces derniers jours. L'entreprise avait en effet sonné la mobilisation générale pour s'opposer au texte de loi lors de son examen à l'Assemblée.
Les débats au Sénat permettront également de compléter le volet relatif à la transparence des contrôles des Pfas dans les eaux destinées à la consommation humaine. La gauche souhaite notamment y intégrer les eaux en bouteille, à la suite de révélations sur le recours par des industriels à des pratiques prohibées de désinfection.
"Il faut aller vers plus de transparence pour assurer la crédibilité du secteur et la confiance des citoyens", a affirmé le socialiste Hervé Gillé, satisfait d'un texte "certes édulcoré", mais qui constitue "une première brique contre la diffusion des PFAS".
Avec AFP.