Le gouvernement a annoncé la mise en "pause" du plan Ecophyto.
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Environnement

"Pause" du plan Ecophyto : la consternation domine parmi les ONG environnementales

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Après l'annonce du gouvernement d'une mise en "pause" du plan de réduction de l'usage des pesticides, que réclamait une partie du monde agricole en colère, les ONG environnementales se disent consternées. Pour elles, c'est un "recul majeur".

Si le gouvernement a satisfait les syndicats agricoles majoritaires, il va devoir composer maintenant avec la fronde des associations, parties prenantes obligatoires des consultations pour établir la stratégie française.

La 4e mouture du plan, appelée "Ecophyto 2030", était en fin de consultation. Elle devait tracer la voie vers une réduction de moitié de l'utilisation des pesticides d'ici 2030 (par rapport à 2015-2017) et accélérer la recherche d'alternatives, urgentes face aux impacts relevés sur la santé des agriculteurs, la mortalité des abeilles, la pollution des eaux, etc.

Mais le Premier ministre Gabriel Attal a annoncé la "pause" d'Ecophyto "le temps de mettre en place un nouvel indicateur" pour substituer l'actuel, le "Nodu", qui mesure l'usage des molécules par les exploitants et que contestent des organisations agricoles.

"Nous rejetterons toute participation à une nouvelle dynamique Ecophyto dont l'indicateur serait biaisé", a immédiatement répondu Générations Futures.

Une mesure en contradiction avec les stratégies de décarbonation

"Le Nodu nous a permis de voir que la France n'a pas rempli ses objectifs depuis près de 15 ans : 15 ans d'échec pour mettre en pause, ça pose question", s'étonne aussi Thomas Uthayakumar, de la Fondation pour la Nature et l'Homme, auprès de l'AFP.

"Ce que nous propose aujourd'hui Gabriel Attal vient totalement en contradiction avec les stratégies nationales" de décarbonation (SNBC), d'alimentation (SNANC) ou de planification agricole (PLOA), regrette-t-il.

Ce responsable salue toutefois la détermination du gouvernement à s'opposer à l'accord de libre-échange UE-Mercosur (Brésil, Argentine, Uruguay, Paraguay), à obtenir la réciprocité des normes et à faire appliquer la loi Egalim, pour protéger la rémunération des agriculteurs.

"Une erreur politique majeure"

"Aujourd'hui la FNSEA a gagné, mais ça ne va rien amener au revenu agricole, pas un centime" et "ça permettra de continuer à faire l'agriculture du siècle précédent en gardant toujours plus de produits dangereux sur le marché et en retardant leur retrait de manière cynique", a ajouté pour l'AFP le porte-parole de Générations Futures, François Veillerette.

"Il s'agit d'une erreur politique majeure car si la question du revenu agricole est une vraie question pour un certain nombre d'agriculteurs, ce n'est pas en sacrifiant l'environnement et les ressources naturelles qu'on règlera ce problème, bien au contraire", a-t-il continué.

"La consultation et la pause consistent simplement à prendre le temps de travailler (...) sur des questions d'indicateurs, sur des questions de zonage, qu'on puisse effectivement avancer sur un plan qui soit plus conforme et plus équilibré", relativise le cabinet du ministre de l'Agriculture.

"Décision de justice"

Cette "pause" est annoncée alors que l'Etat a jusqu'au 30 juin 2024 pour mieux respecter ses trajectoires de baisse de l'utilisation des pesticides et protéger les eaux, sur ordre de la justice administrative.

"Cette annonce est donc aussi un refus de se plier à une décision de justice", a fustigé auprès de l'AFP l'ONG Pollinis, une des cinq associations à l'origine de cette procédure judiciaire, "Justice pour le Vivant".

Ces 30 dernières années, les populations d'oiseaux des champs ont chuté de 30 % en France, selon des études selon lesquelles l'intensification de l'agriculture est la principale cause de ce déclin.

Cette pause "est une décision purement politique" à "l'encontre de la science et du droit et qui ne va pas résoudre les problèmes des agriculteurs", a estimé Pollinis.

Pour le WWF aussi, cette pause est "un signal désastreux". "La pollution chimique est l'un des principaux facteurs responsables du déclin de la biodiversité animale et végétale, au même niveau que le changement climatique", ajoute Jean Burkard, du WWF France.

La santé des agriculteurs en jeu

"En favorisant les tenants de l'agriculture intensive et agro-industrielle plus que le monde agricole dans sa diversité, le gouvernement annonce aujourd'hui un nouvel échec politique, sanitaire et environnemental", critique-t-il.

"Certes il vaut mieux suspendre que d'avoir une stratégie au rabais", relève Sandrine Bélier, directrice de l'ONG Humanité et Biodiversité, jointe par l'AFP.

"Mais Ecophyto est le principal plan qui accompagne les agriculteurs dans leur transition économique", via les 41 millions d'euros distribuées par l'Office français de la biodiversité (OFB) pour la recherche, l'expérimentation, etc.

"Mettre en cause ce mécanisme, ça veut dire renoncer à accompagner les agriculteurs dans leurs transitions écologiques", met-elle en garde.

"L'enjeu, c'est la protection de la biodiversité mais aussi la santé des agriculteurs qui sont les premières victimes des phytosanitaires qu'ils utilisent", rappelle-t-elle.

Avec AFP.

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