"Si on veut atteindre nos objectifs de neutralité carbone, il faut que le solaire prenne une place relativement importante dans la production d’énergie, tranche d’emblée Stéphanie-Anne Pinet. Les terrains dégradés ont déjà été colonisés par le photovoltaïque, et toutes les toitures ne sont pas conçues pour accueillir des panneaux. Que reste-il comme espace ? les terres agricoles", explique la déléguée générale de l’association France Agrivoltaïsme. De ce constat est née l’idée de l’agrivoltaïsme : installer des panneaux solaires sur des parcelles d’élevage ou de culture, leur apportant à la fois ombrage et protection, et une production d’énergie décarbonée.
Un modèle gagnant-gagnant
"L’objectif c’est d’abord d’être un outil agricole, qui produit de l’énergie décarbonée", précise Stéphanie-Anne Pinet. Un champ avec des panneaux au sol, ou pas très hauts, ne rentre pas dans la définition de l’agrivoltaïsme. Il faut que les tables soient à une hauteur suffisante pour apporter un service : apporter de l’ombre aux animaux, protéger de la grêle ou de la pluie, laisser passer la lumière et protéger le fourrage. "On est à la croisée des enjeux de souveraineté alimentaire, et de souveraineté énergétique, c’est gagnant-gagnant". Ces panneaux solaires des champs pourraient participer à la décarbonation de l’énergie "à hauteur minimum de 60 à 80 gigawatts pour 2050".
Son développement est encouragé et encadré par les pouvoirs publics. En mars 2023, le parlement a inclus dans la loi d’accélération des énergies renouvelables la définition officielle de l’agrivoltaïsme, pour éviter les projets frauduleux, courants au début du mouvement. "C’est parce qu’il y a eu des projets qu’il nous a paru nécessaire de poser un cadre réglementaire, car il y avait beaucoup de projets 'alibis' ", se souvient Stéphanie-Anne Pinet.
Adoption définitive du #PJLENR avec le vote du Sénat : un double objectif d’accélération des projets d’énergies renouvelables et de préservation de notre souveraineté alimentaire. Le développement maîtrisé de l’agrivoltaïsme sera l’un des leviers pour traduire cette ambition.
— Marc Fesneau (@MFesneau) February 8, 2023
Une filière en expansion rapide
En 2021, l’Ademe, l’agence de la transition écologique, estimait à 167 les projets agrivoltaïques en France. Aujourd’hui, France Agrivoltaïsme en dénombre entre 200 et 250, "dont beaucoup encore en développement, on est encore au début de la filière". Sur un modèle souvent expérimental et scientifique, en partenariat avec l’INRAE par exemple, les installations solaires fleurissent un peu partout en France.
"Ce qui ne veut pas dire occuper des milliards d’hectares", nuance de suite la déléguée générale. Les objectifs de 2050 pourraient être atteints "sur ce qui correspondrait à un peu plus de 1% des terres agricoles".
Des projets qui divisent
Si Stéphanie-Anne Pinet se justifie d’emblée, c’est qu’elle a conscience des nombreuses critiques des riverains, qui s’opposent fréquemment aux projets. Mais à chacune, elle a sa réponse. "On nous dit que ça va artificialiser les sols. Mais l’agrivoltaïsme c’est exactement l’inverse, ça permet de protéger les sols des aléas naturels. Et on travaille à la limitation de l’encrage des structures dans le sol, pour limiter l’artificialisation".
Autre critique récurrente, la pollution visuelle d’immenses panneaux solaires en hauteur au milieu des champs. "On ne peut pas nier qu’on apporte un élément non-naturel au paysage. L’idée c’est de cumuler les éléments naturels et techniques pour optimiser la production et minimiser l’impact sur le paysage. On peut par exemple étudier l’emplacement par rapport à la typologie des territoires, ou planter des haies pour camoufler les installations, et apporter de la biodiversité."
Avec plus de la moitié du territoire français en surface agricole utilisée, l’agrivoltaïsme peut être une filière d’avenir. En plus de la loi, le concept dispose d’un label Afnor, qui certifie le respect du cahier des charges, et met en avant les projets. France Agrivoltaïsme créé de même son réseau européen, avec une association "sœur" en Italie, et une autre en construction en Allemagne, le tout en cohésion avec l’Union Européenne. Si les autorités nationales et européennes ont donné leur approbation à l’agrivoltaïsme, restent les riverains et agriculteurs, pas tous convaincus.
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