chronique

La gouvernance des entreprises face au défi de la parité

L’égalité des sexes est devenue une question fondamentale au cours des dernières années, qu’elle concerne par exemple la composition de notre gouvernement ou encore les rémunérations au sein des entreprises. Toutefois, cette problématique touche également la gouvernance des sociétés et notamment la composition des conseils d’administration et de surveillance dans les sociétés anonymes.

Ces organes sociaux sont chargés de veiller au bon fonctionnement et à la bonne marche de la société et ont été encadrés par la loi dite Copé-Zimmermann du 27 juin 2011 relative à la représentation équilibrée des femmes et des hommes et à l’égalité professionnelle.

Cette législation est la plus importante en matière de parité dans les organes de gouvernance et est venue imposer certains quotas et obligations aux sociétés anonymes. Entrée en vigueur le 1er janvier 2017, elle crée les articles L225-18-1 et L225-69-1 dans le Code de commerce, respectivement pour le conseil d’administration et le conseil de surveillance.

Des obligations concrètes et des sanctions à la clé

Plus précisément, cette loi oblige certaines sociétés à atteindre une proportion minimale de 40% d’administrateurs de chaque sexe au sein desdits conseils, l’objectif étant donc de couvrir le fossé s’étant creusé depuis des dizaines d’années. La volonté du législateur a par ailleurs été accompagnée d’une sanction particulièrement efficace car touchant directement au portefeuille de tous les administrateurs (et toutes les administratrices) en place !

En effet, la sanction concerne d’abord la nullité de la nomination faite en violation du quota et surtout la suspension des jetons de présence. Les jetons de présence représentent simplement la rémunération versée aux administrateurs pour leur présence au conseil, la valeur d’un jeton étant déterminée librement par chaque société.

Sur le papier donc, cette loi disposait des éléments nécessaires pour lutter efficacement contre les inégalités de sexe dans la gouvernance. Toutefois, deux précisions particulièrement importantes doivent être apportées.

Une portée limitée

Dans un premier temps, cette obligation ne concerne que les sociétés cotées (entreprises du CAC 40) et les sociétés anonymes (et société en commandite par actions, très rares) répondant à certains critères (50 millions de chiffre d’affaires ou de bilan et 250 salariés) plutôt restrictifs. Les plus grandes sociétés sont donc visées, mais elles ne sont pas représentatives de toutes les sociétés anonymes en exercice !

D’autant plus que la société par actions simplifiée, forme sociale considérablement plébiscitée, n’est pas soumise à cette exigence dans la mesure où elle ne dispose pas d’organe collectif de direction. Une transformation de la société anonyme en société par actions simplifiées peut donc suffire à contourner le dispositif (même si cette opération reste lourde).

Résultat des courses depuis l’application en 2017, les sociétés du CAC 40 ont su se mettre en conformité avec la loi, le taux de femmes aux conseils passant de 20,6% en 2011 à 39% début 2017.

Mais une certaine déception se manifeste aussi de l’état des lieux d’application de la loi, pour les sociétés non cotées, où les femmes ne représentaient que 15,5% en août 2016. Aussi, le souhait que cette parité imposée contamine le reste des sphères économiques n’a pas été suivi d’effets.

Certains regrets subsistent donc mais de réels progrès ont été réalisés.

Me Arnaud TOUATI

Avocat Associé - Barreau de Paris et Luxembourg

et Gary COHEN

HASHTAG Avocats