La quête de sens et de bien-être au travail occupe aujourd'hui une place centrale.
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Entreprises

Après les "déserteurs" et les "bifurqueurs", qui sont les "écotafeurs" ?

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Contrairement aux "déserteurs" ou encore aux "bifurqueurs", qui font le choix de quitter leur entreprise pour un job à impact ou porteur de sens, les "écotafeurs" décident de rester à leur poste afin de "faire bouger les lignes de l’intérieur". Qui sont-ils ? Comment s’organisent-ils ? Quels sont leurs modes d’actions ? Eléments de réponse. 

Depuis quelques années, le monde du travail ne cesse d’évoluer. De cette mutation naissent de nouvelles figures. On entend désormais parler de "déserteurs", de "bifurqueurs", et très récemment d’"écotafeurs". Un néologisme utilisé pour désigner ces salariés qui ont choisi d'oeuvrer en faveur de la transition écologique au sein de leur entreprise. "Il s’agit de cadres en recherche de sens au travail et qui expriment une certaine distance vis-à-vis de leur métier (lassitude ou aisance)", révèle l’étude sociologique "Ecotaf", publiée en décembre 2023 et financée notamment par l’ADEME. Si la majorité de ces employés fait partie de la génération Y (née après 1980), on retrouve également des salariés plus âgés.  

Pour la plupart, l’engagement né avant tout d’un déclic personnel qui va déclencher une phase d’"acculturation" à la thématique écologique, à travers des lectures ou le visionnage de vidéos de personnalités comme Jean-Marc Jancovici, Pablo Servigne... 
Vient ensuite une étape, nommée dans l’étude de dilemme de "l’insider activist". Autrement dit, les salariés "se posent la question de la démission pour exercer une activité plus conforme à leurs convictions (ex : écoentreprise, projet d’entrepreneuriat...)".  

De multiples dispositifs de mobilisation 

La mobilisation écologique des salariés grandit au sein des entreprises.
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Habités par "un sentiment de loyauté vis-à-vis de leur entreprise", ils préfèreront toutefois rester pour "faire bouger les lignes de l’intérieur". Il y a "la croyance que leur impact sera ainsi supérieur à celui d’autres engagements (associatif, entreprenariat, politique...)", note le sociologue Gaëtan Brisepierre dans une synthèse de l’enquête publiée en novembre 2023, avant d’ajouter : "l’entreprise mobilise l’essentiel de leur temps disponible, leur offre un public de non convertis, et leur laisse espérer un effet levier via des changements dans son activité." 

Cette mobilisation peut se manifester de plusieurs manières. Les salariés peuvent être à l’initiative d’animation d'ateliers, à l’image des Fresques du Climat. Ils peuvent aussi choisir de réaliser des parcours de formation, comme ceux proposés par Corporate for Change (CFC) qui permet de réunir les salariés en équipe plusieurs jours par mois sur un semestre autour du développement d'un projet à impact social et écologique. Autres leviers : les plateformes digitales, comme Lakaa ou le Challenge Environnemental Energic, ou les fédérations interentreprises, telles que Les Collectifs ou le syndicat Printemps écologique, qui permettent à des groupes de salariés issus de différentes entreprises de se mettre en réseau. Objectifs : échanger sur leurs initiatives mais aussi réfléchir à des actions pour tenter d'influencer les dirigeants. 

L’importance grandissante de la RSE 

Si les salariés peuvent être moteurs de la mobilisation écologique en entreprise, ils restent aussi grandement dépendants du bon vouloir de celle-ci. Les responsables RSE jouent alors un rôle fondamental dans l’impulsion de projets. Ils et elles occupent une place grandissante dans les entreprises, grandes comme petites. 

Leur fonction diffère toutefois selon les sociétés. "Dans les grands groupes, les directions RSE font face à une émergence spontanée de collectifs de salariés, avec lesquelles elles cherchent à établir une relation pour maintenir une cohérence avec les stratégies existantes", souligne Gaëtan Brisepierre. Dans les PME et les ETI (entreprise de taille intermédiaire), des postes de responsables RSE seront plutôt créés via des recrutements internes auprès de salariés. De manière globale, la mobilisation écologique des salariés, à la fois comme moteurs ou relais, participe à un "changement de mode d’exercice de la RSE" qui se tourne vers un modèle plus contributif

Si l'engagement pour les enjeux écologiques semble de plus en plus porté au sein des entreprises, que ce soit à travers des initiatives spontanées lancées par des salariés ou des actions coordonnés avec les entités RSE, plusieurs freins restent encore à lever, souligne l’étude "Ecotaf". Entre autres, la mobilisation écologique ne doit pas rester cantonnée aux grandes entreprises ou aux fonctions de cadres, mais s'ouvrir pour toucher le plus grand nombre. La question du temps est également centrale. Les salariés impliqués disposent aujourd’hui rarement de créneaux dédiés par l’entreprise. Pour débloquer quelques heures, "ils exploitent les interstices de leur activité professionnelle (ex : déjeuner, période d’intermission), et/ou ils font entrer la mobilisation dans des temps déjà sanctuarisés par l’entreprise (ex : formation, séminaire d’équipe...)", relève Gaëtan Brisepierre.  

Pour pallier ce manque, et éviter à moyen terme un risque de démobilisation, le sociologue propose de réfléchir à la création "d’un crédit temps écologique alloué sur le temps de travail, en particulier pour les salariés moteurs". Une piste reprise aujourd'hui par certains porteurs de dispositifs. 

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