La Capitaine du Sea Watch 3, Carola Rackete, a pris la parole lors d'une discussion sur les migrations climatiques, organisée rue de Rivoli jeudi 10 octobre.
©Twitter/Capture d'écran @XtinctionRebel
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À Paris et à travers le monde, les "XR" déterminés à tenir le pavé

"Bonjour à tous ! Nous sommes Extinction Rebellion. Nous luttons contre un système de domination économique et politique qui exploite le vivant. Désolés pour le blocage, ça fait encore plus de pollution, on vous invite à couper les moteurs ou prendre les transports en communs".

Mégaphone en main, la jeune femme harangue les automobilistes qui klaxonnent juste sous les fenêtres de l'Hôtel de Ville de Paris. Depuis quelques minutes, les militants du mouvement écolo, qui occupent depuis lundi 7 octobre en plein coeur de la capitale la place du Châtelet et le Pont au Change, viennent d'étendre leur blocage à la rue de Rivoli, coupant des grands axes de la ville.

Jeudi 10 octobre, les militants d'Extinction Rebellion ont bloqué la circulation rue de Rivoli.
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Retranchés dans leur "village apaisé", quelques centaines d'activistes, vingtenaires ou trentenaires en grande majorité, exigent notamment des autorités des mesures immédiates pour atteindre la neutralité carbone en 2025. Bien organisés, ils ont installé lundi en quelques minutes murs de palettes et bottes de paille, tentes et abris de bâches. Il y a des toilettes sèches et même un petit voilier peint en bleu qui trône au milieu du pont, à 100 mètres à peine de la préfecture de police. Des "bloqueurs" tiennent six barrages, prêts à se faire embarquer sans opposer de résistance physique en cas d'intervention des forces de l'ordre.

"Aucun deal avec la préfecture"

Mais depuis le début, celles-ci se tiennent à distance. "On est tous un peu surpris. On fait de la désobéissance civile, mais pour le coup, personne ne nous dit d'obéir," lance "Jeanne" (les XR se présentent en général juste sous un prénom), 29 ans, "étudiante dans le sud", mi-amusée, mi-dépitée.

Car le mouvement, né en Grande-Bretagne il y a un an à peine, mise sur le blocage des grandes villes mais aussi sur les images de ses militants se faisant interpeller. L'inaction des forces de l'ordre est d'ailleurs très commentée sur les réseaux sociaux des "gilets jaunes", comme un deux poids-deux mesures. "Aucun deal avec la préfecture", rétorquent les XR, rappelant que les images du "gazage" de leurs militants à Paris fin juin avaient suscité l'émoi et que le président Emmanuel Macron cherche peut-être à préserver une image "écolo" qu'ils lui dénient.

A Londres d'ailleurs, autre son de cloche, sur les réseaux sociaux, Extinction Rebellion UK parle : d'arrestation préventive en vue de la Rebellion Week, d'arrestations abusives - en mettant en avant celle d'un homme âgé de 91 ans - et soupçonne la ville de vouloir inonder les tentes situés à proximité de la fontaine à Trafalgar Square. 

En effet la nuit dernière, les militants ont été contraints de fabriquer des barrages de fortune pour minimiser la progression de l'eau qui débordait du bassin de la fontaine. La publication, mise en ligne au petit matin, vers 3h30 jeudi, fait l'estimation du début du sinistre à 11h en fin de soirée mercredi, soit 4h30 durant lesquelles l'eau se déverse sur le pavé de la place.

"On va avoir des canicules à 50 degrés madame"

A Châtelet, quelques "gilets jaunes" se sont joints au campement, une possible "convergence des luttes" est sujet de débat. XR adhère à une stricte non-violence et lors de l'occupation conjointe avec d'autres mouvements d'un centre commercial parisien samedi dernier, il y a eu des graffitis évoquant l'attaque de la préfecture de police de Paris, conduisant à une enquête pour "apologie du terrorisme". "Tout ce qui peut être marqué sur ce pont peut se retourner contre nous", avertit ainsi un jeune homme lors d'une des nombreuses AG qui parsèment la journée du camp.

Passe une dame, qui rouspète contre le détour qu'elle doit faire. On lui tend le micro, mais devant son refus d'engager le dialogue un "rebelle" lance : "On va avoir des canicules à 50 degrés madame, en fait vous allez mourir de chaud et on va tous mourir de faim parce qu'on n'aura plus rien à manger". Mais la plupart des badauds semblent accueillir plutôt positivement l'action, même si les cafés ont des recettes en berne.

Sur la rue de Rivoli désertée par les voitures, une conférence s'improvise. Plusieurs scientifiques et Carola Rackete, capitaine du bateau de secours aux migrants Sea-Watch, se succèdent au micro. "On vous remercie d'être ici, nous on sort de notre labo et on est très contents (...) L'urgence est là, on ne peut pas négocier avec la nature, lui demander 10 ans de délai pour commencer à prendre des mesures", lance Serge Janicot, climatologue, spécialiste de l'Afrique.

Encouragés par la nouvelle occupation du jour, et la fin de la pluie, les "rebelles" de XR applaudissent longtemps, déterminés à poursuivre leur action.

Avec AFP.

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