Le nez du Shinkansen, TGV japonais, est inspiré du bec du martin-pêcheur.
© Ellen Chan/Pixabay
Biodiversité

Qu’est-ce que le biomimétisme ?

Article réservé aux abonnés

Théorisée en 1997 par la biologiste américaine Janine Benyus, le biomimétisme consiste à s’inspirer des solutions développées par le vivant pour mieux répondre aux objectifs de développement durable. Eclairage avec Tarik Chekchak, directeur du pôle stratégies inspirées du vivant de l’Institut des Futurs souhaitables. 

"Apprenez de la nature, vous y trouverez votre futur", disait Léonard de Vinci il y a maintenant 500 ans. Considéré comme le pionnier de la bio-inspiration, le peintre et ingénieur italien n'a cessé d'observer la nature pour innover. Parmi ses inventions, on retient notamment ses machines volantes qui imitaient le vol des oiseaux et des chauve-souris. De nos jours, plusieurs innovations s'appuient sur la bio-inspiration, à l’image du Shinkansen, TGV japonais, dont le nez est inspiré du bec du martin-pêcheur. Autre héritage, le velcro (ou scratch), imaginé à partir de fleurs de bardane. Alors que cette approche s'applique désormais à de nombreux domaines, elle est à différencier du biomimétisme qui intègre une dimension écologique et humaniste. Pour y voir plus clair, ID a interrogé Tarik Chekchak, directeur du pôle stratégies inspirées du vivant de l’Institut des Futurs souhaitables.   

Quelle est la différence entre la bio-inspiration et le biomimétisme ? 

La bio-inspiration est vieille comme l’Humanité. C’est l’art de s’inspirer du vivant pour résoudre des problématiques. Mais cette approche ne prend pas nécessairement en compte des enjeux de développement durable ou d’écoconception. On peut imiter un insecte pour faire un robot en utilisant des énergies qui posent problème par exemple. De son côté, le biomimétisme place la responsabilité sociale et environnementale et l’éco-conception au centre de sa démarche. En résumé, il s’agit d’imiter le vivant dans son cahier des charges qui semble émerger de 3,8 milliards d’années d’essais et d’erreurs. Ce concept a été théorisé en 1997 par la biologiste américaine Janine Benyus. 

Pourquoi le biomimétisme connait-il un regain d’intérêt aujourd’hui ? 

En France, depuis une quinzaine d’années, plusieurs acteurs ont mis ce sujet à l’agenda, que ce soit l’Institut des Futurs souhaitables ou le Ceebios, centre européen d’étude et d’expertise en biomimétisme. La société s’interroge également de plus en plus sur le vivant. Les enjeux de biodiversité gagnent de l’ampleur auprès des individus comme des entreprises.

Les progrès technologiques permettent par ailleurs d’imaginer des solutions auxquelles nous n’aurions pas pensé dans le passé.

Par exemple, l’impression 3D ou 4D permettent de réaliser des impressions additives aux formes organiques ouvrant de nouvelles possibilités en termes de matières et de design de formes. Enfin, des instruments permettent aujourd’hui d’observer le vivant à différentes échelles, que ce soit grâce au microscope électronique à balayage ou au satellite.  

Pouvez-vous donner des exemples d’inventions réalisées grâce au biomimétisme ? 

Si on prend la porte d’entrée des matériaux, nous avons plusieurs exemples. Il est notamment aujourd’hui possible de s’inspirer des diatomées (des petites algues) pour fabriquer du verre à température ambiante. Grâce au "procédé sol-gel", on passe du feu à l’eau, c’est une petite révolution car cela permet de réduire l’empreinte carbone du verre. D’autres initiatives arrivent sur le marché et ne sont pas encore connues du grand public. L’entreprise FinX développe une solution qui remplace l’hélice des bateaux par une membrane ondulante. Cette technologie permet de faire des économies d’énergie mais aussi de préserver la biodiversité. On retrouve aussi des applications dans le biomédical. Certains chercheurs ont produit des colles sans produit chimique dangereux pour la santé. Celles-ci sont inspirées d’une substance sécrétée par un ver marin. Une entreprise américaine a également développé une colle en imitant le bifidus de la moule.  

Le biomimétisme est également une source d’inspiration pour les villes. A quoi ressemblerait une ville biomimétique ? 

La mobilité est douce. Les surfaces sont le moins possible artificialisées car cela pose des problèmes de ruissellement, de pénétrabilité de l’eau mais aussi de surchauffe en cas de canicule. La ville biomimétique s'inspire du vivant. Par exemple, les biofaçades, capables de s’ouvrir et de se fermer pour réguler la température et l’humidité, imitent le fonctionnement des pommes de pin.

La ville de demain aura également des formes beaucoup plus organiques et en phase avec le vivant.

Grâce à l'impression 3D, on sort de la fabrication à angle droit. Nous avons aussi accès à des matériaux fixateurs de carbone comme la pierre calcaire. Par ailleurs, en mélangeant des déchets agricoles avec du mycelium de champignons, on peut réaliser des cloisons de bâtiments. La ville de demain aura donc aussi des matériaux qui poussent. 

Quelle grande révolution pourrait apporter aujourd’hui le biomimétisme ? 

Nous sommes en train de provoquer la sixième extinction de masse de la biodiversité, de modifier le climat. L’Humanité s’est mise en danger par son succès technologique. A travers le biomimétisme, il y a une invitation à faire autrement. Il y a des façons de faire, des technologies, qui sous le prisme de l’humanisme et de la considération du vivant, pourraient nous aider à accélérer les transitions vers les futurs souhaitables.

Vous avez apprécié cette information ? Abonnez-vous à notre newsletter en cliquant ici !  

Pour aller plus loin et agir à votre échelle, découvrez notre guide Idées Pratiques #12 : "Ecologie : gagner plus, dépenser moins”. 

Au sommaire : enjeux, analyses, entretien décryptages... 68 pages pour associer économies avec écologie ! 

Cliquez ici pour découvrir et commander votre guide Idées Pratiques. 

#TousActeurs

 

* Offre sans engagement valable pour toute nouvelle souscription d’un abonnement à l’Infodurable. Au-delà du 1er mois, à défaut de résiliation, reconduction tacite de l'abonnement à 6,90€ par mois. Le client peut à tout moment demander la résiliation de son abonnement. Cette résiliation prendra effet le dernier jour de la période d'abonnement en cours.
Pour toute question, vous pouvez contacter notre service client par mail contact@linfodurable.fr.