Avec ses 124 millions d’habitants, le Japon reste l’un des pays les plus peuplés du monde. Pourtant, depuis le début des années 2010, il connaît une baisse continue de sa population, principalement en raison d’un taux de natalité très faible. Le pays du Soleil-Levant est aujourd’hui l’un des champions mondiaux du déclin démographique. La population y est vieillissante, et les naissances se font de plus en plus rares depuis une dizaine d’années.
Une vaste étude menée par des chercheurs de l’Université de Sheffield, en collaboration avec Kei Uchida de l’Université de Tokyo, a analysé plus de 1,5 million d’observations d’espèces issues de 158 sites à travers le Japon. Il s’agit de l’une des recherches les plus complètes jamais réalisées sur le sujet. Et ses conclusions sont surprenantes : même dans les zones en déclin démographique ou partiellement abandonnées, notamment dans certaines régions de la côte Est, la biodiversité ne repart pas à la hausse.
Des paysages modifiés, mais pas réensauvagés
Contrairement à ce que l’on pourrait croire, l’abandon progressif des terres agricoles et des villages ne favorise pas forcément la restauration des écosystèmes. Dans certains cas, l’absence d’entretien et de gestion des paysages traditionnels tels que les rizières ou les forêts secondaires entraîne une homogénéisation du milieu, limitant la diversité des espèces.
" Beaucoup de ces milieux étaient en réalité semi-naturels, entretenus par l’activité humaine", explique Kei Uchida. " Leur abandon ne recrée pas une nature sauvage, mais favorise plutôt des espèces envahissantes ou opportunistes." Le déclin de l’agriculture, par exemple, a conduit à la disparition de certaines espèces de plantes et d’insectes spécifiques à ces environnements façonnés par l’homme.
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Un avertissement pour le futur
Le Japon, souvent vu comme un laboratoire du futur en matière démographique, offre ici un avertissement précieux pour d’autres régions du monde confrontées à un vieillissement de la population ou à l’exode rural. Le simple recul de l’activité humaine ne suffit pas à faire renaître la nature : il faut une volonté politique et des actions concrètes de restauration écologique.
Ce constat va à l’encontre d’une idée répandue selon laquelle la baisse de la population humaine conduirait mécaniquement à un retour de la biodiversité. Il souligne également l’importance de la gestion active des paysages, même dans un contexte de dépeuplement. Sans cela, les espaces naturels risquent de se dégrader, non pas par l’action de l’homme, mais par son absence.
Le Japon, toujours en quête de constructions
Au-delà de ses paysages soigneusement entretenus, le Japon est aussi marqué par l’immensité de ses métropoles. Tokyo en est l’exemple le plus frappant : avec une aire urbaine de 37 millions d’habitants, elle reste la ville la plus peuplée du monde.
Malgré la baisse de population et le recul de la nature observé dans certaines régions, la construction ne ralentit pas. En 2024, plus de 790 000 nouveaux logements ont été bâtis, alors même qu’environ 15 % du parc immobilier japonais est composé d’akiya des maisons vides ou abandonnées. Une dynamique qui limite encore davantage les possibilités de réintroduire la végétation dans les zones urbanisées ou en déclin.