Ministère de l'Economie et des finances
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Humeur

Le gouvernement veut taxer la nature !

Maître de conférence à Polytechnique, Guillaume Sainteny sait mesurer ses propos. Il n'a pourtant pu s'empêcher de se lâcher dans une tribune publiée dans les Echos.

L'objet de son emportement : le PLF 2018 (Projet de loi de finance) qui va revisiter l'ISF (Impôt de Solidarité sur la Fortune) en taxant les espaces naturels. « Une razzia fiscale sur la nature » précise le haut fonctionnaire, scandalisé.

De fait, l'idée vise à prélever 62 %, soit plus du double de la norme, sur le patrimoine naturel. Qu'ils soient sites protégés ou paysages banals, écosystèmes capables de filtrer les pollutions ou réserves naturelles, forêts captant le CO2 ou rivages d'exception, tous ces espaces passeront sous le joug de Bercy. Alors qu'ils bénéficiaient d'un taux d’imposition inférieur au titre de foncier non bâti, les voilà douloureusement pénalisés.

Une approche à contre-sens 

Cette perspective va à l’encontre de tous les efforts entrepris pour préserver les espaces naturels qui constituent l'arche de la biodiversité. On sait qu'ils résistent difficilement à l'artificialisation rongeant quelque 70 000 hectares par an de terres naturelles et agricoles. Les alourdir financièrement revient à lâcher prise. A quoi bon préserver la nature puisqu'elle est moins coûteuse dès lors qu'elle est … bâtie ?

La démarche va également à l’encontre de la captation de carbone, elle ignore le rôle des zones humides, elle se détache des prairies alluviales et, au final, elle oublie les services rendus par la nature.

Guillaume Sainteny résume la situation : « jusqu’alors, toute la fiscalité de l'environnement fut basée sur le principe « pollueur-payeur » et voilà qu'en opposition à cette règle, la France invente le principe « dépollueur-taxé » ! 

On peut légitimement penser que l’Administration de l’économie et des finances n'ignore pas cette incohérence. Elle traite donc délibérément la nature avec mépris. Dès lors, l'opinion publique aura du mal à croire aux discours qui – en haut lieu – affirment vouloir construire la fameuse transition écologique.