Le directeur du nouveau trimestriel, Yggdrasil, Yvan Saint-Jours, est un militant écologiste qui a notamment fondé les magazines La Maison écologique et Kaizen : "J'avais envie de lancer un magazine axé sur l'autonomie et la reprise en main de sa vie, explique-t-il à ID. Je tenais absolument à ce que Pablo y participe (ndlr : Pablo Servigne, chercheur et conférencier qui revendique la paternité du concept de "collapsologie"), et qu'il y ait ainsi une partie sur l'effondrement. Il a tout de suite été très emballé, et au fil des discussions, l'effondrement a pris une place prépondérante dans ce projet, ce qui m'allait totalement."
S'en est suivie une campagne de financement participatif qui a permis de lever 167 585 euros auprès de plus de 3100 personnes. "Initialement, on s'était mis un palier de réussite à 50 000 euros, donc ça a plutôt bien marché, remarque Yvan Saint-Jours. Ça nous a mis une pression aussi, parce qu'il y a une attente extrêmement forte. Nous avons reçu des tas de mots : outre la trésorerie que cela a apporté, cette campagne nous a permis de créer une première base de communauté de cœur."
Un mook
Yggdrasil est un mook (mi-magazine, mi-livre) sans publicité, de 144 pages, tiré à 50 000 exemplaires, imprimé sur du papier recyclé et distribué en kiosques. Son coût : 12 euros. Sa durée de vie : trois ans, soit 12 numéros. "Nous ne croyons pas en la croissance infinie, nous avons conçu Yggdrasil comme un organisme vivant. Il naît aujourd'hui, croît, puis meurt en 2022 après 12 numéros. S'il génère des bénéfices, ils seront reversés à son écosystème (associations, organismes, éco-lieux...), qui est en train d'émerger", explique le directeur.
Au programme du premier numéro d'Yggdrasil, un "petit manuel de désobéissance civile", une interview d'Edgar Morin, un reportage dans les locaux du journal britannique Permaculture magazine, un papier sur les tiny houses ou des fiches pratiques sur la récupération de l'eau. "On y apprend comment reprendre sa vie en main, avec des trucs très simples et d'autres un peu plus compliqués, mais qui sont indispensables", pointe M. Saint-Jours. Une partie sur l'enfance est également présente : qu'est-ce qu'être un enfant dans un monde en train de s'effondrer ? Vingt-cinq collaborateurs d'horizons très différents ont participé à ce premier numéro.
"C'est un bel objet, fait remarquer M. Saint-Jours. L'idée n'est pas de terroriser, même si on y va cash avec l'effondrement à l'intérieur, précise le directeur de la publication. C'est plus de dire : 'Ok, ça fait peur, c'est angoissant, mais maintenant, que fait-on pour traverser cet effondrement ?' On l'a plus vu comme un outil pour accompagner les lecteurs dans une prise de conscience de demain et pour les aider à imaginer à quoi pourra ressembler notre nouveau monde, sachant que l'on est sur une banquise fondante."
S'il y a bien des mots avec lesquels on l'a fait, c'est 'joie' et 'amour' !" - Yvan Saint-Jours, directeur de la publication d'Yggdrasil
Mais au fait, pourquoi "Yggdrasil" ?
"Yggdrasil" est un arbre mythique dans la tradition nordique, que l'on retrouve aussi dans toutes les cultures. "On a pris ce nom parce qu'il est extrêmement fort, très symbolique, c'est un frêne et le frêne est en train de disparaître en Europe. La symbolique par rapport à cette extinction et l'effondrement est très forte."
Yvan Saint-Jours et Pablo Servigne présent leur magazine comme étant "le dernier avant la fin du monde", une boutade entre eux. "S'il y a bien des mots avec lesquels on l'a fait, c'est 'joie' et 'amour' !", tient à souligner M. Saint-Jours. Mais ce qu'il faut retenir, c'est que s'il y a un moment dans l'histoire de l'humanité où l'on doit se retrousser les manches et se rassembler, c'est tout de suite. L'effondrement, ce n'est pas apprendre une nouvelle et se dire : 'Ça y est, c'est terminé, soit je meurs, soit je bois un dernier coup et je fais un dernier voyage en avion avant que tout ne parte en vrille'. C'est plutôt : 'Qu'est-ce que je mets en place maintenant pour vivre pleinement ma vie ?'."
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Avec AFP.