Paul-Simon Bénac, porte-parole du Label Relance.
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Entretiens

Label Relance: "La mobilisation de l’épargne est un enjeu majeur pour consolider la reprise économique"

Lancé fin 2020, le label Relance affiche l'objectif de valoriser les fonds contribuant à la relance de l’économie en soutenant les entreprises françaises. Paul-Simon Bénac, porte-parole du label et adjoint au chef du bureau épargne et marchés financier à la direction générale du Trésor, revient sur ses attributs et dresse un premier bilan.

Les investisseurs peuvent depuis quelques mois investir dans des fonds porteurs du label "Relance"... De quoi parle-t-on exactement ? 

Lancé le 19 octobre 2020, le label Relance s’inscrit parmi un ensemble d’initiatives mises en œuvre pour accompagner le redémarrage de l’investissement en phase de reprise. Son objectif est de valoriser les placements collectifs contribuant à la relance de l’économie en apportant des ressources nouvelles aux entreprises françaises, notamment via l’investissement en fonds propres dans des PME et ETI.

Le label insiste particulièrement sur la mobilisation des épargnants, pourquoi cibler ces derniers ?

Il y a eu depuis le début de la crise sanitaire une très forte accumulation de l’épargne, massivement investie dans des supports très liquides et en particulier des comptes courants, bien plus que dans des produits d’investissement dans les entreprises, quand bien même ceux-ci sont les plus rémunérateurs sur longue période. En face, nous constatons des besoins en financements chez les entreprises françaises, même si ces dernières ont globalement bien résisté grâce aux soutiens importants mobilisés.

La mobilisation de l’épargne en faveur de la relance est dès lors un enjeu majeur pour consolider la reprise économique et constitue dans le même temps une nécessité pour les épargnants eux-mêmes, dont l’épargne, peu diversifiée, souffre d’une rémunération aujourd’hui inférieure à l’inflation.  

Plus globalement, ce label fait écho à la part grandissante d’épargnants désireux de donner du sens à leur placement. La marque du "Made in France" rencontre d’ailleurs un grand succès dans l’univers des produits de consommation, sans qu’il n’existe d’équivalent pour les produits financiers. Le label répond à cette logique de valorisation de produits qui sont "bons" pour l’économie française.

Qui attribue le label ?

Il n’y a pas d’organismes certificateurs car le label a une vocation temporaire et répond à une logique de déploiement rapide dans le cadre du plan de relance. Il est pour autant octroyé par la Direction Générale du Trésor, qui examine chaque dossier des fonds sur la base d’un cahier des charges élaboré en collaboration avec des associations de la Place ainsi que des associations d’épargnants.

Quels sont les produits concernés ?

Le label concerne à la fois des fonds de capital-investissement, qui peuvent être réservés à une clientèle avisée mais aussi accessibles au grand public, et des fonds investis en valeurs cotées. Ces fonds doivent notamment s’engager à participer à des opérations d’augmentation de capital ou d’introduction en bourse et à investir significativement dans des PME et ETI françaises.

Le label prend-il également en compte la dimension ESG ? Introduit-il des obligations supplémentaires en matière de transparence ?

Il ne s’agit pas d’un label ISR ou ESG, mais nous nous assurons de la prise en compte de cet aspect dans la politique d’investissement et d’accompagnement actionnarial des fonds. Il existe en outre une exclusion sectorielle pour les activités liées au charbon.

S’agissant de la transparence, les fonds Relance sont soumis à une obligation de reporting semestriel. Les données publiées concernent le pourcentage d’entreprises françaises en portefeuilles, le nombre de PME et d’ETI soutenues en fonds propres ou encore le nombre d’augmentations en capital auxquelles les fonds ont participé.

Quel bilan dressez-vous plus d’un an après le lancement du label ?

Nous sommes très satisfaits du bilan à ce jour. L’objectif était d’offrir à chaque épargnant la possibilité de trouver un produit labellisé correspondant à ses attentes et à son profil. Avec 212 fonds labellisés aujourd’hui, il existe une vraie diversité dans la gamme, à la fois sur les types de produits concernés, mais aussi sur le plan géographique : si ces fonds sont significativement investis dans des entreprises françaises (en moyenne 74 % d’entreprises françaises en portefeuilles), la charte permet la labellisation de fonds plus diversifiés, comprenant par exemple des actions de la zone euro.

Enfin, alors que certains épargnants pourraient craindre de devoir bloquer leur épargne sur dix ans, les produits labellisés offrent aussi une diversité sur le plan de la liquidité, y compris pour les fonds de capital-investissement : certains, distribués dans des contrats d’assurances-vie, prévoient par exemple des fenêtres de sortie à horizon mensuel ou trimestriel. L’offre a aujourd’hui atteint une taille critique, et chaque épargnant peut désormais s’en saisir pour participer à la relance.

Certains freins psychologiques liés à la perception du risque subsistent également lorsqu’il s’agit d’investir dans des produits dédiés à l’investissement en fonds propres (...)"

Comment souscrire ces produits ?

Les fonds labellisés sont accessibles via tous les supports d’épargne grand public. 90 % des OPCVM le sont via un plan d’épargne en actions, tandis qu’un tiers des fonds labellisés sont proposés dans des contrats d’assurance vie. La quasi-totalité des assureurs proposent aujourd’hui au moins un fonds labellisé dans chaque contrat. Il existe également des fonds d’épargne salariale ou accessibles dans le cadre de plan d’épargne retraite. La liste complète des produits labellisés est disponible sur le site de la Direction Générale du Trésor. 

Malgré cette "quête de sens" pour leur argent, les Français sont encore relativement peu à franchir le cap de l’investissement responsable. Quels sont les freins et comment les lever ?

Un volet très important est d’apporter de la confiance à l’épargnant sur la robustesse des approches ESG qui lui sont présentées. Cela devrait notamment passer par la mise en œuvre et la mise en cohérence de la réglementation européenne autour de la finance durable et par les travaux en cours pour améliorer la qualité des données ESG fournies par les entreprises.

Certains freins psychologiques liés à la perception du risque subsistent également lorsqu’il s’agit d’investir dans des produits dédiés à l’investissement en fonds propres ; or, ceux-ci sont appelés à jouer un rôle important dans la transition dès lors que leurs gestionnaires peuvent s’inscrire dans une démarche d’engagement actionnarial active. Il y a de ce côté un travail à mener auprès des conseillers financiers mais aussi des produits d’épargne, entamé notamment dans le cadre de la loi PACTE, qui a favorisé la création de fonds de capital-investissement innovants, adaptés à une commercialisation par l’assurance-vie.