Astaffort. C’est ici, dans ce petit village du Lot-et-Garonne où la nature règne en maître, que Ninon Biasiolo a passé son enfance. Si son quotidien était rythmé par les balades en plein air et la cueillette des champignons, les enjeux environnementaux, eux, étaient à cette époque absents de ses préoccupations. "Enfant, mes parents ne m’ont jamais trop parlé d’écologie", confie-t-elle.
Ce n’est que bien plus tard, en quittant la campagne pour s’installer à Bordeaux dans le cadre de ses études, que ce lien avec la nature a commencé à prendre un nouveau sens. "Quand je suis partie en ville, j’ai eu un petit choc", raconte-t-elle. "Toute cette surconsommation, ça m’a vraiment choquée. Et c’est là que j’ai commencé à me renseigner grâce aux médias, aux réseaux sociaux, et aux livres."
L’art comme levier de sensibilisation
Cette prise de conscience marque un tournant. Alors, pour agir à son échelle, Ninon se lance au départ dans la création de t-shirts illustrés, avec l’idée d’ouvrir le débat autour de sujets comme l’écologie. Parmi ses dessins, celui d’un poulpe ramassant des déchets rencontre le plus grand succès et devient le symbole de son engagement.
Je voulais un personnage qui incarne la justice : envers la planète, les animaux, et les humains.
Mais c’est lors d’un marché où elle vend ses créations qu’une rencontre inattendue change tout. Une petite fille l’interroge alors : pourquoi le poulpe ramasse-t-il des déchets ? "Sur le moment, je lui ai imaginé une histoire : celle d’un poulpe qui ramasse les détritus avec ses tentacules pour protéger son amoureuse, une petite tortue blessée par un sac en plastique reçu en plein visage", raconte-t-elle. Ce simple échange déclenche chez Ninon l’envie de développer un projet plus ambitieux. Quelques mois plus tard, Poulpo l’écolo voit le jour.
Entre écologie et justice sociale
Depuis, ce petit héros a conquis les cœurs des enfants à travers quatre tomes déjà publiés. Chaque histoire aborde des thèmes essentiels comme la gestion des déchets, la fonte des glaciers, ou encore l’inclusion sociale. "Mon but, c’est que Poulpo devienne un super-héros comme Spider-Man ou Batman, mais version justicier de la planète", s’enthousiasme Ninon.
Quand on plante une graine dans l’esprit d’un enfant, on lui offre une chance d’agir dès le départ, sans l’angoisse paralysante que j’ai connue plus tard.
Dans un des tomes par exemple, Poulpo aide Marjolaine la Baleine à s’intégrer malgré ses différences, abordant ainsi des sujets comme la grossophobie. "Je voulais un personnage qui incarne la justice : envers la planète, les animaux, et les humains." Une volonté de mêler pédagogie et imaginaire qui se retrouve dans sa vision de la littérature jeunesse. "Les histoires du soir, elles dictent nos rêves. C’est à travers elles qu’on peut planter des petites graines et aider les enfants à grandir dans un univers plus sain."
Un impact palpable
Et cet engouement pour Poulpo se fait particulièrement sentir lors des marchés, où Ninon rencontre son public. "Des parents reviennent et me disent : 'Maintenant, dès qu’on sort de la plage, mon enfant veut ramasser les déchets comme Poulpo.' Ça, pour moi, c’est une vraie victoire."
Mais pour la jeune femme, l’aventure ne fait que commencer. En plus de continuer à écrire – avec des ouvrages en préparation sur le septième continent de plastique et la gestion des émotions – elle rêve de porter Poulpo l'écolo sur petit écran en l’adaptant en dessin animé. "Si un jour vous voyez Poulpo à la télévision, j’ai tout gagné."
Briser le cycle de l'inaction écologique
Plus largement, en sensibilisant les enfants dès leur plus jeune âge, Ninon espère briser le cycle de l’inaction et de la culpabilité écologique. "Je veux que ces sujets deviennent naturels, qu’ils fassent partie de nos façons de consommer et de vivre. Quand on plante une graine dans l’esprit d’un enfant, on lui offre une chance d’agir dès le départ, sans l’angoisse paralysante que j’ai connue plus tard."
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