À 26 et 24 ans, Tiphaine Guehenneuc et Mathis Farrouilh viennent de terminer leur master en innovation sociale à l'école 3A de Rennes. Poussés par la volonté de créer un monde plus juste et durable, ces deux jeunes diplômés ont fondé, en avril dernier, l’association "Cultiver l’avenir".
Visant à faire émerger des solutions sociales et écologiques à travers l’Europe, le projet est né d'un constat simple : malgré la richesse de l'écosystème de l'économie sociale et solidaire (ESS), les acteurs du secteur disposent souvent de peu de temps et de moyens pour explorer et s'inspirer des initiatives innovantes qui émergent ailleurs sur le continent. Comme le souligne Tiphaine : "au sein de nos structures associatives, nous n’avons toujours que peu de temps et peu de moyens pour faire un pas de côté et voir ce qu’il se fait ailleurs".
Diffuser l'innovation sociale
Face à ce défi, les jeunes diplômés ont défini un objectif clair : proposer un état des lieux des solutions innovantes et solidaires en matière de transition sociale et écologique à travers l’Europe. Pour mener à bien cette mission, l’association met en place des "Pépinières", c’est-à-dire des programmes phares sur lesquels elle se concentre pendant une période définie. Ces projets se déclinent toujours en trois phases : recenser des initiatives solidaires et inspirantes à travers l’Europe ; diffuser ces innovations sur le territoire breton ; et enfin, accompagner l’essaimage de ces initiatives pour favoriser la mise en place de pratiques vertueuses.
Dans ces six pays-là, notre but c'est d'avoir des points de chute, soit dans des lieux dédiés à la démocratie alimentaire, soit dans des espaces liés à l’éducation.
La première de ces pépinières, intitulée "Se nourrir face aux inégalités en Europe", met l’accent sur deux enjeux majeurs pour les fondateurs : l’éducation et l’alimentation. "Avec l’expérience de Mathis dans les structures éducatives et la mienne auprès des personnes en situation de précarité, on s’attaque à deux grands marqueurs des inégalités sociales, qui sont des priorités", explique Tiphaine.
Un voyage à travers l'Europe
Pour donner corps à cette ambition, le programme de cette première pépinière prendra la forme d’un voyage de six mois à travers six pays européens : l’Espagne, l’Italie, la Grèce, la Roumanie, la Finlande et l’Allemagne.
"Dans ces six pays-là, notre but c'est d'avoir des points de chute, soit dans des lieux dédiés à la démocratie alimentaire, soit dans des espaces liés à l’éducation", précise Mathis. "L’idée est d’en repérer deux ou trois par pays avant de s’y rendre, pour assurer une certaine stabilité et des possibilités d’échanges. En même temps, il est important de garder du temps et de la flexibilité pour profiter du bouche-à-oreille, qui fonctionne très bien dans ces domaines, et pour découvrir des structures intéressantes qu’on ne connaît pas forcément depuis la France."
Sensibilisation, échanges et essor de bonnes pratiques
À leur retour, Tiphaine et Mathis partageront les résultats de leur périple à travers un documentaire réalisé avec les images collectées tout au long de leur voyage. "Cette production sera avant tout un support pour dialoguer avec le grand public et les jeunes que nous rencontrerons dans les établissements", précise Tiphaine. "Nous avons également à cœur de les sensibiliser, notamment à travers des restitutions dans les milieux scolaires de la région, afin de les mobiliser sur ces défis et de leur faire comprendre ce qui se joue réellement à l’échelle européenne."
En parallèle, un rapport plus technique sera rédigé pour les structures associatives, les professionnels et les bénévoles. L’objectif sera de leur présenter des exemples de projets solidaires et écologiques développés dans d’autres pays européens et de réfléchir ensemble à comment ces initiatives peuvent être adaptées à leur propre échelle.
"En matière d’éducation, nous nous tournerons vers les établissements scolaires, qu’ils soient publics, privés ou alternatifs. Du côté alimentaire, nous échangerons avec des AMAP, des épiceries solidaires, des restaurants engagés, et d'autres structures similaires. L’objectif sera de leur présenter des exemples de projets solidaires et écologiques développés dans d’autres pays européens, afin de voir comment eux-mêmes pourraient agir à leur échelle", ajoute Tiphaine.
Financement participatif et soutien institutionnel
Pour financer cette première pépinière, "Cultiver l’avenir" a fait appel à la générosité du public via un financement participatif, récoltant plus de 6 000 euros. L’association a également obtenu une bourse "Jeune à Travers le Monde" (JTM) du département d'Ille-et-Vilaine, ainsi qu'un soutien financier de leur ancienne école pour l’accompagnement à la gestion de projets. La ville de Rennes a aussi apporté son aide, et d’autres financements sont en cours d’obtention, que ce soit par Rennes Métropole, des fondations ou des entreprises privées.
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"L’objectif, c’est d’avoir des ressources aussi variées que possible et de mettre en place un modèle économique qui tienne la route, avec plein de sources différentes, pour que l’association puisse durer dans le temps", conclut Mathis.
Mais l’ambition de l'association ne s’arrête pas là. Forts de ce premier projet, Tiphaine et Mathis prévoient d’élargir leur démarche en lançant de nouveaux programmes dans les années à venir. L’objectif : diversifier les thématiques abordées et s'imposer comme un lieu de recherche et de découverte de structures inspirantes.