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En bref

Un groupe de grands investisseurs lance un appel en faveur de la biodiversité

Les 30 investisseurs, représentant plus de 6 000 milliards d'euros d'actifs, appellent dans un communiqué à se saisir des questions de biodiversité en "travaillant à la création concertée et transparente de mesures d'impact liées à la biodiversité".   

Quatre gérants français, AXA Investment Managers, BNP Paribas Asset Management (BNPP AM), Sycomore Asset Management et Mirova (affilié de Natixis Investment Managers), ont annoncé jeudi 28 mai via un communiqué "avoir réuni plus de trente signatures de la part d’investisseurs de renom du monde entier, représentant plus de 6000 milliards d’€ d’actifs sous gestion, pour soutenir une déclaration publique lancée le 3 mars appelant à la création de mesures d’impact liées à la biodiversité".

"Les années 2020 et 2021 seront cruciales pour l’action en faveur de la nature et de la biodiversité et seront jalonnées par plusieurs rendez-vous importants. La France accueillera notamment un des événements clés de cette séquence : le congrès mondial de la nature organisé par l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) à Marseille en janvier 2021. Pour permettre de réelles avancées, il sera indispensable que les mondes économique et financier se saisissent de ces sujets. En particulier, la capacité des investisseurs à intégrer progressivement les impacts sur la nature et sur la biodiversité dans l’appréciation des risques et les recherches d’opportunités, constituera un signal pour l’ensemble de l’économie.

Mesure d'impact : la démarche est engagée

Cette déclaration s’inscrit dans la ligne du travail démarré par le même consortium composé d’AXA IM, BNPP AM, Mirova et Sycomore AM, qui ont lancé en janvier dernier un appel à manifestation d’intérêt pour une offre de mesure d’impact sur la biodiversité adaptée à l’investissement. Le très fort intérêt qu’a suscité le lancement de cette consultation auprès des investisseurs a été le déclencheur de la déclaration publique d’investisseurs autour des principes fondateurs suivants :

  • Une méthodologie fondée sur l’analyse de cycle de vie produisant une mesure capturant les impacts physiques négatifs sur la biodiversité, ainsi que les impacts positifs,
  • Pouvant être agrégée au niveau des entreprises, des portefeuilles et des indices, sur une large gamme d’actifs,
  • Transparente et s’appuyant sur le large corpus des données existantes en source ouverte et sur les publications des émetteurs de titres financiers.

L'appel à manifestation mobiliser les fournisseurs de données 

AXA IM, BNPP AM, Mirova et Sycomore AM ont reçu 14 réponses à l’appel à manifestation d’intérêt. Ayant mobilisées au total 30 entités (consultants, académiques, institutions, fintech et fournisseurs de données extra-financières), ces 14 offres proviennent de 6 pays différents (Royaume-Uni, Etats-Unis, Suisse, Pays-Bas, France et Canada).

'Nous sommes ravis de constater la mobilisation autour de ce sujet crucial de l’impact des investissements sur la biodiversité, que ce soit au niveau des investisseurs ou des fournisseurs. Nous avons sur la table des propositions de qualité, dont les principes ont été adoptés par les signataires de la déclaration publique sur le besoin urgent de mesure opérationnelle des impacts physiques sur la biodiversité. Nous sommes désormais optimistes sur la possibilité de mettre en place cette mesure d’impact, qui devrait permettre des progrès importants.', déclarent Julien Foll d’AXA IM, Robert Alexandre Poujade de BNPP AM, Sarah Maillard de Mirova et Jean-Guillaume Péladan de Sycomore AM.

Le processus de sélection se poursuivra dans les semaines à venir. Un comité d’experts constitué par Julie Raynaud (consultante indépendante), Katie Leach (UNEP-WCMC1 ), Hugo Bluet (WWF France) et Guillaume Sainteny (Fondation pour la Recherche sur la Biodiversité) a été formé pour assister le jury de ses avis consultatifs indépendants."

Déclaration publique du groupe d'investisseurs : 

  • "La biosphère de la Terre est un bien commun, qui procure de très nombreux services écosystémiques et qui concerne toutes les formes de vie. C’est le fondement même de la résilience et du progrès de l’humanité. Tous les marchés et les économies fonctionnent au sein de la biosphère et en dépendent.
  • La biosphère est soumise à une pression croissante qui limite sa capacité à fournir des services écosystémiques durables, tant dans le présent que pour l’avenir. Nous avons considérablement empiété sur la biodiversité, comme l’illustrent les niveaux critiques de dégradation en cours, tels que la perte annuelle de 12 millions d’hectares de forêt tropicale humide, et le taux d’extinction d’espèces dépassant de 100 à 1 000 fois la moyenne sur dix millions d’années. Un million d’espèces sont actuellement menacées d’extinction.
  • En tant qu’investisseurs, nous reconnaissons la nécessité de protéger la biodiversité pour les générations futures, car nous ne pouvons pas générer de valeur pour nos clients sans une biosphère saine et, surtout, parce que nous pensons qu’il est de notre responsabilité d’améliorer la préservation de nos écosystèmes. Le secteur financier montre un intérêt croissant pour l’intégration des questions environnementales dans les processus d’investissement. Cette problématique fait également l’objet d’une attention grandissante des parties prenantes, qui attendent que les investisseurs rendent des comptes sur les impacts de leurs investissements sur l’environnement. En effet, la finance se situe au croisement de tous les secteurs d’activité et prend des décisions d’allocation de capital qui ont des conséquences significatives pour la société et pour l’environnement.
  • Nous manquons d’outils pour mesurer ces impacts avec précision et cohérence, alors que nous savons que nombre d’industries ont un impact direct sur la biodiversité. Nous avons besoin de meilleurs outils pour mesurer l’impact physique des investissements sur les écosystèmes et le réduire.
  • Nous attendons des fournisseurs de données qu’ils développent des outils de mesure de la biodiversité avec des indicateurs d’impact physique et de matérialité financière des entreprises et des projets sur les écosystèmes. À cet égard, les fournisseurs de données ont également la responsabilité de s’engager avec les entreprises sur la communication relative à la biodiversité, afin de les encourager à fournir des informations pertinentes dans ce domaine.
  • Les méthodologies doivent suivre une approche d’analyse du cycle de vie.
  • Les méthodologies doivent capter les impacts négatifs et positifs afin de permettre aux investisseurs d’identifier les investissements bénéfiques et ceux qui sont nuisibles. Ces données doivent faciliter l’évaluation de la contribution globale, "nette", d’un actif et d’un portefeuille à la biodiversité.
  • Le champ d’application doit être aussi large que possible pour que les investisseurs puissent appliquer ces indicateurs à des portefeuilles conséquents et les comparer à des indices de marché couramment utilisés, avec des données suffisamment granulaires et flexibles pour permettre une analyse au niveau du portefeuille et de l’émetteur.
  • Le développement de ces outils doit permettre de renforcer la transparence, en exploitant un grand nombre de sources d’information et de bases de données existantes, à travers des actions collectives et open source.
  • Les investisseurs ont besoin de clarté avant la COP 15 de la Convention sur la diversité biologique afin de mieux évaluer le niveau de soutien qu’ils peuvent apporter aux prochains accords internationaux visant à sauvegarder la biodiversité."