2025 est une année de rupture dans la lutte mondiale contre le changement climatique. Alors que certains dirigeants politiques semblent minimiser les conséquences du réchauffement des températures, 2024 est, jusqu’ici, l’année la plus chaude jamais enregistrée ; les aléas climatiques se multiplient et les priorités changent. Le désintérêt de certains pour la cause environnementale ne saurait freiner le réchauffement climatique qui s’emballe.
Si investir dans des politiques d’atténuation, qui visent à décarboner l’économie, reste incontournable, s’adapter à un climat dont le dérèglement paraît inexorable semble de plus en plus urgent. Pour décrypter ces enjeux, ID s’est entretenu avec Pierre Schang, co-responsable du pôle Environnement et Impact chez La Financière de l'Échiquier (LFDE).
Quel est l’ampleur du réchauffement climatique ?
2024 est l’année la plus chaude jamais enregistrée par l’Humanité avec un réchauffement mondial moyen de l’ordre de +1,6°C par rapport à l’ère préindustrielle selon l’observatoire européen du climat, Copernicus (contre +0,6°C en l’an 2000). Même si cette évolution peut paraître minime à première vue, ses implications sont considérables. Comme nous l’avons de nouveau constaté cet été, les températures s’emballent, le climat se dérègle avec des conséquences parfois catastrophiques.
Quelle est la nature des politiques de lutte contre le dérèglement climatique actuellement mises en œuvre dans le monde ?
La stratégie de lutte contre ce réchauffement déployée au cours des 25 dernières années au niveau mondial est chiffrée par Bloomberg NEF à 12 000 milliards de dollars d’investissement (1). Cette stratégie d’atténuation a principalement consisté à investir dans la décarbonation de l’économie. Malgré cet effort historique, les émissions de CO2 ont augmenté d’environ +50 % sur la période 2000-2025, pour atteindre près de 38 milliards de tonnes en 2024 et le réchauffement climatique s’est accéléré. Le risque climatique augmente, le nombre de catastrophes naturelles se multiplie et leur coût est en hausse significative. La déconnexion entre les montants considérables investis dans les stratégies d’atténuation et leur impact sur le réchauffement du climat s’explique par le fait que la décarbonation est un processus long.
Comment combler cette déconnexion ?
Malheureusement, le climat se dérègle plus vite que prévu et s’inscrit dorénavant dans un cycle qui s’autoentretient et se renforce. Les générations actuelles doivent se protéger face au risque climatique croissant en s’y adaptant. Nous constatons aujourd’hui au niveau mondial un fort déséquilibre dans l’allocation des capitaux dédiés à la lutte contre le dérèglement climatique entre d’une part les politiques d’atténuation chiffrées à près de 1 300 milliards de dollars, et d’autre part les politiques d’adaptation, à hauteur de 76 milliards de dollars (2). Il faut comprendre qu’aujourd’hui, lorsqu’on évite l’émission d’une tonne de CO2 par exemple, l’impact sur le réchauffement climatique est incertain. On ne sait pas dans quelle proportion le réchauffement sera réduit, ni qui en bénéficiera. De plus, une action coordonnée au niveau mondial est un prérequis pour maximiser leur portée. Or, la remise en cause actuelle du multilatéralisme fragilise cette coopération internationale. Pour toutes ces raisons, le marché de l’adaptation devrait selon nous progressivement monter en puissance. Les investissements, ciblés géographiquement, bénéficieraient à des populations identifiées avec un impact plus immédiat.
Quelle pourrait être l’ampleur de la croissance des investissements dans l’adaptation ces prochaines années ?
L’urgence climatique pourrait provoquer, au cours des prochaines années/décennies, un rééquilibrage important entre les ressources alloués aux stratégies en faveur de l’adaptation. Le Boston Consulting Group anticipe ainsi au niveau mondial une hausse des flux de capitaux sur le marché de l’adaptation de 76 milliards de dollars en 2022 à 200/400 milliards de dollars en 2025, puis à 500/1300 milliards de dollars en 2030, soit une croissance annuelle moyenne comprise entre +27 % et +43 %.
Les fonds Tocqueville Environnement ISR, dont les encours s’élèvent à près de 870 millions d’euros3, et Tocqueville Global Climate Change ISR cherchent à capter ces opportunités en investissant dans les entreprises qui développent des technologies propres ou offrent des solutions pour améliorer la protection de l’environnement. Nous privilégions également celles qui permettent de décarboner l’économie, ainsi que celles qui proposent des produits et services favorisant l’adaptation à un climat en mutation et/ou une plus grande souveraineté énergétique.
Sur quels secteurs ces investissements vont-ils se concentrer pour répondre à ce besoin d’adaptation au dérèglement du climat ?
Ces investissements viendront répondre au besoin de protection de 5 grandes familles de risques, que sont les sécheresses ; les incendies ; les vagues de chaleur et variations extrêmes de température ; les inondations et la hausse des niveaux des océans et mers, ainsi que les intempéries – tempêtes, ouragans, cyclones…. Ils irrigueront des segments tels que la gestion durable de l’eau, l’assurance et la réassurance climatique, les matériaux résistants aux fortes chaleurs et/ou au feu, les solutions de génération de données climatiques, services d’ingénierie et de conseil environnementaux, systèmes autonomes de génération d’énergie, renforcement ou rénovation d’infrastructures, ou encore agriculture adaptative…
Pour intégrer nos portefeuilles, une entreprise doit passer plusieurs filtres, notamment ESG, sachant que nous excluons de nos investissements les secteurs les plus polluants, comme le secteur minier – et confrontés à des controverses majeures, ainsi que les sociétés impliquées dans des manquements aux droits de l’Homme, à l’environnement ou aux sujets de gouvernance.
Nous gérons actuellement deux fonds détenteurs du label ISR de l’Etat français et un fonds labellisé Greenfin, des labels qui imposent également des critères de sélection stricts ainsi que des exclusions, notamment une note extra-financière minimale. Chaque entreprise de l’univers reçoit une note extra-financière, selon notre méthodologie propriétaire, et si une entreprise reçoit une note inférieure à la moins bonne note de l’univers, nous ne pourrons pas y investir. Nous cherchons à investir dans des entreprises qui développent des technologies propres ou offrent des solutions pour améliorer la protection de l’environnement. Nous privilégions également celles qui permettent de décarboner l’économie, ainsi que celles qui proposent des produits et services favorisant l’adaptation à un climat en mutation et/ou une plus grande souveraineté énergétique.
(1) Au 30.01.2025
(2) En 2022 selon le Climat Policy initiative - octobre 2024
En partenariat avec LFDE.
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