En 2014, la prolifération des algues bleu-vert ont rendu l'eau du lac impropre à la consommation durant plusieurs jours.
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États-Unis : menacé par la pollution, un lac bientôt reconnu comme une entité vivante ?

Le 26 février, les habitants de la ville de Tolède dans l’Ohio ont majoritairement voté "OUI" lors d’un référendum portant sur la question suivante : est-ce que la charte de la ville de Tolède doit être complétée par l'ajout d'une section "Déclaration des droits du lac Erié" ? 

L'objectif de ce projet de loi est d'accorder le statut d'entité vivante au lac, afin de lui accorder des droits propres. Le texte est lisible ici (lien en anglais). Parmi les électeurs, qui n’étaient que 9 % à voter, 61 % ont choisi le "OUI" (le détail des résultats du vote est disponible ici). 

Ce nouveau statut de personnalité juridique aurait vocation à protéger le lac, menacé par la prolifération d’algues bleu-vert causée par la pollution industrielle et agricole. Ces algues sont nocives pour la santé : The Guardian rapporte qu'en 2014, la pollution a rendu l’eau du lac impropre à la consommation pendant trois jours.

D'une portée symbolique vers une application juridique ? 

Si ce vote a principalement une portée symbolique, l’objectif est néanmoins d'en dégager de possibles applications juridiques : les habitants pourraient décider d’engager des poursuites contre les responsables de la pollution, au nom du lac. La charge incombe désormais aux avocats de réfléchir à ce projet et de définir quelle pourrait être son application pratique dans un tribunal. 

L'initiative a été lancée par le mouvement "Les tolédiens pour la protection de l’eau", soutenu par le CELDF (Community Environmental Legal Defense Fund), un cabinet juridique à but non lucratif. La Constitution de l'Ohio garantit en effet aux habitants le droit de proposer des modifications aux chartes des villes. 

Nous vivons dans un système qui considère la nature comme une propriété, appartenant à des personnes et à des entreprises, comme un ensemble de ressources dont on peut tirer profit. Cette vision de la nature a conduit à la crise écologique actuelle. Nous avons besoin d’un changement de paradigme, considérant la nature comme des entités vivantes dont nous dépendons tous. Tish O’Dell, responsable du CELDF pour l’Ohio (propos recueillis par Le Monde). 

Ce référendum a généré plusieurs oppositions : une première poursuite judiciaire a été lancée le 27 février pour remettre en question la légitimité de cette "Déclaration des droits du lac Erié", considérée comme "inconstitutionnelle". La société Drewes Farms Partnership affirme que cette législation pourrait menacer la capacité d’une ferme à fertiliser ses champs, car il serait impossible de garantir qu’aucun produit ne se déversera dans l’eau du lac.