L'Union européenne, dans le cadre de ses efforts de décarbonation, impose qu'une partie croissante des carburants d'aviation soit issue de sources renouvelables.
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Environnement

Carburants non fossiles: les compagnies aériennes européennes évoquent un "délai"

Les grandes compagnies aériennes européennes ont affirmé mardi qu'elles seraient forcées de demander un "délai" face à l'obligation de recourir à davantage de carburants d'origine non fossile, sauf action rapide de la Commission européenne pour en stimuler la production sur le Vieux Continent.

Ces transporteurs, fédérés par le groupe Airlines for Europe (A4E), avaient déjà mis en doute fin mars la faisabilité des objectifs d'incorporation de ces carburants d'aviation durables (en anglais "sustainable aviation fuels", SAF) dans les réservoirs de leurs avions à l'horizon 2030.

L'Union européenne, dans le cadre de ses efforts de décarbonation, impose qu'une partie croissante des carburants d'aviation soit issue de sources renouvelables. Fixée à 2% depuis le début de l'année, la part de SAF doit monter à 6% en 2030 et progressivement jusqu'à 70% en 2050.

Mardi, lors d'une visioconférence de presse depuis Paris, les membres d'A4E ont durci le ton. "Les obligations (d'incorporation) n'ont pas le résultat souhaité", a affirmé au nom de l'association le patron du groupe IAG (British Airways, Iberia), Luis Gallego, pour qui la production de SAF provient surtout de l'extérieur de l'Europe.

"Je pense que la situation va nous forcer à essayer de demander un délai" dans l'application de la feuille de route, a-t-il ajouté, "sauf événement extraordinaire".

A4E, dans un communiqué, a ensuite réclamé à la Commission européenne un "dialogue stratégique" avec le secteur aérien, comparable à celui noué par l'exécutif avec l'industrie automobile, qui espère de son côté un assouplissement de l'interdiction prévue en 2035 de la vente des véhicules neufs à moteur thermique.

A4E représente 17 groupes européens, de Lufthansa à Ryanair en passant par Air France-KLM et easyJet. Tous se sont engagés à parvenir à "zéro émission nette" à l'horizon 2050 comme l'ensemble du secteur aérien mondial.

Celui-ci, qui compte à 65% sur les SAF pour atteindre ces objectifs, contribue actuellement à quelque 3% des émissions de CO2, mais l'effet de son activité sur le réchauffement climatique est plus élevé, car les appareils émettent aussi d'autres gaz et des traînées de condensation.

Les SAF sont élaborés à partir de biomasse, d'huiles usagées et, à terme, à partir d'hydrogène produit grâce à de l'électricité décarbonée, une technique encore coûteuse et complexe.

"Nous appelons à la fois la Commission européenne et les gouvernements nationaux à prendre des mesures décisives, parce que nous avons besoin d'aide pour inciter les grands producteurs d'hydrocarbures" à fournir davantage de SAF, a abondé Kenton Jarvis, directeur général d'easyJet.

A4E a rappelé que ses membres "restaient engagés à décarboner" leurs activités, mais plaidé pour que "cela ne s'effectue pas au détriment de la compétitivité et de voyages aériens accessibles pour tous".

De son côté, Air France-KLM a renouvelé mardi son engagement à "zéro émission nette d'ici à 2050" et rappelé que le groupe figurait "parmi les plus gros acheteurs de SAF", produits pour lesquels il a signé d'importants contrats à long terme avec des énergéticiens.

L'entreprise franco-néerlandaise a souligné qu'elle soutenait les obligations européennes d'incorporation de SAF et n'en demandait pas le report "à l'heure actuelle", mais appelé les autorités à "des mesures immédiates pour assurer un marché du SAF abondant et abordable", et au-delà de subventions, à lutter contre un "dumping" venu de pays extra-européens.

Avec AFP.