Suspendu à 300 mètres au-dessus du 15e arrondissement de Paris, le célèbre ballon de Paris ne se contente plus d’offrir une vue imprenable sur la capitale. Depuis son retour dans le ciel après trois mois d’interruption, cette montgolfière s’est transformée en véritable laboratoire scientifique volant, capable de mesurer avec une extrême précision les principaux gaz responsables du réchauffement climatique.
Des mesures précises
En mars 2024, le ballon Generali avait déjà été doté d’un nouveau système capable de mesurer, entre autres, les émissions de CO2 et de méthane dans l’air parisien. Il venait s’ajouter au LOAC, destiné à la mesure de la quantité de particules fines, ainsi qu’au pisteur d’ozone déjà présent sur le ballon captif.
Il est désormais équipé d’un nouveau capteur dernier cri, développé dans le cadre d’un partenariat avec le programme européen Copernicus. Sa mission : analyser la composition de l’air en détectant la concentration de trois gaz à effet de serre majeurs (le CO2, le méthane et la vapeur d’eau). Bien que naturelle, cette dernière joue un rôle amplificateur dans le réchauffement de l’atmosphère (2 à 3 fois plus que le CO2 selon le GIEC).
Grâce à une montée lente – environ un mètre par seconde – jusqu’à 300 mètres d’altitude, le ballon offre un profil vertical adapté pour effectuer des relevés atmosphériques très fins à différentes hauteurs.
Les avancées techniques au service de la science
La qualité de ces données permet aux chercheurs d’observer les variations locales de pollution, d’identifier les sources d’émission, et même de détecter des concentrations de CO₂ aussi subtiles que "celles produites par l’expiration des passants dans la rue", selon Loic Loigerot, ingénieur de recherche au laboratoire des sciences du climat et de l’environnement (LSCE), dans une interview donnée au média Natura Sciences.
Le dispositif embarqué, fruit de plus de deux ans de travail par des ingénieurs du CNRS et du LSCE, représente une opportunité de suivre l’évolution du climat urbain.
Elle permettra, par exemple, de vérifier si Paris progresse effectivement dans sa politique de décarbonation. Entre 2004 et 2024, les concentrations de dioxyde d’azote ont baissé en moyenne de 50 %, et les concentrations de particules fines de 55 %, selon Airparif.
Un outil pédagogique et un signal d’alerte
Au-delà de ses performances scientifiques, le ballon joue aussi un rôle de sensibilisation. Sa surface arbore désormais le chiffre suivant : 1,56°C, soit le niveau actuel de réchauffement mondial par rapport à l’ère préindustrielle.
En temps réel, il indique également l’augmentation de la température annuelle moyenne comparée à l’ère pré-industrielle dans le monde et en Europe, et l’augmentation de la température mensuelle moyenne en Europe par rapport aux moyennes des périodes 1991-2020.
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Le ballon change même de couleur en fonction du niveau de pollution atmosphérique (du bleu-vert au rouge-violet) la nuit. Un choix provenant de la volonté de la société Aérophile, conceptrice du ballon, d’en faire une attraction durable : pas de brûleur à gaz, mais de l’hélium et un treuil électrique pour réguler l’altitude.
N’importe qui peut d’ailleurs payer pour embarquer dans ce ballon captif, mais il faut d’abord vérifier sur le site Internet que les conditions météorologiques le permettent, sinon le ballon ne prend pas le risque de décoller.
Une surveillance qui intéresse les assureurs
Cette initiative attire par ailleurs l’attention du monde de l’assurance. Sponsor du ballon, le groupe Generali utilise les données collectées pour mieux anticiper les risques liés au climat. L’assureur italien a développé un Climate Lab interne et propose via un QR code sur le ballon une plateforme permettant aux citoyens d’estimer les risques climatiques de leur lieu d’habitation.
En 2024, les catastrophes climatiques en France ont coûté 5 milliards d’euros aux assureurs. C'est la 9e année la plus coûteuse pour les assurances depuis 1982, mais les trois premières restent 2023, 2022 et 1999. Une nette augmentation remarquée par le rapport annuel de France Assureurs en 2023.
Selon celui-ci, pendant les années 2000 à 2008, les catastrophes climatiques en France ont coûté en moyenne 2,7 milliards d’euros par an. Entre 2010 et 2019, ce coût moyen est passé à 3,7 milliards et entre 2020 et 2024, la moyenne est passée à 5,6 milliards.