Lyon pourrait connaître 36 jours de canicule par an à l'horizon 2050.
© Léo Crouzille / Unsplash
Climat

Les villes à l'épreuve des îlots de chaleur urbains

Au coeur de l'urgence d'adaptation des villes au réchauffement climatique : l'îlot de chaleur urbain. Il surchauffe les villes de deux degrés de plus en journée, dix la nuit, par rapport aux zones rurales. 

D'ici 2050, la capitale des Gones pourrait vivre 36 jours de canicule par an. Le climat devrait profondément s'y transformer pour s'approcher des températures moyennes de Madrid ou Alger, la mer en moins. Principalement en cause, les îlots de chaleur urbains qui enclavent les villes, jours et nuits, dans des chaleurs étouffantes, impossibles à évacuer. De plus en plus, les agglomérations européennes prennent le problème aux enjeux multiples à bras-le-corps. 

Les bâtiments, importants producteurs de chaleur

Le GIEC définit les îlots de chaleur comme "une zone urbaine où la température ambiante est supérieure à celle des zones rurales environnantes et où l'on observe également des changements dans l'écoulement, des effets de rétention de chaleur et des modifications de l'albédo de surface". En clair, "les îlots de chaleur urbains entraînent une élévation des températures de l'air et de surface des villes pouvant grimper jusqu'à 10 degrés la nuit de plus que dans les communes environnantes péri-urbaines", résume Léona Trouvé, cheffe de projet aménagement au Cerema (Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement). Ainsi, les effets du changement climatique sont plus intensément ressentis en agglomération, précipitant l'urgence d'adaptation des villes. 

En journée, les matières minérales telles que le béton, les briques, la pierre, stockent 15 à 30 % de plus de chaleur que les espaces moins denses en bâtiments. Une chaleur qu'ils emmagasinent le jour et rejettent la nuit. Ajouté à cela la morphologie urbaine (voies de circulation très larges, un revêtement urbain bétonné, des immeubles très hauts), et les activités humaines de climatisation, de circulation automobile produisant elles aussi de la chaleur.

Une chaleur multipliée la nuit 

Seulement, la densité du bâti et du tissu urbain ne permettant pas la circulation du vent, la surchauffe des villes s'amplifie la nuit. A contrario, en zones rurales et villes moins denses, les courants d'air ne sont pas obstrués par les immeubles hauts et peuvent, à défaut, renouveler l'air et abaisser la température la nuit. Ces dernières doivent néanmoins aussi répondre au confort thermique

Par conséquent, les villes deviennent des microclimats artificiels à elles seules. Le phénomène d'îlots de chaleur urbain intensifie aussi les nuits tropicales. L'îlot de chaleur urbain n'en est pas moins "un phénomène météorologique qu'il est réduit en présence de précipitations, de ciel nuageux, ou des températures plus faibles". 

Des enjeux pluriels 

Si les premières réflexions sur les conséquences des vagues de chaleur en ville ont été amenées par la canicule meurtrière de 2003, l'îlot de chaleur urbain porte en réalité des préoccupations larges. Comme un dôme de chaleur recouvrant la ville, il entraîne aussi des perturbations pour la biodiversité. À terme, les cycles biologiques des espèces de végétaux peuvent être modifiés. "Même avec un degré supplémentaire, les fleurs fleuriront plus tôt et les pollinisateurs ne seront pas parvenus à s'adapter", illustre Léona Trouvé. 

Outre l'îlot de chaleur urbain de canopée, les villes sont confrontées dans le même temps "aux îlots de chaleur souterrains qui fragilisent les infrastructures telles que les parkings, ou les ouvrages géothermiques, et assèche les nappes phréatiques". Léona Trouvé poursuit : "Dans ces cas, on peut avoir des écarts de températures de près de 25 degrés, pouvant causer du retrait-gonflement des sols."

Quelles stratégies d'adaptation ? 

Lyon, une des villes pionnières de l'adaptation aux îlots de chaleur urbains, est devenue un laboratoire d'aménagement de l'urbanisme. Le spectre des 50 degrés dans les prochaines décennies s'agitant, la mairie écologiste de Grégory Doucet (EELV) s'empresse de végétaliser ses avenues et ses quais, et de réaménager la voirie. "L'avenue Garibaldi a connu un aménagement incomparable avec des fossés de récupération d'eau de ruissellement et une voirie repensée. On a aussi de très beaux exemples à Nantes Métropole, Strasbourg, Rodez", remarque Léona Trouvé.

À Angoulême (Charente) des ateliers de co-construction ont été proposés aux parties prenantes pour "engager une réflexion sur la définition de la ville et de son adaptation afin de mettre en dialogue les acteurs. Les problématiques liées à l'îlot de chaleur urbain montrent que les solutions doivent être transversales".

Au-delà des stratégies de végétalisation et de revêtement des surfaces qui sont des chantiers longs, puisque "les temps d'études sont incompressibles", des projets palliatifs tels que des toiles d'ombrages ou des jardins temporaires peuvent être mis en place par les collectivités. 

Alors que la résilience des villes est mise à l'épreuve par le réchauffement climatique, un quart de la France entre le 19 août dans un nouvel épisode de canicule

Vous avez apprécié cette information ? Abonnez-vous à notre newsletter en cliquant ici !  

Pour aller plus loin et agir à votre échelle, découvrez notre guide Idées Pratiques #12 : "Ecologie : gagner plus, dépenser moins”. 

Au sommaire : enjeux, analyses, entretien décryptages... 68 pages pour associer économies avec écologie ! 


Cliquez ici pour découvrir et commander votre guide Idées Pratiques. 

#TousActeurs