L’achat compulsif, ou oniomanie, est identifié comme une addiction.
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Comment modifier les comportements des consommateurs face à la fast fashion ?

Alors que l'Assemblée nationale vient de voter une loi ciblant la fast fashion, ID s'intéresse à l'addiction aux achats, réelle maladie psychologique. Elle peut être apaisée par des thérapies individuelles, mais en s'inscrivant dans une évolution des pratiques commerciales et des rapports à la consommation.

La proposition de loi ciblant la fast fashion a été votée à l'unanimité à l’Assemblée nationale jeudi 14 mars. Les enseignes concernées, qui proposent des stocks sans cesse renouvelés à des prix très faibles, devront payer un malus environnemental sur chaque vêtement vendu, selon des critères à définir par décret.

En effet, en plus de son impact social, la fast fashion a un coût environnemental très important. Selon l'Ademe, l'industrie textile est la plus polluante au monde, émettant 4 milliards de tonnes de CO2 par an. La production des matières premières, la fabrication, la teinture et le transport sont autant d’étapes nocives pour la planète.

Or, les consommateurs de fast fashion achètent parfois de manière impulsive, encouragés par leur environnement. Florine Nottet, directrice et fondatrice de la Clinique en santé psychologique et dépendance Synergilibre, rappelle que l’achat compulsif, ou oniomanie, est identifié comme une addiction"On retrouve les mécanismes classiques : le déni, le réconfort, la culpabilité… Comme les autres addictions, on peut l’accompagner et le traiter", déclare-t-elle à ID.

Un travail individuel

Pour ce faire, plusieurs techniques peuvent être mises en place au niveau personnel. La clinique se base sur deux niveaux d’aide : "Le premier niveau, profond, nécessite une thérapie avec un psychologue. L’objectif est de comprendre ce qui, dans le passé de la personne, a mené au développement de ce comportement", explique Florine Nottet. Elle précise qu’en plus de la médecine classique, d’autres techniques alternatives comme l’hypnose ou la naturopathie peuvent également aider à identifier des causes.

"Le deuxième niveau vise à mettre en place un filet de sécurité", ajoute-t-elle. Cette technique consiste à identifier les instants où le comportement impulsif intervient, pour essayer de prendre du recul et comprendre son émotion. Ensuite, la personne choisit un moyen d’éviter le comportement addictif. "L’exutoire dépend de chacun : il peut s’agir de l’écriture, de la marche ou la relaxation, d’un appel à un proche ou à un numéro spécialisé…", liste Florine Nottet.

Un effort partagé de l‘industrie textile…

En revanche, l’experte affirme qu’"une addiction n’est jamais issue de l’individu seul, mais liée à son environnement de vie". En effet, les méthodes de marketing de la fast-fashion encouragent la consommation de masse. La directrice de clinique cite par exemple les promotions envoyées dès que l’on met un article dans son panier virtuel. "Le consommateur croit qu'il s'agit d'une promotion classique, alors qu’elle lui est personnellement destinée : cela pousse à acheter".

On fait la promotion des achats compulsifs, mais pas des solutions pour soigner ce mal

Ce marketing est aussi ciblé par la loi. En plus du malus, elle prévoit d'interdire la publicité pour les enseignes de fast-fashion, identifiée comme trop agressive par les porteurs du projet. Un "très bon début", selon la directrice de clinique. Elle déplore que ces enseignes bénéficient d’un bon référencement sur internet, alors que les cliniques comme la sienne sont difficiles à trouver. "On fait la promotion des achats compulsifs, mais pas des solutions pour soigner ce mal", ironise-t-elle.

… et de la société tout entière.

Outre l’effort de l’industrie textile, Florine Nottet identifie un problème lié à la société en général. "D’une part, car elle est basée sur la consommation. D’autre part, car la pression sociale est forte, surtout envers les femmes, qui se sentent implicitement obligées d’être coquettes", déplore-t-elle. En effet, environ 80 % des patients souffrant d’achats compulsifs accueillis par la clinique sont des femmes.

Pour pallier cela, l’experte prône une sensibilisation aux inégalités de genre, afin que la pression subie par les femmes au sujet de leur apparence diminue. Elle considère aussi important de revoir nos rapports à la consommation. "Il serait intéressant de revenir à des basiques, et de favoriser la seconde main", analyse-t-elle. En effet, bien que ce marché connaisse une croissance de 12 % par an, la production de textile neuf continue d'augmenter. En 2022, 18 % de vêtements en plus ont été mis sur le marché en France, par rapport à 2021.

Enfin, dans une approche plus psychologique, Florine Nottet recommande de réfléchir à d’autres manières de s’épanouir en dehors de la consommation : "les personnes victimes d'un trouble d’achats compulsifs essaient de combler un vide. Or, il pourrait être satisfait par de la reconnaissance, de la bienveillance… La société a un rôle à jouer là-dessus", conclut-elle.

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