"Votre patron n'est pas un algorithme": les coursiers adoptent la coopérative

A peine à ses débuts chez les chauffeurs de VTC, le modèle de la société coopérative a déjà essaimé avec succès chez les coursiers à vélo, des livreurs plus flexibles et insérés dans le tissu local.

Début 2022, 500 chauffeurs s'associeront dans une société coopérative (SCIC) en Ile-de-France, une première à grande échelle dans un secteur qui n'a pas encore connu de réussite durable.

Chez les coursiers, en revanche, des dizaines de coopératives ont fleuri ces derniers mois, portées par l'essor de la livraison à domicile lors des confinements.

"Ce n'est ni la même économie, ni le même marché que celui des VTC, explique l'avocat Jérôme Giusti, reconnaissant une plus grande souplesse dans les coopératives de coursiers.

Trente-cinq d'entre elles appartiennent à la fédération Coopcycle, qui accompagne les livreurs tentés par un modèle plus protecteur et à taille plus humaine.

Débutant sous forme d'association, elles doivent s'engager à passer en société coopérative (Scop) et à salarier les livreurs au bout de deux ans, précise le coordinateur de Coopcyle, Adrien Claude.

C'est le cas de Kooglof!, créée il y a un an à Strasbourg par une poignée de livreurs auto-entrepreneurs, un projet alternatif qui se finance grâce aux commissions et aux frais de livraison.

"On ne s'attendait pas à un tel engouement, ni que Kooglof! soit rentable dès le premier jour", s'étonne son cofondateur Valentin Campana, qui avait travaillé comme coursier pour des plateformes comme JustEat ou Uber Eats.

Plus que l'envie d'augmenter son salaire, c'est la volonté de redonner du sens à son travail qui pousse les livreurs à rompre avec les géants du secteur comme Deliveroo.

"Votre patron, ce n'est pas votre téléphone ou un algorithme qui vous dit quoi faire. Il y a une vraie personne aux manettes, qui va faire l'intermédiaire entre les coursiers, les restaurants, ce qui recrée du lien social", se réjouit Valentin Campana.

Exit les algorithmes opaques et les services clients délocalisés: les coopératives misent sur la promotion locale, avec leurs propres plateformes et des échanges directs avec les commerçants.

"C'est un service +premium+: on prend soin des restaurants, des consommateurs et des livreurs", revendique Adrien Claude. De quoi selon lui rendre les coursiers "plus soucieux" du service, et attirer des clients de plus en plus critiques des plateformes.

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