UTMB: la folie "n'est pas un prérequis" pour l'auteur Adharanand Finn

Comment tombe-t-on dans l'ultra-trail, ce "sport de dingues" ? Pour Adharanand Finn, qui vient de publier un livre-enquête sur ce sujet et dispute lui-même l'une des courses de l'UTMB vendredi autour du Mont-Blanc, la folie "n'est pas un prérequis".

Marathonien convaincu, ce fils de "hippies" irlandais dont le prénom signifie "félicité éternelle" en sanscrit ne pensait pas à l'origine verser à son tour dans ce sport extrême, qu'il décrit comme "un besoin irrépressible, un désir profond et primitif d'aller braver la mort et d'en revenir", dans son ouvrage ("Les Ultraterrestres", éditions Guérin).

Le livre relate avec verve et humour sa fascination croissante pour ce phénomène mondial, qui le pousse à participer en 2018 au saint des saints de la discipline: l'Ultra-trail du Mont-Blanc et ses 171 km et 10.000 mètres de dénivelé positif: "l'épicentre, le coeur battant de l'ultra-trail, la clé du mystère", selon lui.

"J'ai été très près d'abandonner" à l'époque, admet M. Finn, âgé aujourd'hui de 48 ans, lors d'une rencontre à Chamonix en marge de l'édition 2022 de la course. "Juste après l'UTMB (...) j'aurais préféré perdre un bras que de courir un autre ultra", plaisante-t-il, admettant que deux jours plus tard, ce sentiment s'était déjà évaporé.

Il a depuis couru plusieurs ultra-trails, au cours desquels il s'est parfois "fait peur", avec de dangereuses hallucinations dues à la privation de sommeil.

"Je raconte dans mon livre une série de courses où tout va de travers. Je me disais que les gens allaient me croire bon à rien mais il s'avère que c'est une expérience très commune, à laquelle ils peuvent s'identifier", sourit-il.

- "Sortir de cette vie confortable" -

L'ultra-trail "attire beaucoup de dingues" mais "fou n'est pas le bon mot" pour les décrire, estime-t-il.

"Beaucoup de gens ont des histoires dramatiques, ils ont eu des addictions dans leurs vies antérieures. C'est obsessionnel car c'est quelque chose d'assez extrême mais ce n'est pas un prérequis".

"Ils ont quelque chose de fort dans leur esprit, une véritable détermination, de la volonté ou de l'entêtement".

L'un des attraits de l'ultra-trail est de "vous sortir de cette vie confortable, surtout en Occident" et de se rapprocher du monde sauvage, souligne-t-il. Mais, reconnaît-il, "ce n'est pas pour tout le monde".

Adharanand Finn devait être au départ vendredi matin à Courmayeur (Italie) pour la CCC, parfois décrite comme la "petite soeur de l'UTMB" avec 100 km de distance et 6.100 mètres de dénivelé positif.

Il se dit "optimiste de pouvoir terminer tranquillement, mais pas très vite". "Je ne suis pas aussi en forme (qu'en 2018) mais mon mental est meilleur", explique-t-il.

Comment en est-il arrivé là, lui, l'auto-proclamé "puriste" qui ne jurait que par le marathon ? Il y a d'abord une commande du quotidien Financial Times pour participer au Oman Desert Marathon, "165 km de désert brûlant", qu'il commence par refuser fermement avant de se raviser.

Puis la remarque d'un collègue du journal The Guardian, au détour de la machine à café, qui s'étonne qu'il ne fasse "que des marathons" mais pas de courses ultra ou de triathlon.

"Avant, courir un marathon c'était important, tout le monde était impressionné, et maintenant c'est +seulement des marathons+. Là j'ai réalisé qu'il y avait ce nouveau truc, cet autre monde que je n'avais pas exploré", s'amuse le journaliste, qui a signé ces dernières années deux autres livres sur la course à pied au Kenya et au Japon.

Prochaine étape de son parcours - et prochain livre: la Self-Transcendence 3,100, un ultra-marathon de 4.988 km (3.100 miles), considéré comme la plus longue course au monde.

Ca se déroule dans le quartier de Queens à New York et, rigole-t-il, ça doit impérativement se boucler "en moins de 52 jours".