Des effets déjà visibles d'un côté, une franche résistance de l'autre: un mois après son entrée en vigueur, le stationnement payant des deux-roues motorisés thermiques divise encore à Paris, où ses opposants soulignent des effets pervers.
"C'est insuffisant mais pour un début, c'est plutôt encourageant." David Belliard, l'adjoint aux transports de la maire Anne Hidalgo, a trouvé son équilibre en annonçant à l'AFP qu'environ 40% des deux-roues motorisés se trouvaient en règle, au bout d'un mois, sur les 42.000 places de stationnement dédiées de la capitale.
En règle, c'est-à-dire s'acquittant soit du tarif visiteur - deux ou trois euros pour une heure, jusqu'à 37,50 euros pour six heures -, soit d'un tarif préférentiel pour abonnés, résidents ou professionnels, soit de la gratuité réservée aux véhicules électriques ou aux personnes handicapées.
Pour les autres, les deux opérateurs privés chargés du contrôle, Moovia et Streeteo, ont déjà établi 65.000 forfaits post-stationnement (FPS), qui remplacent depuis 2018 les contraventions, selon M. Belliard.
Pour l'élu écologiste, cette mesure, ouvertement destinée à limiter le nombre de ces véhicules dans l'espace public, et donc leur pollution aérienne et sonore, s'applique "correctement sur le terrain" et sans "gros incidents" pour les 100.000 conducteurs dans la capitale.
"Il y a moins de tensions que ce qu'on pouvait craindre", affirme-t-il.
- Mairie "débordée" -
Tous les lundis, les Motards en colère manifestent pourtant devant l'Hôtel de Ville pour dénoncer une mesure "discriminatoire" vis-à-vis des banlieusards et "inadaptée en termes de mobilités", souligne Jean-Marc Belotti, leur coordinateur à Paris et en petite couronne.
Pour le motard, la mesure n'est "pas respectée" dans son ensemble, et pas seulement par des adeptes de la "désobéissance civique": "on a des retours de gens qui veulent jouer le jeu et qui ne peuvent pas parce que la mairie est complètement débordée", affirme-t-il.
Ouvert depuis fin juin, le service d'enregistrement des véhicules pour bénéficier d'un tarif préférentiel ou conserver la gratuité a connu un engorgement prévisible à la rentrée. "C'est une vraie usine à gaz", déplore l'élu d'opposition (LR et apparentés) Nicolas Jeanneté qui fustige "le manque de préparation" de la mairie.
Favorable à la mesure, la députée Maud Gatel (MoDem) souligne que beaucoup de propriétaires encore non référencés "ne prennent plus" leur véhicule par peur des amendes.
De plus, "des professions sont laissées de côté" pour les abonnements, abonde cette opposante à Anne Hidalgo qui souhaite que tous les professionnels, "y compris ceux de grande couronne", puissent en bénéficier.
La mise en route des services de la ville "a pu être difficile" avec un "petit retard", reconnaît David Belliard, mais ils ont depuis "fini de traiter le gros des demandes" avec plus de 22.000 tarifs préférentiels ou gratuités déjà accordés, affirme-t-il.
Reste le débat autour de tarifs jugés "exorbitants" par M. Jeanneté. "Pour une mairie socialiste, c'est n'importe quoi", dit M. Belotti pour qui la mesure fera revenir les gens vers la voiture, où "ils peuvent travailler et sont protégés de la pluie et du froid".
- "Cela m'a fait changer" -
Croisé dans le centre de Paris sur son scooter 300 cm3, un homme âgé de 62 ans - il refuse de donner son nom - affirme qu'il ne "paiera pas" le stationnement. "Je comprends que ça pollue mais c'est un braquage", dit-il.
Avec cette mesure, qui doit lui rapporter autour de 30 millions d'euros, la mairie veut surtout "inciter à utiliser un véhicule moins polluant". Pari réussi avec Guillaume, 30 ans, habitant de Levallois-Perret qui utilise désormais le vélo en semaine.
"Cela m'a fait changer, je me plie aux règles", dit cet entrepreneur qui ne sait pas s'il aura le courage de pédaler au coeur de l'hiver...
"Il y a beaucoup moins de deux-roues motorisés" depuis un mois, se félicite Franck-Olivier Torro, porte-parole du collectif "Ras le scoot" pour qui le stationnement payant a bien entraîné "un report vers d'autres modes de transport plus vertueux", comme le scooter ou la voiture électrique.
Le militant anti-motos rappelle que "quand le stationnement des voitures est devenu payant", en 1971, "tout le monde a protesté et après, c'est entré dans les moeurs".