Une "bouffée d'oxygène" pour les pêcheurs, un "soulagement" pour les éleveurs: le gouvernement a annoncé mercredi des aides ciblées pour encaisser la flambée des prix du carburant des bateaux et de l'alimentation des animaux, accentuée par la guerre en Ukraine.
Pour les pêcheurs, "le gouvernement apportera une aide financière exceptionnelle équivalente à 35 centimes par litre de gazole de pêche" jusqu'à fin juillet, a déclaré Jean Castex lors de la présentation du "plan de résilience" pour aider les entreprises à faire face aux conséquences économiques de la guerre en Ukraine.
"Le dispositif sera ouvert dès demain (jeudi, ndlr) matin, pour que tous les bateaux déclarés puissent reprendre la mer au plus vite avec l'assurance de bénéficier du dispositif de soutien", a ajouté le chef du gouvernement.
Cette mesure est estimée entre 20 et 25 millions d'euros pour les finances publiques, a précisé Matignon un peu plus tard.
"On avait besoin d'air, c'est une bouffée d'oxygène", a réagi Jean-Luc Hall, directeur général du Comité national des pêches, joint par l'AFP. "Avec 35 centimes par litre de gazole, les pêcheurs peuvent repartir en mer. On retrouve des conditions de rentabilité acceptables", a-t-il dit.
Les pêcheurs, qui ne paient pas de taxes sur les carburants, achètent actuellement le litre de gazole autour de un euro et estiment dépasser leur seuil de rentabilité au-delà de 60 centimes.
"Cela va redonner un peu plus de viabilité aux entreprises, des salaires un peu plus décents aux équipages parce que depuis un mois ils étaient au ras des pâquerettes -1.000 euros par mois voire moins pour certaines entreprises. C'était devenu très compliqué", a souligné Olivier Leprêtre, président du comité des pêches des Hauts-de-France.
"D'après les retours que j'ai, les professionnels sont satisfaits, ils ont hâte de repartir en mer", a rapporté Olivier Le Nezet, président du comité des pêches de Bretagne.
"A chaud comme ça, je trouve que c'est une très bonne nouvelle. Maintenant c'est pour quatre mois il va donc falloir trouver des mécanismes pour avoir quelque chose qui dure dans le temps", remarque depuis Loctudy (Finistère) le patron de pêche Stéphane Pochic, à la tête de onze chalutiers.
- Réouverture des négociations commerciales ? -
Le gouvernement a par ailleurs annoncé que l'État allait soutenir, pendant quatre mois, la trésorerie des éleveurs "fortement dépendants d'achats d'aliments" pour nourrir leurs bêtes "et qui connaîtront des pertes" liées à l'envolée du prix de ces aliments, a précisé le ministre de l'Agriculture Julien Denormandie.
"Un maximum de 400 millions d'euros seront alloués à cette aide" dont les premiers versements interviendront "sous deux mois", a-t-il ajouté.
La présidente du syndicat agricole majoritaire FNSEA, Christiane Lambert, a indiqué à l'AFP qu'elle attendait de savoir exactement "ceux qui seront concernés" par cette aide.
Plus globalement, les agriculteurs bénéficieront d'un remboursement anticipé de la taxe sur les carburants (TICPE) sur leurs achats du gazole non routier (GNR) qui alimente leurs tracteurs.
Représentant des 2.200 coopératives agricoles françaises, Dominique Chargé se dit "satisfait" de voir que "l'ensemble des sujets considérés comme problématiques -énergie, nutrition animale- ont été pris en compte". "Il faudra ensuite examiner dans le détail les annonces", a-t-il ajouté.
Le ministre de l'Agriculture a par ailleurs appelé à rouvrir des négociations commerciales entre la grande distribution et l'agroalimentaire qui déterminent le prix des produits mis en rayon. Les dernières se sont achevées le 1er mars.
"Compte tenu de la modification substantielle des conditions économiques, les distributeurs doivent adapter les contrats les liant à de nombreux fournisseurs", afin de prendre en compte les multiples hausses touchant leurs coûts de production, a dit Julien Denormandie.
Pour Dominique Chargé, la réouverture des négociations commerciales est une "nécessité absolue" car "il y a mécaniquement une hausse des coûts de production qui devra être répercutée vers nos clients".
"C'est capital qu'elles rouvrent", affirme aussi Mme Lambert, jugeant nécessaire un "deuxième train de hausse par rapport à l'explosion des charges liée à la guerre en Ukraine".
"Il va falloir oser parler de hausses substantielles" du prix de l'alimentation, prévient-elle.