Arrêt à la demande, billets achetables par SMS, train-études innovant: le Limousin multiplie les expérimentations pour redynamiser les petites lignes ferroviaires, à l'avenir assombri par un rapport controversé de 2018.
À la gare de Meymac-Jassonneix, en Haute-Corrèze, les TER ne s'arrêtent pas. Sauf exception: si le conducteur aperçoit un usager sur le quai lever la main ou si un passager signale au contrôleur qu'il souhaite descendre.
"C'est comme si l'on prenait le bus! Ça permet de nous donner l'habitude de prendre le train pour aller dans certaines grandes villes", se félicite Brigitte, retraitée, devenue une habituée de la ligne.
Le dispositif qui existe également en Bretagne sur la ligne Carhaix-Guingamp, a été expérimenté pendant près d'un an par la Région Nouvelle-Aquitaine et la SNCF avant d'être pérennisé sur deux lignes fin 2023.
"Des personnes l'utilisent régulièrement, c'est passé dans les habitudes de transport de certains. Ça rend vraiment un service", applaudit Philippe Brugère, maire de Meymac, qui tient à souligner que "l'idée vient des élus du terrain à la base".
- "Héritées d'un temps révolu" -
La SNCF a sélectionné des gares "où il y a peu de fréquentation, de manière à maintenir les dessertes et voir si l'on était capables de faire un dispositif innovant", explique Benoît Reiner, directeur territorial de Lignes TER Nouvelle-Aquitaine.
Parmi les autres conditions requises, il faut aussi des sections de ligne limitées à environ 80km/h pour faciliter un arrêt tardif, une signalisation en gare adaptée et un volume de circulation réduit afin d'assurer la sécurité des usagers aux abords de la voie sur le quai.
L'expérimentation a permis d'être "rassurés d'un point de vue technique car c'est un nouveau geste métier pour les agents conducteurs et les contrôleurs", souligne M. Reiner.
Son succès est salué par la Région Nouvelle-Aquitaine qui tient à revitaliser ces petites lignes, dont l'existence semblait menacée il y a six ans par la publication d'un rapport de Jean-Cyril Spinetta.
L'ancien patron d'Air France proposait de procéder à un audit socioéconomique avant tout nouvel investissement sur ces 9.000 km de lignes "héritées d'un temps révolu" selon lui, qui représentent le tiers du réseau national mais seulement 2% du trafic.
"Il faut qu'on innove dans le ferroviaire, pour des raisons de sécurisation de la signalisation mais aussi de coût parce que le coût de réouverture, de régénération ou de modernisation est hors de prix", plaide au contraire Alain Rousset, président du conseil régional néo-aquitain.
- "Trains allégés" -
Ce grand promoteur du train veut "assouplir le fonctionnement du trafic ferroviaire ou bien basculer vers les trains électriques ou allégés".
Ainsi, depuis le 18 mars, circule en service commercial sur plusieurs lignes limousines le TELLi (Train Léger Innovant), développé dans le ferrocampus de Saintes en Charente-Maritime.
"Il s'agit d'un train-études pour moderniser les TER. L'idée est d'acquérir un flux de données en temps réel avec des caméras et des radars, afin de définir de nouveaux process pour développer des innovations technologiques sur ces trains", détaille Alain Rousset.
Ces nouveaux trains "décarbonés avec batteries embarquées et solution hydrogène" pourraient transporter des passagers dès 2029.
Autre expérimentation de la SNCF dans ce territoire majoritairement rural: l'achat de billet par SMS, notamment sur la ligne Limoges-Felletin. Le client textote au 93330 les trois premières lettres de sa gare de départ. Les instructions arrivent en retour: indiquer les trois premières lettres de sa gare d'arrivée, choisir son tarif et enfin valider l'achat.
"C'est un test réussi!, se félicite Benoit Reiner. Ça permet d'acheter sans carte bancaire car c'est directement prélevé sur le forfait téléphonique."
Ces dispositifs pourraient s'étendre à d'autres régions, sans représenter pour autant la solution miracle pour sauver certaines lignes du réseau.
"L'achat par SMS, c'est plus pour faciliter. Il n'y a pas l'ambition de doubler la fréquentation. Et pour l'arrêt à la demande, l'objectif est de maintenir des dessertes. C'est un bon début", estime M. Reiner.