Le décret d'application de la loi adoptée en juillet pour lutter contre le dumping social de certaines compagnies de ferries entre la Grande-Bretagne et la France a été signé mardi par le secrétaire d'Etat français à la Mer, Hervé Berville.
Désormais, toutes les compagnies opérant sur la liaison transmanche seront tenues de respecter le droit du travail français, garantissant un salaire minimum et une limitation du temps de travail des marins.
Sont visées notamment les compagnies Irish Ferries et P&O Ferries, dont les navires battent pavillon chypriote et qui embauchent des marins originaires de pays extracommunautaires, souvent asiatiques.
Ces derniers sont payés largement en dessous du salaire minimum et peuvent travailler jusqu'à 17 semaines d'affilée, sans jour de pause, contre deux semaines selon le droit français.
"On ne pourra plus payer un marin en dessous du minimum légal, on ne pourra plus avoir de marins qui travaillent trois mois sans un jour de repos", a souligné M. Berville, qui a signé le décret - très attendu par le secteur - en présence des patrons de Brittany Ferries et de Getlink - qui exploite le tunnel sous la Manche - ou encore des représentants syndicaux des différentes compagnies.
P&O avait fait scandale au printemps 2022 en licenciant sans préavis près de 800 marins, avant d'embaucher des travailleurs extracommunautaires à bas coût.
La loi française impose désormais des minima hiérarchiques pour la détermination du salaire des marins, quel que soit le pavillon des navires transporteurs de passagers. Elle limite également le temps d'embarquement qui doit être, au plus, équivalent au temps de repos à terre.
En cas de manquement, les compagnies s'exposent à des amendes pouvant aller jusqu'à 4.000 euros par marin concerné, ainsi qu'à des sanctions pénales. Cette loi s'applique à tout navire qui effectue au moins 120 "touchers" par an dans les ports français - soit ceux qui opèrent des liaisons régulières entre la France et la Grande-Bretagne.
Getlink comme Brittany Ferries ont déploré avoir perdu des parts de marché au profit des compagnies ayant mis en place un modèle low-cost, désormais considéré comme illégal.
"J'espère que les deux opérateurs ont compris que la France ne reculera pas", s'est réjoui le président de Brittany Ferries, Jean-Marc Roué.
"L'entrée en vigueur de la loi (...) représente une avancée décisive vers le retour à des conditions de concurrence loyale entre les différents opérateurs du transport transmanche", a salué le directeur général de Getlink, Yann Leriche, cité dans un communiqué. Il attend "désormais le respect de ces textes par tous les acteurs de notre marché".
Les défenseurs de cette législation souhaitent maintenant porter ce combat sur la scène européenne pour harmoniser les conditions sociales des "gens de mer" (toutes les personnes, salariées ou non salariées, exerçant à bord une activité professionnelle).
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