Tennis et changement climatique: des initiatives disparates plutôt qu'un plan d'ensemble

Bilans carbone, compensation des émissions, objectifs chiffrés: les acteurs du tennis mondial ont commencé à agir à des degrés divers contre le changement climatique, une mobilisation aussi fragmentée que les instances de gouvernance sont nombreuses.

ATP

Sur le circuit masculin, l'ATP a publié à l'été 2024 son premier rapport sur le développement durable.

Dans ce document, l'organisation qui chapeaute le circuit masculin publie pour la première fois une évaluation de ses émissions de gaz à effet de serre.

En excluant les émissions considérables liées aux déplacements des centaines de joueurs du circuit allant de tournoi en tournoi sur toute la surface du globe, l'ATP revendique un bilan carbone de 6.381 tonnes équivalent CO2 pour l'année 2023, "en hausse de 58%" sur un an.

Elle vise une réduction de 50% de ses émissions en 2030 par rapport à 2022, et la compensation de l'intégralité de ses émissions (neutralité carbone) d'ici 2040.

L'ATP a par ailleurs lancé en 2023 le "Carbon Tracker", une application qui permet aux joueurs de mesurer les émissions générées par leurs voyages et de les compenser en investissant dans des projets favorables à l'environnement.

En 2023, 201 joueurs ont renseigné leurs voyages dans l'application et 583 trajets ont été compensés. L'année d'après, ce nombre est tombé à "un peu plus de 100 joueurs", selon l'ATP.

WTA

Contrairement à l'ATP, l'organisation responsable du circuit féminin n'a pas publié de rapport de développement durable, ni chiffré ses émissions.

La WTA souligne privilégier le "dialogue" avec les joueuses et les organisateurs de tournoi, et l'incitation plutôt que la contrainte.

Elle encourage par exemple les tournois à réduire l'usage d'articles en plastique à usage unique, à installer des bornes de recharge pour les véhicules électriques, à distribuer les repas non consommés à des associations ou à adopter un éclairage LED.

Les joueuses sont invitées elles à privilégier l'usage de gourdes plutôt que de bouteilles en plastique ou à réserver des hôtels qui ne nettoient pas chaque jour les chambres, les draps ou le linge de toilette.

En France, le tournoi WTA 500 de Strasbourg mesure périodiquement ses émissions de carbone depuis 2009 et a mis en place plusieurs initiatives pour inciter ses spectateurs à utiliser des moyens de transports écologiques pour se rendre sur le site du tournoi: déduction de la valeur du ticket de tram ou de bus du prix du billet, parking gratuit pour les spectateurs venus en covoiturage...

Investir dans l'écoresponsabilité "coûte un peu d'argent au début, mais après, ça devient un atout marketing", souligne auprès de l'AFP le directeur du tournoi, Denis Naegelen.

ITF

Organisatrice de la Coupe Davis et de la Billie Jean King Cup, la Fédération internationale de tennis (ITF) a publié en 2022 un premier bilan carbone pour l'année 2021 qui n'inclut pas les émissions générées par ces deux compétitions par les équipes nationales.

L'ITF les a entre-temps mesurées lors des éditions 2023 et 2024, mais a choisi de ne pas les publier, jugeant auprès de l'AFP être encore "dans une phase d'apprentissage".

L'organisation a pour le reste lancé en 2022 un groupe de travail sur la durabilité des équipements, qui réunit dix équipementiers sportifs, les Fédérations française (FFT) et américaine (USTA) de tennis et l'ATP.

L'ITF travaille aussi à des modèles de balles plus durables et a conçu de premiers prototypes. Elle a enfin uni ses forces aux instances de la voile, du cyclisme et du biathlon pour travailler au réemploi et au recyclage des fibres de carbone présentes notamment dans les raquettes.

Grand Chelem

L'Open d'Australie, Roland-Garros, Wimbledon et l'US Open ont tous quatre adhéré en 2019 au "Cadre de l'action climatique dans le sport", une initiative de l'ONU qui les engage à "déployer des efforts systématiques pour promouvoir une plus grande responsabilité environnementale, réduire leur empreinte écologique globale, éduquer à l'action climatique, promouvoir une consommation durable et responsable et plaider en faveur de l'action climatique".

Pour la responsable RSE (responsabilité sociétale des entreprises) de la FFT Claire Hallé, "en ayant une organisation plus éclatée, avec plein de têtes différentes et des décisionnaires différents, c'est toujours moins facile que si c'était une personne qui gérait le tout".

Mais les sept organes de gouvernance du tennis mondial échangent régulièrement entre eux sur ces sujets, assure-t-elle.