Effort exceptionnel demandé aux grandes entreprises et aux plus riches, dépenses d'Etat asséchées et postes d'enseignants rétablis: le projet de budget de l'Etat est soumis jeudi à un petit comité de parlementaires, chargés d'aboutir à une version commune.
Voici les principales mesures du projet de loi de finances pour 2025, et celles qui y ont déjà été ajoutées par la commission mixte paritaire (CMP), qui devrait reprendre vendredi.
- Sur les recettes, inspiration Barnier -
Le budget ayant été rejeté à l'automne par l'Assemblée nationale, la CMP a confirmé en grande partie la copie adoptée le 23 janvier au Sénat, une version globalement assez fidèle aux propositions initiales de l'ancien Premier ministre Michel Barnier, reprises par François Bayrou. Surtout sur le volet dédié aux recettes.
Y figurent donc des mesures annoncées à l'automne, comme l'effort temporaire sur l'impôt sur le revenu des ménages les plus aisés (2 milliards d'euros espérés) et la "contribution exceptionnelle" sur les bénéfices des grandes entreprises (8 milliards).
Le nouveau gouvernement entend néanmoins limiter cet effort à la seule année 2025, contre 2026 dans la "mouture Barnier". La CMP a acté cet ajustement, selon des sources parlementaires.
Autres propositions inscrites dans le texte: un malus renforcé sur l'achat de voitures thermiques, une fiscalité augmentée sur les rachats d'action et les chaudières à gaz, une taxe exceptionnelle sur l'armateur CMA-CGM. Cette dernière a également été limitée par la CMP à la seule année 2025, contre deux ans dans la copie du Sénat.
Le relèvement à 0,4% de la taxe sur les transactions financières, jugé insuffisant par le Parti socialiste ces derniers jours, a lui aussi été confirmé dans l'ébauche de compromis.
Les parlementaires ont également trouvé un compromis sur la hausse de la taxe sur les billets d'avion, qui passerait de 2,63 euros à 7,30 euros pour un billet en classe économique vers la France ou l'Europe, alors que le gouvernement visait 9,50 euros initialement. Au global, le dispositif rapporterait environ 800 à 850 millions d'euros à l'Etat, calcule un parlementaire.
- Budgets coupés -
Le gouvernement Bayrou, qui vise 32 milliards d'économies sur le volet dédié aux dépenses pour ramener le déficit à 5,4% du PIB en 2025, a déjà fait inscrire de nombreux coups de rabot dans le budget de plusieurs ministères.
Aide publique au développement, écologie, culture, recherche et enseignement supérieur... Les coupes se chiffrent à plusieurs centaines de millions d'euros à chaque fois, malgré quelques gestes sur la prévention des catastrophes naturelles, le plan vélo ou le budget des Outre-mer, revalorisé pour répondre notamment à la reconstruction de Mayotte.
A ce sujet, la diminution des dépenses liées à la transition écologique ulcèrent la gauche, qui espère encore des concessions sur ce point.
L'effort financier demandé aux collectivités locales, lui, a été stabilisé depuis plusieurs semaines sur la version du Sénat, soit environ 2,2 milliards d'euros demandés aux territoires.
Avec, pour les départements, la possibilité de relever le plafond des frais de notaires (DMTO) de 0,5%, sauf pour les primo-accédants.
Le gouvernement a par ailleurs renoncé à étendre à trois le nombre de jours de carence en cas d'arrêt maladie des agents de la fonction publique, mais il propose en revanche toujours de les indemniser à 90% au lieu de 100% durant leur arrêt.
- Enseignants, AME, SNU: irritants majeurs -
Plusieurs points sensibles doivent être arbitrés par la CMP pour aboutir à une copie finale susceptible de résister à la censure.
La suppression par le Sénat des crédits de l'Agence bio, sur laquelle le gouvernement a promis de revenir, en est une.
Idem sur le service national universel (SNU), proposition phare de la macronie quasiment supprimée par le Sénat.
Selon un négociateur de la CMP, les crédits du SNU devraient néanmoins être partiellement rétablis, une concession faite par la droite aux macronistes en échange d'un "soutien très sensible au budget du Sport", dont la réduction passe mal.
Plus inflammable encore dans le contexte actuel, la réduction du budget de l'Aide médicale d'Etat (AME) pour les soins urgents des sans-papiers.
La droite propose une baisse de 200 millions d'euros en prévision d'une réforme plus globale du "panier de soins" concernés par l'AME. Une "ligne rouge absolue" pour la gauche.
Mais la CMP pourrait finalement aboutir à cette diminution, avec le soutien du RN à LR.
En revanche, les parlementaires s'apprêtent à inscrire dans le marbre du budget la promesse de François Bayrou sur l'Education nationale en rétablissant les 4.000 postes d'enseignants que Michel Barnier voulait supprimer.