Sidaction - F. Barré-Sinoussi: "Je n'ai pas le côté people de Pierre Bergé"

"Je n'ai pas le côté people de Pierre Bergé, sa capacité à ramener des mécènes", reconnaît la nouvelle présidente du Sidaction, la prix Nobel Françoise Barré-Sinoussi, qui a succédé à l'homme d'affaires décédé en septembre et veut "défendre le lien entre la recherche et le milieu associatif".

Q: Votre présidence donne-t-elle au Sidaction une coloration scientifique après une présidence Bergé plus people ?

R: "Je n'ai pas son côté people, ce que je vois comme une faiblesse de ma part. Je n'ai pas sa capacité à ramener des mécènes, je ne sais pas faire. De ce point de vue-là, Line Renaud (la vice-présidente historique, ndlr) peut amener beaucoup. Mais certains disent que je suis un chercheur-activiste ! Le Sidaction, c'est le lien entre la recherche et le milieu associatif, et c'est ce que je veux défendre. Essayons de mutualiser nos efforts, avec le milieu associatif et les chercheurs spécialistes d'autres pathologies comme le cancer, au moment où on observe un désintérêt croissant envers le sida".

Q: À quoi ce désintérêt est-il dû ?

R: "C'est lié à quelque chose de très positif, au fait que les traitements antirétroviraux permettent aujourd'hui de vivre avec le VIH, même si ce sont des traitements à vie. Les antirétroviraux permettent de rendre le virus indétectable et d'empêcher sa transmission. Mais malheureusement, tout le monde n'est pas traité: il y a 6.000 nouvelles infections par an en France et 25.000 personnes ne savent pas qu'elles sont séropositives. Elles peuvent donc continuer à transmettre le virus. Certains semblent estimer que le sida est une condition chronique comme bien d'autres, le cancer, le diabète ou les maladies cardiovasculaires. Ça fait peur pour l'avenir".

Q: Et au niveau mondial ?

R: "36,7 millions de personnes vivent avec le VIH, dont 30% en sont porteuses sans le savoir. Dans certains endroits, comme les pays de l'Est, et notamment la Russie, le contexte politique est défavorable à la prise en charge des patients, et des politiques répressives sont mises en place envers les personnes les plus concernées. Et dans certaines régions du monde, on observe chez des personnes nouvellement infectées une augmentation de la résistance aux traitements. Cela veut dire qu'elles ont été contaminées par des personnes porteuses de virus résistants. Ça, ça fait peur. Si en plus le financement international baisse, c'est carrément à un retour en arrière qu'on assistera, et ça ira beaucoup plus vite que les efforts qu'on a mis en oeuvre ces 25 dernières années."

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